Chapitre 13

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Jeudi 17 février. 01h00.

Je crois que je reste pétrifiée comme ça 20 ou 30 minutes...
D'un coup, j'entends le cliquetis de la serrure, celui que j'étais heureuse d'entendre tout à l'heure quand j'ai moi-même tourné la clef, sur mon petit nuage...
Cette fois, ce cliquetis me terrifie. J'ai attendu sur le canapé, j'ai réfléchi, enfin, j'ai essayé, mais je ne sais toujours pas comment aborder le sujet... Je ne sais pas comment lui dire que je sais, ni si je dois lui arracher les yeux ou lui pardonner. Je sens la colère en moi, je sais que ce n'est pas une bonne conseillère. Mais je sais aussi que, parfois, il faut simplement s'en remettre à son instinct.
J'entends ses pas dans le couloir de l'entrée. Je suis terrifiée. Je décide pour l'instant de me composer un visage normal.
Je suis toujours sur le canapé, la télé est allumée et je fais semblant d'être absorbée par le programme. Je me rends compte que c'est un documentaire sur la police criminelle en pleine action. En général, je déteste ça, mais bon...
Sa silhouette apparait dans l'embrasure de la porte. Il s'approche de moi, me demande: « Ça va? » et me fait un smack. Je lui réponds un timide: « Ça va » et lui demande s'il a bien travaillé.
Oui, on a bien avancé, répond-il
...
Je me retiens pour ne pas exploser et le gifler. Je sais très bien qu'il ne travaillait pas. Peut-être est ce une hallucination olfactive, mais j'ai même l'impression de sentir son parfum à elle sur lui.

Soudain, je craque. Je pensais tenir plus longtemps, mais à quoi bon ? A quoi ça rime ? Pour me faire encore plus de mal ?

Je lui dis, très tranquillement:

Qu'est-ce que tu dirais si je comparais Nirvana et Phil Collins? Juste comme ça ?

Sa mine se décompose. Et là, je crois rêver. Il me répond, furieux :

De quel droit fouilles-tu dans mes messages?
Quoi ??!! Non mais tu rigoles !? D'abord ta session était ouverte sur l'ordi, et tu sais bien que ce n'est pas le problème! C'est qui cette connasse ?!
Bah apparemment tu sais qui c'est puisque tu as fouillé.
Oui, j'ai très bien compris qui c'était. Et j'ai surtout très bien compris ce que tu faisais avec, t'inquiète pas !

Il marque un temps d'arrêt, le regard dans le vide, puis ose me sortir :

Oui, bon, ok... Oui, c'est vrai. J'ai eu une micro aventure... Pardonne moi...
« Eu » ?? Plus maintenant ?? Pas ce soir, par exemple ?

Re-le regard dans le vide, comme si il cherchait quoi répondre...

Heu...Si. C'est vrai. Mais maintenant c'est fini. Je lui ai justement dit ce soir.
Hahahaha ! Tiens, quelle coïncidence... le jour où je le découvre, c'est justement ce jour là que tu as choisi pour rompre avec elle. Tu te fous vraiment de ma gueule !
Écoute, dit-il d'un ton doux en s'asseyant à côté de moi et en posant son bras sur ma cuisse, je ne voulais pas te blesser. C'était juste une passade. Avoue que tu n'étais pas très disponible pour moi ces derniers temps. On ne peut pas dire que tu aies fait beaucoup d'efforts pour te rendre désirable. Et hier, tu crois que ça m'a fait plaisir ton statut Facebook !? « En couple avec mon canapé »
Ah oui, pardon, c'est de ma faute en plus, c'est ça ?! Dis-je en dégageant son bras. Non mais je rêve.
Ce n'est pas ce que je dis, mais je t'aime, je veux rester avec toi. Je vais me faire pardonner.
Commence déjà par me dire la vérité. Depuis quand ça dure ? Combien de fois l'avez vous fait ? Quand ? Où ? Comment ?
Écoute, Amandine, a quoi ça servirait que je te donne des détails. Ça s'est passé, c'est tout.
JE VEUX SAVOIR. Et par exemple, quand l'avez-vous fait ici?

Il paraît étonné que j'en sache autant. Il ne pensait sans doute pas avoir laissé tant de détails dans ses messages... Il baisse les yeux, sans prononcer un mot, et ça, ça veut dire qu'il cache quelque chose...

Mat, dis moi la vérité.
Ok, ok... bon... elle est venue lundi matin, juste après que tu sois partie... Je ne m'y attendais pas, j'ai ouvert la porte et elle était là. Et oui, c'est vrai, on l'a fait là. Je le regrette. Vraiment.
Attends, attends... lundi ? Tu te fous de moi ? Mais je suis rentrée lundi matin, j'avais oublié ma clef usb.
Oui, je sais. On s'est cachés dans la penderie... quand on t'a entendu rentrer...

La scène me revient en un éclair, je me revois au bout de ma vie chercher cette clé usb pour la présentation...

Hein ?! C'était ça le bruit que j'ai entendu ?! Je croyais que la penderie était tombée
Oui. J'ai fait un faux mouvement dans le placard et la penderie est tombée, j'ai eu peur que tu ouvres.
Ooooh pauv petit chou, t'as eu peur ?
C'est pas ce que je voulais dire.
Connard ! Et ça, c'est exactement ce que je veux dire !

Je me mets à le taper avec le plat de mes mains sur l'épaule. Autant dire que ça lui fait l'effet d'un moustique qui tapoterait sa peau.

Allez, dégage ! Je hurle. DÉGAGE!

Je me lève, hors de moi, j'ouvre la porte porte de l'appartement et je tends mon doigt vers l'extérieur. Je suis dans un état second. Sur le palier, un voisin a ouvert la porte. Il a compris et l'a refermée aussitôt.

TU DÉGAGES MAINTENANT !!

Mat' grommelle, il fait demi-tour vers la chambre, s'empare d'un sac, y fourre quelques affaires en vrac, le ferme sèchement.

Il passe devant moi sans rien dire, passe la porte que je tiens ouverte. Je le regarde s'en aller sans rien dire et disparaître dans l'escalier.
C'est fini.

Je ferme la porte, mes dents sont serrées à se briser. Je m'allonge sur le lit et je desserre enfin la mâchoire, c'est comme entrouvrir un barrage, les larmes coulent en torrent.
Intérieurement, je me dis qu'il est vraiment, vraiment, vraiment temps de faire du ménage dans ma vie.

Je l'aimais.

Et si changer de vie, c'était devenir vraiment soi-même...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant