La Lombardie, un bout d'Italie mais une grande partie de mon cœur.
Dès que je mets un pied en dehors de l'avion, les six degrés de plus qu'à Bordeaux se font ressentir. J'ai bien fait de mettre ma robe rouge, totalement vaporeuse, elle est exactement ce qu'il fallait pour une journée comme celle-ci.
Les talons de mes sandales claquent sur les dalles minérales de la Piazza del Duomo. C'est le cœur de la cité, un bijou d'histoire et d'architecture. Entre la façade gothique de cathédrale de la Nativité-de-la-Sainte-Vierge, autrement dit il Duomo di Milano, troisième plus grande église du monde, la statue équestre du roi Vittorio Emanuele II, le Palazzo Carminati et les immenses porches méridionaux et septentrionaux qui marquent l'accès de la Galleria Vittorio Emanuele II, bien que totalement insignifiante comparée à ces monstres, je me sens totalement à l'aise.
Il fait plus frais dans l'historique galerie, le nez en l'air, j'admire la majestueuse verrière striant le ciel de métal. Cette galerie commerçante est d'un style néo-classique à tendance baroque de 152 ans, pas toute jeune la demoiselle. Pourtant, le temps n'a pas de prise sur elle, elle reste d'un prestige incontestable.
Je boude les boutiques de luxe pour les boutiques d'antiquaires et m'arrête fureter aux Éditions FELTRINELLI, purement milanaises, aux publications initiales fortement engagées, novatrices et même scandaleuses.
Après être sortie par le deuxième Arc de Triomphe, je salue la statue de Leonardo da Vinci, passe devant La Scala, entre dans la rue Guiseppe VERDI, pour me perdre dans le charmant quartier Brera. C'est là que je jetterai mon dévolu sur une assiette de viande braisée aux sauces japonaises.
Vous allez peut être me demander : « En Italie ? Manger asiatique ? Mais pourquoi ? »
Je vous répondrai : « Et pourquoi pas ? Je mange bien des sushis à Paris. »
Cette ambiance fait écho à celle du barbecue coréen de New-York, celle partagée avec les garçons, celle organisée pour mes 30 ans par Raffaele.
Raffaele, l'homme indéfiniment inaccessible, je m'y suis frottée, jusqu'à m'y piquer, jusqu'à même m'y brûler, et ça, malheureusement, corps et âme.Impatiente, je suis toute excitée de faire la surprise aux garçons. Grâce à Chiara qui est arrivée il y a déjà deux semaines, je sais qu'ils seront là. Ma petite tête blonde sera peut-être escortée par Flavio, il était déjà ici quand nous sommes rentrés de New-York. Quand à Raffaele, je n'en sais rien du tout, nous n'avons eu aucun échange depuis notre nuit chez lui. Honnêtement, je préfère qu'il ne vienne pas. Bien qu'il occupe mes pensées, pour mon bien, je me force à ne pas le laisser les envahir.
La chaleur, la musique, les clients enfiévrés, je suis bien au bon endroit, Il Sol.
Depuis l'entrée, j'observe Iago, icône de la virilité purement italienne, charmer involontairement une cliente. La pauvre, si elle savait, son petit cœur serait brisé à tout jamais, ou alors, elle deviendrait accro car fan de Boys Love, qui sait ?
Il y'a du monde, cela m'oblige à slalomer au travers de la foule pour arriver jusqu'au bar. Limite de dos, j'interpelle Iago qui essuie un verre.
_ Ciao, sei super eccitante questa sera. (Salut, tu es très sexy ce soir.)
_ Grazie (Merci). répond Iago après avoir était brièvement surpris.
_ Non c'è di eche (Mais de rien.) dis-je en me retournant.
Oh, l'immense sourire. Ni une ni deux, il fait le tour du comptoir, me serre dans ses bras et chuchote de belles paroles à mon oreille.
Entre deux clients, nous projetons déjà des soirées et week-end, jusqu'au moment où Iago me demande de me retourner.
Toujours vêtu de blanc, le grand blond attire les regards, pourfend la foule et s'arrête net quand il me voit. Il cligne des yeux avant que son visage se fende d'un sourire tout en ouvrant les bras.
_ Mia dolce metà. (Ma douce moitié) dit-il en embrassant ma tempe.
Son baiser est aussi doux que ses bras autour de moi. Dieu ! Ce qu'il a pu me manquer ! La chaleur bienfaitrice de Gian devrait être dupliquée à tel point elle est bénéfique.
Comme une évidence, c'est collé l'un à l'autre, que nous trouve Chiara, Flavio et ... Raffaele. Happy face, c'est ce que j'essaie de garder pendant que mon estomac fait des noeuds, mes mains deviennent moites, mon cœur se comprime. Autant Gian a une aura solaire qui rayonne, autant celle de Raffaele en ce moment est vaporeuse et sombre, et encore je ne vous parle pas de sont regard ! Même comme ça, il est pour moi, malheureusement, encore plus attirant.
Loin de la gaité communicative de Chiara et de l'air coquin de Flavio, leur aîné, bien que souriant, ne me trompe pas sur son état d'esprit, noir, très noir. Son regard se fait tranchant quand son frère se glisse entre nous le long du bar. Le benjamin se penche vers moi pour que je puisse l'entendre distinctement.
_ Dis-moi, à tout hasard, tu ne saurais pas pourquoi mon frère est dans cet état ?
_ Pas du tout.
_ Tu n'as rien remarqué ? Rien au retour ? Ou même peut-être à New-York ? insiste-t'il.
Heu... Tu veux parler des mois paisibles où je suis définitivement tombée sous le charme du merveilleux Raffaele et des trois semaines où il a fini par me conquérir corps et âme ?
_ Non, pas que je sache, il allait très bien. dis-je platement.
_ Il ne veut rien me dire, il s'est complètement renfermé. Il allait bien avant votre départ mais ça, je sais pourquoi et tant mieux, depuis le temps ! Foutue sangsue cette nana. Pendant votre déplacement quand je l'avais au téléphone, il paraissait si serein, ça m'a étonné de le voir enragé à son arrivée.
_ Tout c'est bien passé à New-York. Je ne savais pas que ton frère aimait la photo.
_ Beaucoup, elles sont encore plus belles quand il trouve sa muse.
_ Hum ?
_ Rien, rien. répond-il évasif.
_ Tes valises ont bien été livrées. Tu viens bien manger à la maison demain midi ? enchaîne-t'il.
_ Oui, bien sûr.
_ Bien, ah, je te laisse, le devoir m'appelle. s'échappe-t'il un sourire un coin en direction de la piste où Chiara danse timidement avec Gian.A ses côtés, mes vagues à l'âme sont plus terribles que jamais, tous mes sens sont exacerbés. Bien qu'attentive aux moindres de ses mouvements, je sursaute limite quand il se rapproche de moi. Non, non, ne te penche surtout pas pour me parler.
_ Tu viens danser ? demandé-je soudainement.
Froncement de sourcils, mâchoire serrée, il a très bien compris ma manœuvre, il soupire et me dit la réponse que j'attendais.
_ Non, mais je ne te retiens pas, vas-y.
Lâche que je suis, je ne me fais pas prier et rejoins les autres.Après quelques pas avec Flavio, le maître de la piste reprend ses droits sur sa moitié et ne me laisse pas une seconde de répit.
_ Bon, tu vas me dire ce qu'il s'est passé ? demande-il.
_ De quoi parles-tu ? dis-je naïvement.
_ Ne pense même pas à mentir, je le saurais. Dis-moi pourquoi Raffaele est fou de rage ?
_ Mais je n'en sais rien, qu'est-ce que vous avez tous à me demander ça ?
_ Ne te moques pas de moi. Même si c'est du coin de l'œil, il épie tout tes faits et gestes, alors que toi, tu le fuis. Qu'est-ce que tu as fais ?
_ Hein ? Mais pourquoi moi ?
_ Une intuition, raconte.
_ Roh, tu es agaçant.
_ C'est pour ça que tu m'aimes.
_ Nous avons eu une relation pendant trois semaines. Avant nos départs de Paris, pendant qu'il dormait, j'ai quitté son appartement, sans un mot.
_ Mais pourquoi ?
_ Pourquoi ?! Même si Katrina est une garce, le rôle de maîtresse c'est pas pour moi.
_ De maîtresse ?! Mais ? Tu n'es pas au courant ?
_ Mais au courant de quoi ?
Silence radio. Gian ne me répond pas et embrasse mon front avant d'enchaîner des pas techniques. A bout de souffle, je suis ravie quand il m'autorise enfin à regagner le bar. Merci à Iago qui se tient actuellement loin de Raffaele. J'hallucine complètement quand il pose mon verre, non pas devant moi, mais à côté de Raffaele et avec un clin d'œil en prime. Sérieusement ?
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Tant qu'il fait danser mon cœur
RomanceLibre, indépendante, enthousiaste, à bientôt trente ans, Adèle souhaite enfin se poser et ça, dans sa ville natale. Au détriment de son cœur d'artichaut, là où se posent ses valises, des liens uniques se créent, c'est comme ça avec elle, elle n'y p...