Chapitre 21 : Concoction Diabolique

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Au début, Saül cru être victime d’un mirage, d’une hallucination dut aux jours d’enfermements. Mais lorsqu’il vit la silhouette remuer, au seuil de la conscience, son cœur fit un bond dans sa poitrine. Dans les ombres parées des lueurs orangées du feu, il vit la jeune femme revenir à elle, avec un grognement tout sauf féminin.

-Mortecouille, lâcha-t-elle.

La Pernelle repéra immédiatement les symboles occultes inscrits sur le sol, tout autour d’elle, formant un cercle suffisamment large pour englober le chaudron et la table recouverte de produits immondes. Sur pieds, elle se massa l’arrière de la tête, pour en revenir avec des doigts tachés de sang.

Sans perdre une miette de ce spectacle, Saül se rapprocha de sa barrière invisible, l’épuisement et la soif l’empêchant de piper mot. La Masque se tourna aussitôt vers lui, haussa un sourcil en l’apercevant.

-Tiens donc. Mon petit Saül, toi aussi, tu t’es fait capturer par Cambrinus ?

Il hocha la tête, elle haussa les épaules. Oui. Il ne devait pas se faire d’illusion. Même s’il était dans cette situation par sa faute, elle n’avait cure de son sort….

-Ha, Duchesse ! s’exclama Cambrinus en surgissant dans la bibliothèque assombrit par la nuit, un insolent sourire aux lèvres. Enfin réveillée ! Il était temps. Mets-toi au travail, femme.

-Cambrinus, susurra-t-elle en se dirigeant vers l’extrémité de son cercle, un mauvais sourire aux lèvres. Pourquoi devrais-je aider une ordure dans ton genre ? Tu as tué mon frère !

Elle cria cette dernière phrase, en donnant un tel coup de poings sur la barrière que ses jointures saignèrent. Cambrinus éclata d’un rire cruel, en posant des livres sur la table basse.

-Tu croyais quoi, ma belle ? Qu’un type ayant passé un pacte avec le Diable allait simplement laisser ce gosse vivre, jusqu’à ce que tu le satisfasses ? Non. Ton cher frère est mort le jour même où il est arrivé en Alsace, Pernelle.

L’estomac de Saül se serra, face à la fureur de la Masque, à son désespoir. Qu’était-elle devenu, depuis son départ ? Que c’était-il passé en Alsace ? Et Lazare ? Continuait-il à la traiter comme un objet de mépris ? Étais-ce pour cela qu’elle était revenue ici ?

-J’avais tout prévu, sorcière, continuait le Duc. En découvrant la mort de ton frère, je savais que tu allais tenter de me tuer. Or, j’ai besoin de toi pour trois dernières choses.

-Va te faire voir ! rugit-elle en frappant de nouveau sa prison.

Cambrinus gloussa en se dirigeant vers Saül, dont le mouvement de recule ne servit à rien. Affaiblit comme il l’était, il ne put rien faire pour échapper à sa poigne cruelle. Il s’empara de ses cheveux, pour lui poser le fil d’une lame sur la gorge.

-Si tu ne coopères pas, ton précieux amant mourra, Pernelle.

Le monde parut s’écrouler autour d Saül, la bibliothèque devenir bien plus noir.

Il était mort.

S’il y avait bien une chose que cette femme ne supportait pas, c’était de se faire forcer la main. De risquer sa vie pour celle d’un autre. Il allait mourir, ici et maintenant, accompagné de ses regrets.

-Ne fais pas ça.

Il cligna des paupières, stupéfait. La Pernelle le fixait de ses yeux noirs, avec colère et dégoût. Pourtant, elle répéta ces paroles.

-Ne fais pas ça. Il ne mérite pas de mourir par ma faute. Je ferais les trois choses que tu me demandes.

-Parfait ! s’exclama joyeusement Cambrinus en le relâchant. Il restera là jusqu’à ce que tu te sois acquitté de tes taches ! Premièrement, tu vas finir le filtre d’amour à base de Mandragore. Je ne comprends rien à vos pratiques de sorcières.

Les Affres d'une GrenouilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant