CHAPITRE 11 : Issue

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Je laisse le carton sur le côté, et en m'appuyant sur le sol comme je peux, je me relève. Je regarde en haut les autres cartons qui seraient susceptibles de pouvoir contenir des marteaux, lorsque l'un d'entre-eux me parait parfaitement proportionné pour en être le contenant.
Je me dirige vers ce carton, un mètre sur la droite du premier, en espérant que celui-ci sera le bon.
J'ai bien trop la flemme d'aller récupérer la chaise là bas, et préfère une nouvelle fois m'étirer, réveillant de nouveau la douleur. Je me saisis du carton sur demi-pointes. Je le descends à hauteur de poitrine et éclaire ce dernier pour enfin y découvrir ce que je cherchais. Je souris en sentant que je me rapproche de la fin. Je pose le carton au sol et m'accroupis. Je sors un à un, les bâtons surmontés d'une masse à leurs bouts, à la recherche du plus imposant et du plus lourd. Je prend le marteau qui me semble être le plus d'usage à la destruction d'une porte. J'en choisis un autre au cas où.

Les marteaux dans une main, la lampe dans l'autre, j'oublie ma douleur, et me lève, dirigeant ma marche vers les escaliers. Je monte sans courir, sans ralentir, d'un pas décisif, confiant et déterminé. Je veux sortir. C'est décidé. Et je sortirai de cette cave !

Mais une fois en haut ma détermination diminue considérablement, ma respiration devient forte, et je peux sentir augmenter la pression. Je sens mes épaules s'affaisser.
Je vois le pull que j'ai enlevé tout à l'heure, afin de réduire la chaleur causée par le même état. En effet, j'ai chaud, je peux sentir une goutte sur le côté de ma joue, mais je ne sais pas si elle vient de la transpiration, du stress, ou s'il s'agit encore d'une larme. Une larme, de tristesse engendrée par cette situation peu conventionnelle ; de nostalgie, ma vie normale, mes habitudes, ma mère, mon frère, mon père me manquent. Je suis seule. Et surtout, une larme de peur.
Que va-t-il se passer une fois que j'aurai ouvert cette porte ? Je suis tellement effrayée que je n'en ai plus envie. Le courage va-t-il vraiment me manquer maintenant, va-t-il vraiment s'évaporer au moment au moment où j'en ai le plus besoin ? J'essaie de me convaincre que je dois ouvrir cette porte car je sais que c'est ce qu'il faut faire, car je sais que j'en ai besoin. J'ai besoin d'ouvrir cette porte. Je dois ouvrir cette porte, je dois savoir qu'est-ce qui se trouve de l'autre côté, qui se trouve de l'autre côté et surtout je dois découvrir la raison, l'explication à tout ceci. Je sais que c'est ce que je dois faire, je le sais, mais au plus profond de moi je continue d'avoir peur. 

Je prends une inspiration et respire calmement pour tenter d'apaiser mes effrois intérieurs et je me résous à passer le pas.
Je dois avoir CONFIANCE.

Je pose un marteau sur le pull, pour que le son de sa chute ne résonne pas sur le sol mais soit assourdi par la matière du vêtement.
Si je pouvais en effet avoir l'élément de surprise de par ma discrétion, ce serait à mon avantage pour le contrôle de la discussion que je compte bien avoir avec mon séquestreur. Même si bien sûr, je ne briserai pas la porte du premier coup que je lui porterai. Mais de cette façon, peut-être que mon ennemi ne bénéficiera pas d'un temps de préparation pour me répondre.

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, mais je pense que cela dépend en réalité de la personnalité et du caractère de chacun, je ne compte pas fuir dès
que je serai sortie, d'autant plus qu'il n'est même pas sûr que j'y parvienne. De plus, ma réaction dépendra avant tout de la personne que je rencontrerai dehors.
Je préfère montrer une fois de plus que je n'ai pas peur. Je veux affronter son regard.
J'ai réussi le défi, j'ai résolu les énigmes, à présent donnez moi la solution finale et l'explication ! Je n'ai pas fait tout ça pour rien. Il y a bien un but, mais je l'ignore, alors dites le moi, expliquez le moi !

Je me rends compte que je ne suis pas la seule personne à qui cet homme doit des explications, mais qu'il en devra aussi à d'autres, quand je sortirai, à mes parents mais aussi la police, car je ne compte le laisser s'en tirer.
En pensant alors aux forces de l'ordre, je réfléchis. Me croira-t'on ? Enfermée dans sa propre cave par un inconnu avec un jeu de piste ? Dit comme ça, je me demande moi-même si je ne suis pas folle, si je n'ai pas inventé tout ça, si je ne me suis pas endormie en faisant mes devoirs, et je vis actuellement le pire cauchemar de toute ma vie. Mais comment ? La douleur est réelle. Mon cerveau est incapable d'aller si loin. Mais qui, qui derrière cette porte, est capable d'en arriver là ?

Je sors mon téléphone de la poche 20:00 et 20%. Je déverrouille l'écran et vais sur l'application Dictaphone, j'enclenche ce dernier et attends de voir défiler les premières secondes pour être sûre que l'enregistrement a bien commencé. Je remets le téléphone dans ma poche arrière, l'écran vers moi, et espère que la lumière qui en dépasse toujours n'attirera pas l'attention, mais ne m'y attarde pas plus longtemps.

Je prends une grande inspiration, ma douleur a disparue, l'adrénaline doit être de retour. Je prends mon courage à deux mains ou plutôt mon marteau à deux mains, et lève la masse au dessus de ma tête. Je reproduis le mouvement d'un joueur de baseball, qui me paraît être approprié à cet usage là également et tente d'y mettre toute ma force, jusqu'à pousser un grognement bien peu féminin, dans mon action, un peu similaire à celui des tennismen.
Autant dire que je suis fort déçue quand je constate que le marteau a à peine creuser la surface de la porte. Pendant un moment, j'ai envie d'abandonner, de desserrer ma prise et de laisser glisser entre mes doigts le bois. Puis je me remémore mes motivations, et relève mon bras forçant sur mon épaule.
En y réfléchissant, je me rends aussi compte qu'il est inutile de mettre en mille morceaux la porte, alors qu'il me suffit de détruire le système de loquet pour la déverrouiller et l'ouvrir.
Cette fois-ci, je vise donc la poignée et je prends plutôt l'exemple du javelot, je place le marteau vers l'arrière, et le lance, le projette avec tout l'élan de mon corps que je fais basculer de mon pied arrière vers l'avant jusqu'à ce que le marteau vienne une fois de plus frapper le panneau de la porte. L'efficacité bien supérieure de cette méthode se remarque assez rapidement par la brèche formée dans le bois, laissant passer un filet de lumière jaunâtre caractéristique des bougies qui sont encore allumées, et synonyme du fait que la coupure de courant est encore d'actualité. Malgré la poignée subsistante, cette petite lumière qui m'avait tant manqué me redonne de l'espoir perdu depuis longtemps. C'est sur cette note que je relève mon marteau encore et encore, venant frapper la porte encore et encore, et ce avec beaucoup de facilité maintenant que la structure est fragilisée.
Je suis étonnée de n'entendre aucun bruit de l'autre côté de la porte, mais je m'en moque me disant que je m'en préoccuperai après et ma colère me pousse à continuer, jusqu'à ce que la poignée tordue tombe au sol et qu'un bruit métallique se fasse entendre. Je lâche le marteau que j'entends résonner et pose la paume de ma main là où se trouve désormais un trou en lieu de poignée.

Je pousse la porte, fais un pas sur le parquet apparaissant et m'avance dans la lueur des bougies.

« Vous ?!! »

***

Qui est-ce ?
Que va faire Lucie ?
Va-t'elle s'échapper ou non ?

La cave [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant