⑥ Cicatrices

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C'était quoi, ça ?
Personne n'est censé être dehors à cette heure-ci...
Du moins...
Pas à l'orphelinat...

- Saiharaaaa~

Shûichi aurait sûrement battu un record de (sur)saut en hauteur si deux mains ne s'étaient pas posées sur ses épaules pour le maintenir sur ses pieds.

- Qu'est-ce que tu fais dans ma chambre ?

Le noiraud se débarrassa vivement de ces mains, et se retourna pour faire face à Kokichi.

- J'ai fait le taxi depuis la chambre d'Angie, ironisa-t-il. Je crois qu'elle t'a drogué.

- Ah, ça explique la migraine... Je me rappelle que je me suis porté volontaire pour venir faire son rituel bizarre, mais après ça, vide intersidéral !

- Effectivement, sans vouloir t'offenser, tu as une tête à faire peur...

En effet, Kokichi était pâle comme un linge, et ses gros cernes violacés ainsi que ses cheveux en bataille et l'odeur étrange qui lui collait à la peau lui donnaient l'air d'un junkie dépressif.

- Je crois que je suis bon pour la douche ! Tu m'accompagnes, Saihara ?

Shûichi devint alors écarlate, et recula de plusieurs pas, jusqu'à ce que son dos rencontre le mur.

- M-Mais ça va pas la tête ?!

Le violet sembla un instant étonné, avant qu'un sourire malicieux n'apparaisse sur ses lèvres.

- Oh, allez, Saihara, on est des garçons, c'est pas un problème ! Fais pas ta vierge effarouchée, je vais pas te violer !

Il ricana ostensiblement derrière sa main.

- Mais si tu es trop pudique, pas de problème ! Tu pourras aller te doucher avec Chabashira lorsqu'elle rentrera de son cours d'aïkido... C'est un singe, alors ça ne devrait pas te gêner !

Rien que la pensée de se retrouver nu comme un ver devant Tenko, Shûichi vira au rouge écrevisse, encore plus violemment que la fois précédente.

- C-C'est bon... grommela-t-il, piqué au vif. Je viens avec toi...

Kokichi manifesta sa victoire en sautillant comme un gamin jusqu'à la salle de bain, qui se trouvait au sous-sol du bâtiment.

Dans le sol était creusé un grand bassin rempli d'eau chaude, typique des bains japonais, et quelques cabines de douche étaient sagement alignée le long du mur.

- Retourne-toi, marmonna Shûichi à l'intention du violet tandis qu'il se déshabillait.

- Roh là là... soupira Kokichi en se détournant à contrecœur.

Lorsque le noiraud eut fini et qu'il eut passé une serviette autour de sa taille, le violet le regarda avec des yeux ronds.

- Waaaaaw, Saihara, c'est la première fois que je te vois sans ta casquette ! Et franchement...

Il pointa alors du doigt l'épi de cheveux courbé qui faisait comme une antenne sur la tête de Shûichi, en éclatant de rire.

- Je suis pas déçu !!

Le jeune homme, vexé, passa devant lui et sortit du vestiaire sans même l'attendre.

En arrivant près du bassin, il tomba sur Kaito, qui se séchait dans une des cabines.

- Tiens ? Shûichi ? C'est rare de te voir ici à une heure pareille ! s'exclama celui-ci, un sourcil haussé.

- Ôma-kun m'a traîné ici...

- On dirait un chien... Il te saute dessus pour te réveiller, tu le promènes jusqu'au lycée et tu dois lui faire sa toilette... C'est quoi, la prochaine étape ?

Le noiraud sourit à cette comparaison, avant de se glisser dans l'eau.

Kokichi le rejoingnit peu après, et son entrée fut... explosive.

Car il sauta littéralement dans le bassin, éclaboussant Shûichi, qui le maudit alors de toute son âme.

- Ôma-kun, ce n'est pas une piscine !!

Et pourtant, le violet s'amusait bien à nager dedans...

Las de le surveiller, le noiraud détourna le regard, et s'enfonça dans l'eau jusqu'au menton.
La chaleur l'engourdissait, et il somnolait à moitié.

Il ne se rendit pas tout de suite compte qu'il s'était endormi...

Jusqu'à ce que, en ouvrant les yeux, il tombe nez à nez avec ceux de Kokichi.

- Qu-Que-

Le violet se recula immédiatement, en rigolant comme une baleine.

- Lorsque tu dors, ton antenne retombe, c'est trop marrant !

- Oui, bon, je vais me savonner, bougonna Shûichi pour changer de sujet.

Lorsqu'il sortit, il oublia de remettre sa serviette, ce qui attira le regard de Kokichi sur son entrejambe.

- Dis, Sai-

- N'y pense même pas, le coupa le noiraud.

- Mais j'ai encore rien dit !

- Justement...

C'est alors que son regard fut attiré par quelque chose qu'il n'avait jamais remarqué avant.

Deux grandes cicatrices barraient le flanc droit de Kokichi et presque toute la longueur de son dos.

Nettes, comme si on les avait tracées d'un seul coup avec un couteau.

Kokichi sembla sentir son regard sur lui, car il se retourna.

- Saihara ?

- Ah, non, j'étais distrait... bredouilla-t-il.

- Oh, dommage, je croyais que tu me matais, ricana le violet avant de disparaître dans sa cabine.

Shûichi marmonna une phrase inintelligible avant de faire de même.

Après s'être savonné, il laissa de l'eau glacée couler sur son dos.

Et sur la brûlure, qui, comme la cicatrice de Kokichi, faisait toute la longueur de son dos.

Cette brûlure, qu'il pensait que Kokichi n'avait pas vue...


- IL A DIT... QUOI ?! hurla Tenko pendant le dîner lorsque Shûichi lui rapporta les paroles de Kokichi.

- Que tu étais un singe, ricana le violet. Une guenon, même !

- ESPÈCE DE SALE PETIT MÂLE DÉGÉNÉRÉ !

- Petit, c'est une question de point de vue. Dégénéré, certainement. Mâle, évidemment. Mais sale, là, je ne suis pas d'accord ! objecta le violet. Je suis très propre ! Saihara peut en attester, d'ailleurs, il était avec moi !

Plusieurs paires d'yeux médusés se tournèrent vers le noiraud, qui rougit.

- D'ailleurs, il m'a même lavé le dos !

- N'importe quoi !! s'exclama Shûichi, toujours rouge, en plaquant ses mains sur la table. J'ai jamais fait ça !!

- C'est amusant, ce que l'imagination peut faire, ricana Kokichi en regardant le plafond.

Le noiraud poussa un grognement, et finit le plus vite possible son assiette avant d'aller se coucher.

La nuit était calme...

Et surtout glaciale, Shûichi s'en rendit bien vite compte lorsqu'il se releva vers une heure du matin pour aller chercher un verre d'eau.

"La chaudière fait encore des siennes..."

La chaudière de l'orphelinat aurait dû être changée depuis des années, mais personne ne semblait vouloir le demander au directeur.

Excepté cela, Shûichi put aller boire tranquillement son verre à la cuisine, bien que frissonnant dans son pyjama à carreaux.

Et peut-être aurait-il pu aller se recoucher tranquillement....

Si la fenêtre de la cuisine n'avait pas explosé.

Ce que nous aurions dû nous dire... 「Kokichi X Shûichi」Où les histoires vivent. Découvrez maintenant