La Pernelle dormait tranquillement dans sa chambre, épuisée. La situation était pesante, pour bien des raisons. Il ne savait pas comment elle faisait pour être aussi patiente. Aussi en avait-il profité pour sortir, afin d’aérer son esprit.
Enfin, du moins, c’était ce qu’il lui dirait.
Lazare lorgna l’immonde Gontran. Il quittait la bibliothèque, où il c'était entretenu avec son Maître. Aussi silencieux qu’une ombre, il se faufila dans la pièce gorgée de savoir.
Cambrinus se tenait penché sur un livre ouvert, aux pages couvertes d’écritures occultes. Toujours à la recherche de la rédemption de son âme. Lazare se glissa derrière lui, et si le feu projeta sa silhouette sur le Duc, ce dernier ne put réagir. Le griffon l'empoigna par la nuque, pour cogner avec une violence inouïe son crâne sur le livre étudié.
L’instant suivant, il se dandinait à vingt centimètres au-dessus du sol, dans sa poigne d'acier, le visage dégoulinant de sang.
-Lazare ? gargouilla-t-il, ses yeux luisants de haine. Sale chien de garde, qu’est-ce que…
-Je suis ici en mon nom propre, gronda-t-il, en resserrant ses doigts pour l’empêcher de parler. Juste pour avoir une petite discussion, Cambrinus.
Il voulut s’opposer à cette familiarité de nom, mais il ne lui en laissa pas l’occasion.
-A partir de cet instant, tu vas nous héberger gratuitement, mes compagnons et moi. Tu ne chercheras plus à toucher Pernelle, ni même à faire le moindre acte de cruauté envers elle.
Relâchant Cambrinus, il fit un pas en arrière sans le quitter du regard. L’humain crachota, toussota, une main sur sa gorge meurtrie.
-Tu ne me menaces pas, chien de garde ?
-Est-ce réellement utile ?
La bouche tordue par la haine, le Duc lorgna Lazare, comme s’il voulait le dépecer sur place. C’était certainement le cas, d’ailleurs. La seule résistance qu’il rencontrait, depuis dix ans, résidait en Pernelle et lui. Une nuisance.
-Soit. Je ne toucherai plus ma femme. Mais j’exige une chose en échange.
-Ai-je l’air de marchander avec toi, Cambrinus ?
Le Duc grogna, sa fureur et sa cruauté palpable aux sens du griffon. Il partit néanmoins sans demander son reste, la main crispée sur sa gorge. Il allait devoir être vigilant, à présent. Ce sadique chercheras à le faire souffrir, d’une manière ou d’une autre.
Lazare voulut partir aussi discrètement que ce qu’il était arrivé. Mais il découvrit Saül, dans l’encadrement de la porte. A vrai dire, ce qui le stoppa, ce fut surtout son air goguenard.
-Quoi ?
-Tu vas être obligé de me raconter tout ce que tu sais, à présent.
Il haussa un sourcil.
-Et pourquoi donc, gamin ?
Saül sourit de toutes ces dents.
-Parce que sinon, je raconterai tout à La Pernelle.
Foutre dieu ! Ils avaient fini pas déteindre sur lui !
Quelques minutes plus tard, ils étaient installés dans la bibliothèque, la porte soigneusement fermée à clef. Tout négociation avait était inutile, aussi Lazare avait-il dû se résigner. Il allait devoir répondre à certaines des questions de ce maudit homme-serpent.
Saül, hilare, était confortablement lové sur le coussin, tels ses amis les serpents. Lazare poussa un profond soupir, un verre de cognac à la main. Il allait en avoir besoin pour affronter la conversation.
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Les Affres d'une Grenouille
ParanormalLorsque Saül croise le chemin de La Pernelle, une sorcière au caractère ravageur, il prie pour ne plus jamais la revoir. Mais le destin semble bien se moquer de ses désirs. Car, deux ans plus tard, il se retrouve pris dans ses plans machiavéliques...