4. À l'assaut (foireux) de Muan, lune de Yum

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Règle numéro quatre de l'Aar'on modèle : L'Aar'on se doit d'être toujours capable de prendre des décisions. C'est à lui qu'incombe la direction de Vojolakta et le maintien de l'ordre dans sa couche. Tous les faits importants doivent ainsi être validés par sa brune personne.

Dans le cadre de l'amour absolu qu'il porte à son Aar'on, les seules libertés décisionnelles accordées au Kili'an sont celles de le gâter, de le masser, de lui faire des bisous et de bouder (reconnu comme un droit incompressible du Kili'an par la convention collective qui le lie à son Aar'on), même si l'Aar'on a le droit de se venger avec une fessée.

Règle numéro quatre bis de l'Aar'on modèle : NON, ce n'est pas au Kili'an de décider ce qu'on regarde le soir à la télé ! À la limite, on peut chercher un consensus histoire de ne pas le frustrer, mais lui céder à chaque fois est un signe de mauvaise éducation. Et non, ce n'est pas lui non plus qui choisit la composition du menu du diner ! Ou alors, c'est lui qui fait à bouffer, mais sinon, il se tait et il mange.

Extrait tiré du guide de bon comportement à l'usage des Aar'ons en devenir du précepteur Mathuz

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De loin, Muan ressemblait à un paradis. Ciel toujours bleu parcouru ici et là par quelques nuages volatiles, climat doux et agréable, lagons cristallins, plages de sable multicolore et nombreuses steppes recouvertes d'herbe hautes jaunes, vertes et orangées, cette petite lune orbitant autour de Yum était tout simplement magnifique. Pourtant, malgré toutes ses qualités et une flore diversifiée, sa faune était plutôt basique et se composait de deux types d'animaux : d'un côté les légers qui se laissaient porter dans les airs au grès des bourrasques tel l'adorable Muanolatouche, petit rongeur volant trop mignon ; de l'autre, les lourds, solidement ancrés dans le sol et résistant aux pires des tempêtes, comme le fameux Loxodontamuan. Ne pouvant se déplacer librement, cette bestiole de plus de vingt tonnes se nourrissait principalement de ce qui passait à portée de sa trompe, notamment les pauvres Muanolatouches ainsi que les petits blonds. Petite particularité culinaire des Loxodontamuans : ils préféraient toujours commencer leur repas par les entrailles de leurs victimes sans attaquer la chair externe. Ce prodige était rendu possible par l'intrusion de leurs appendices naseaux – pourvus d'une langue et de dents – par les voix naturelles de leur casse-croute. Si, lorsqu'ils s'en prenaient aux Muanolatouches, c'était assez sale, cela produisait au contraire des sons rigolos lorsque c'étaient au tour des blonds de se faire déguster de l'intérieur.

– Aaaaaaaaaah, putaiiiiiiiiin, ça chatouiiiiille ! Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah

– Prends des notes, Aar'on... – intima Éduan. C'est exactement comme cela qu'il faut faire pour satisfaire un Kili'an ! Reproduis la même chose avec tes propres attributs et, crois-moi, tu connaîtras la plus belle des Résonnances.

– Aaaaaaaaaaah – fit le blond.

– Ah oui, je vois... – acquiesça le brun, fasciné. Mais il va y avoir un problème, non ?

– Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah – continua le blond.

– Lequel ? – demanda le Galos, inquiet.

– Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaah – poursuivit le blond.

– Baaaaaaah, mon nez est quand-même vachement plus petit et rond que celui de cette bestiole, non ? – expliqua l'Aar'on. Du coup, je ne suis pas sûr que ça fasse le même effet. Enfin, j'veux bien essayer, hein, mais faudra pas râler si après, il est déçu et il boude...

– AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH – hurla le blond.

– Bon, Kili'an, arrête ! – ordonna son maître. J'ai bien compris que Monsieur le Loxodontamuan était un meilleur partenaire que moi, mais là, à t'égosiller comme ça, tu nous fais honte. Regarde, le pauvre Éduan ! Il est en train de chialer le bec dans ses pattes !

Les chroniques de VojolaktaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant