Chapitre 9 : Jeu de Rôle Inattendu

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J’eus tout juste le temps d’apercevoir un jeune freluquet, avant de me retrouver pressée contre un torse blanc, nu et musclé. Je posais une main sur le bras de Lazare, autour de ma taille.

Il était beau, ainsi, torse nu, auréolé de la lumière se reflétant sur sa chevelure de plumes, son épée pointée en direction de notre hurleur. Ses prunelles écarquillées manquaient de jaillir de leur orbite.

-Qui es-tu, humain, pour oser poser les yeux sur elle ? gronda Lazare, de sa voix relevant du surnaturel.

Le jeune garçon tremblait dans sa cotte jaunâtre, ses iris marrons perceptibles sous sa tignasse blonde.

-Je… Je…

-Parle !

-Je suis désolé, Seigneur l’Ange ! s’écria-t-il en se jetant à genoux, les mains à plats sur le sol, son front manquant se cogner dessus. Je ne voulais pas souiller votre compagne de mon regard, mais j’étais de passage, je ne m’attendais pas à la voir en tenue d’Eve ! Je suis désolé, Seigneur l’Ange, ne dite rien à Dieu !

Aussi prise de court que lui, j’échangeai un coup d’œil avec Lazare. Un léger sourire au coin des lèvres, nous hochâmes la tête de concert. Faisant mine de protéger ma pudeur, je me dirigeai en direction du coin des garçons, d’où Saül n’avait toujours pas bougé.

-Pourquoi ferais-je une telle chose, mon brave ? Nulle malignité ne se cachait dans ton geste. Relève-toi.

Retenant mon gloussement, je me dépêchais de franchir la barrière des buissons, pour trouver mon baluchon, tout près des affaires de Lazare. Ce faisant, je croisais aussi notre homme-serpent, dont le souffle se coupa à la vue de ma nudité.

-Qu’est-ce que…

-Il prend Lazare pour un ange, expliquai-je en tirant une tenue noire et blanche du sac. Vu les troubles dans la région, les Masques doivent toutes finir sur le bûché, alors nous allons nous faire passer pour…

Je m’arrêtai net, en me souvenant de l’apparence spéciale de Saül. Pivotant vers lui, je lorgnai les écailles au coin de ses yeux, sur le haut de ses épaules, ses hanches… Mmh, j’avais oubliée qu’il était fort bien…

-Toi, par contre, tu vas nous poser un problème, grommelai-je, en me dandinant pour enfiler ma robe noire. Tu as vraiment le profil du suppôt du Diable.

-Hein ? Bafouilla-t-il, occupé à en lorgner mes seins. Mais je…

-Désolée, mon petit Saül, souris-je.

*

-Ne t’en fais pas, murmura Lazare à mon oreille. Il a vu le galbe de tes seins, mais en aucun cas la rougeur de ta chevelure.

-Me voilà rassurée, ris-je en réajustant la guimpe sur mes oreilles. Sire Guyot, puis-je savoir ce qui vous a conduit jusqu’à cet endroit ?

Le jeune homme, rouge jusqu’à la racine des cheveux, n’osait pas lever la tête vers moi. Je souris pour couper court à mon ricanement. Il ne seyait plus à ma nouvelle robe.

-J’étais en route pour rencontrer Alix de Joncherolle, escortée par le Seigneur Chabanais, lorsque je suis tombé sur vous par mégarde… Je… Heu… Désolé, ma Sœur…

Hé oui… Si Lazare était sexy en ange, je devais bien trouver une explication à sa présence auprès d’une simple mortelle. Travestie en bonne sœur, je souris avec toute la gentillesse dont j’étais capable.

-Ce n’est rien, mon Fils. Mais nous sommes sans le gîte, peut être pourriez-vous nous indiquer une auberge ?

Guyot leva brusquement les yeux, un désir de rédemption y brillant intensément.

Les Affres d'une GrenouilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant