Garde un œil sur elle ! (terminée)

Chapitre 1

Caroline

Allongée sur mon canapé de style scandinave, je m'énerve après les personnages du livre que je lis. Encore un roman ou les personnages ne voient pas plus loin que le bout de leur nez. Ils gâchent tout avec leurs simagrées, je suis déçue l'auteure m'avait habituée à mieux. Je prends mon calepin et je note ce qui me dérange dans le récit. Je suis interrompue par un ricanement de ma colocataire.

Je lève la tête et regarde Elisa. Sa coupe de cheveux est plus courte qu'en début d'année et cela lui va beaucoup mieux. L'une de mes grandes mèches blondes tombent devant mes yeux et je la remets derrière mon oreille.

— Fleur bleue mais pas niaise, se moque-t-elle.

C'est le nom du blog que je tiens secrètement depuis deux ans et dont elle a découvert l'existence le mois dernier. Je critique l'actualité de la littérature romantique et mes critiques franches ont trouvé un public à l'affût de mon prochain massacre, comme l'appelle Elisa. Je préfère dire que je relève plutôt les clichés dans des histoires que l'on survend auprès des amatrices et que je déniche des pépites qui méritent d'avoir davantage de publicité. Je préfère garder l'anonymat pour pouvoir rencontrer des représentants l'esprit tranquille dans la librairie où je travaille.

— Exact, c'est pour le blog, lui répondis-je.

Elle affiche un grand sourire.

— Tu vas le descendre en flèche ? me demande-t-elle les yeux brillants de curiosité.

— Je suis un peu déçue, dis-je en fermant le livre. Le premier roman de l'auteur était un bijou, celui-là est d'une banalité affligeante à croire que quelqu'un d'autre l'a écrit à sa place.

Elle sourit, prend le livre et regarde le résumé à l'arrière. La littérature n'est pas sa passion et sa grimace me confirme qu'elle ne cherchera pas à lire ce roman. Elle le repose avant d'ajouter.

— Ça a l'air un peu cucul la praline, la fille pauvre qui tombe amoureuse d'un milliardaire. Elle n'a rien compris à la vie, un agent immobilier, c'est le top, dit-elle en me faisant un clin d'œil.

Depuis leur réconciliation à l'anniversaire de mariage des grands-parents de Stéphane, Elisa file le parfait amour avec notre ami. J'ai peur de les retrouver un jour, nus dans la cuisine. Je préfère ne pas me mettre l'image en tête sinon je ne verrais plus la table de la même manière.

— Café ? lui proposé-je.

Elle refuse d'un signe de tête.

— J'ai pas trop le temps, je passe la soirée avec Stéphane comme je travaille tout le week-end, je n'aurais pas le temps de le voir. Pendant que j'y pense, je fais les courses demain, ça t'évitera de draguer un pauvre étudiant pour un pot de pâte à tartiner. Je suis venue te voir car j'aimerais te parler de Lu.

Lucia, notre autre meilleure amie, nous inquiète depuis sa dispute avec l'un de notre groupe d'amis. C'est notre principale source d'inquiétude, ces derniers temps.

— Je croyais qu'on avait décidé d'écouter Stéphane et que nous ne nous mêlerions de rien les concernant. Je n'ai pas envie que ça me retombe dessus et que l'on m'accuse d'être trop intrusive.

— Steph s'est excusé depuis et de toute façon je te remercie sinon j'aurais sûrement trouvé une excuse bidon pour fuir comme d'habitude. Je ne veux pas revenir sur le fait que l'on ait dit de les laisser se débrouiller tout seul. Quand je suis allée déposer les bijoux dans sa boutique hier, j'ai vu que ça n'allait pas. Son étudiante va bientôt lui filer un coup de main mais je pense que ça a un rapport avec Gabriel, me raconte-t-elle.