Chapitre 12

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Mercredi 16 février. 23h15.

Voilà la porte de mon appartement qui se dessine...J'ai à peine eu l'impression de monter les escaliers. Parfois, j'ai la sensation de gravir l'Everest, que ces marches se multiplient à mesure que je les grimpe. Mais ça, c'est quand je ne suis pas en forme. Encore une fois, les Vivi m'ont requinquée !
J'ai une bonne nouvelle à annoncer à Mat' et j'ai terriblement envie de lui...

Je tourne la clé et je comprends immédiatement qu'il n'est pas encore rentré. S'il est là, la clé sert de poignée en un sens. Je la tourne d'un quart et la porte s'ouvre; Mais là, je fais deux tours de clés, signe que la porte était bien fermée et que personne n'est à l'intérieur de l'appartement. Je suis déçue... mais pas grave. Je vais me faire une tisane et une petite douche en l'attendant.

Je fais chauffer l'eau, je cherche ma boite de tisane de Camomille. J'aime cette préparation, l'odeur des herbes sèches et la vapeur d'eau qui commence à emplir l'air.
J'ai pris une douche et je me sens légère, j'ai l'impression de flotter. Je ne sais pas si c'est l'alcool, le fait d'avoir gagné ce jeu débile ou d'avoir autant rigolé avec mes vivis :)

Je m'installe sur le canapé, ma tisane dans les mains. Je serre mais le mug est trop chaud. Le truc, c'est de le poser avant de se brûler, mais le garder assez longtemps pour sentir cette chaleur réconfortante. Je suis bien. Je respire enfin, après ces jours de galère et de déception. Je pense à l'Ardèche. C'est fou quand même. La vile de l'hôtel de charme vanté par le présentateur, ça se situe à quelques kilomètres seulement du village de Maminou.

Je n'étais pas sûre d'avoir envie d'y revenir un jour, pour éviter de m'effondrer sous le poids du souvenir. Mais là, je me dis que le destin veut que j'y retourne. Peut-être est-ce Maminou qui depuis son étoile a tout manigancé ;)

Je suis dans mes pensées et je vois que l'ordinateur est resté allumé dans le coin du salon. Allez, je vais zoner un peu sur Facebook en attendant Mat'. Je n'ose même pas penser à un éventuel nouveau message de Julien. Ce serait gênant, je ne saurais pas quoi lui dire. Surtout, vu mon état, ce n'est surtout pas le moment de lui écrire quoi que ce soit... Mais ce serait un peu excitant aussi.
Je m'assois devant l'ordi, je lance le navigateur internet pour me connecter à Facebook. Et là, tiens, je m'aperçois que Mat' a laissé ouverte sa session.

Dans ces moments-là, je sens, comme dans les dessins animés, ma bonne et ma mauvaise conscience, posées chacune sur une de mes épaules. Ma bonne conscience me dit doucement: "Ne farfouille pas, ça ne te regarde pas. Laisse lui son jardin secret, fais lui confiance..."

J'aimerais bien l'écouter, je sais qu'elle a raison. Le problème, c'est que ma mauvaise conscience parle plus fort. Elle hurle même : " Regarde! Qu'est-ce que tu risques! S'il n'a rien à cacher, quel est le problème ??"
A votre avis? Laquelle ai-je écouté?
Je clique.

Les messages persos de Mat' s'affchent. Je descent le fil de son historique. Des messages de Fred, son meilleur pote (que je déteste, c'est un beauf, mais passons...). Je regarde rapidement. Des blagues débiles de mecs... Ensuite, quelques messages de collègues... Ah. Un message d'une certaine Natacha.

Blonde, en maillot sur sa photo de profil... Je regarde. C'est un fake, un robot ou je ne sais quoi. Bref, Mat' ne s'est pas laissé prendre. Bravo mon amour! ;)

Je remonte encore. Des messages de sa cousine. De sa mère (Mat' est ami FB avec sa mère. ça, je comprends pas, mais bon...)
Tiens. "Hélène Charpon". Je ne la connais pas elle. Mignonette. Je clique sur la conversation et au même instant je ressens un malaise, comme un mauvais pressentiment, puissance 10. Je sais d'instinct que quelque chose cloche. Le premier message date d'il y a deux mois.

Hello Mat', merci d'avoir accepté mon invitation :) C'était cool de te rencontrer à la soirée de lancement du nouveau.
Coucou Hélène, c'était un plaisir partagé. Et je maintiens : Nirvana ne vaut pas Phil Collins !
Ha ha :) Mais ça n'a rien à voir ! On ne va pas encore avoir ce débat, ça a failli mal tourné déjà! ;)))

Petite private joke, manifestement. quel est le rapport entre Nirvana et Phil Collins ? Bref... Ils ont eu l'air de bien s'amuser à cette soirée. Je me rappelle que Mat' était rentré tard. Et de très bonne humeur.

Alors, reparlons-en calmement, si tu veux. Autour d'un verre...
Hum... ok ! Demain ? ou c'est trop tôt pour toi ? Tu as peut-être peur de ne pas avoir le temps de travailler tes arguments...
Tu ne me fais pas peur ! ;) Demain. 20h. Au Dragibus.
Ça marche ! J'apporte mon MP3
Tu as le goût du risque!

Je ne comprends rien à cette conversation.. mais ce qui est clair, c'est que c'est que ça ressemble à une "date" en bonne et due forme. La curiosité malsaine prend le pas sur tout le reste. Allez, je continue fébrilement la lecture, ma main tremblante sur la souris, mais il faut que je sache. La conversation continue le lendemain, à 1h du matin.

Bon, je m'incline, tu avais raison. Tu as gagné.
Merci Mat'! C'est tout à ton honneur de reconnaître ta défaite. ;) ;) ;) J'espère que ce sont uniquement mes arguments qui t'ont convaincu.
J'admets que ton baiser n'est pas pour rien dans mon changement de point de vue. Je crois qu'avec tes lèvres, tu pourrais me rallier à n'importe quelle cause...
Alors, je te rallie à la mienne! Bonne nuit...
Bonne nuit... Et merci pour cette soirée

Je lis mais l'écran est flou. Mon coeur s'emballe. Quelque chose, à cet instant, se brise en moi. Leurs petits sourires de flirt me terrassent. J'ai l'impression que c'est de moi qu'ils rient tous les deux. Je lis la suite à toute vitesse, je ne crois pas ce que je découvre, comme si je voulais nier la réalité. Les "dates" se succèdent et je comprends que les choses sont allés plus loin, beaucoup plus loin. Les messages sont très explicites.

Ton corps me manque, tes seins surtout...
Ils attendent tes mains et ta langue, ils sont à toi

J'ai la nausée soudain, une irrépressible envie de vomir. Je respire doucement (technique Virginie). Je me calme. Je relis une fois encore les messages, des détails apparaissent que je n'avais pas saisi à la première lecture. Je comprends notamment qu'ils l'ont fait chez moi, chez nous... J'essaye de me calmer, mais je n'y arrive pas. Je n'arrive même pas à pleurer, c'est la colère qui prend le dessus... Il est minuit et Mat' n'est toujours pas rentré.

Maintenant, je sais pourquoi.

Et si changer de vie, c'était devenir vraiment soi-même...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant