Chapitre 6

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Le réveil avait été éprouvant. Peau d'âne n'avait pu profiter que d'un demi-sommeil agité. Au moment de s'endormir elle s'était persuadée que quelqu'un tenterait quelque chose pendant la nuit.

Elle ne s'était pas fourvoyée. Un peu avant l'aube, soudainement réveillée par le craquement d'une branche qui avait retenti tel un fracas pour son ouïe aiguisée, elle avait surpris Aurore, qui s'approchait sur la pointe des pieds. Elle avait lentement ouvert ses beaux yeux bruns et, avec un éclair d'ironie dans les prunelles, elle l'avait questionnée du regard, un sourcil haussé, lui montrant significativement qu'elle se doutait de ses intentions.

Le teint blanc de la brune avait rougi et, penaude, elle était repartie se coucher. Contrairement à elle, Tara n'était pas parvenue à se rendormir.

Une fois que le soleil matinal avait fini par éveiller tout le monde, Peau d'âne attendit patiemment que Sébastien échange son précieux bébé contre l'épée bâtarde de Thomas, afin qu'elle puisse commencer à lui donner ses cours.

Elle attendit une dizaine de minutes avant qu'il ne pointe le bout de son nez, et à son plus grand désarroi, il arborait un visage fermé et paraissait distant.

Elle eut un pincement au cœur, il lui sembla que le petit changement qu'elle avait perçu hier n'avait été que temporaire. Les images de ce qu'ils avaient été et de ce qu'ils étaient à présent devenus défilaient dans sa tête, et rendait sa gorge nouée.

Il fronça les sourcils.

• Ça va ?

Tara releva vers lui un regard triste pendant un court temps avant de se reprendre. Elle se racla la gorge.

• Euh...oui ! Oui, tout va bien, balbutia-t-elle.

Il lui sourit. Ce geste était aussi surprenant que sincère. Le cœur de Peau d'âne rata un battement. Elle se dit que son palpitant n'allait pas tenir longtemps si elle réagissait ainsi à chacune de ses expressions.

Ce qui était sûr, c'était que cette journée allait être longue. Très longue...

****

Sébastien souffla, en allant ramasser une énième fois son épée, qu'il ne cessait de faire tomber à terre. Il était atrocement nul, et cela l'exaspérait. Tara dut réprimer un sourire devant ses réactions enfantines. Il la surprit et haussa un sourcil intrigué.

• Te moques-tu de moi ?

• Quoi ?! répliqua-t-elle, d'une voix trop aiguë et mal assurée - Comment tu peux savoir ça ? pouffa-t-elle finalement, submergée.

Il agita la tête en souriant. Ses boucles brunes, un peu plus longues sur le dessus de sa tête se balancèrent au grès de ses mouvements et arrachèrent à Tara un soupire profond.

• Tes joues, dit-il en s'approchant, tu peux cacher tes sourires autant que tu le souhaites mais tes fossettes te trahissent.

Une bouffée de chaleur étouffante prit place dans sa poitrine. Tara savait que ses pommettes avaient pris une teinte rougeâtre et elle fut rassurée car Sébastien ne pouvait pas le deviner.

Il s'étirera et grimaça.

• Tu as encore mal ? demanda-t-elle, inquiète.

Sa question était stupide. Bien sûr qu'il souffrait. Sa blessure était encore fraîche. Mais c'était plus fort que sa raison, elle souhaitait juste savoir ce qu'il ressentait.

• Oui, un peu, répondit-il, ma peau me tiraille et mon bras est un peu engourdi - Il se tourna vers la voleuse - mais ça s'améliore, je le sens, s'empressa-t-il d'ajouter.

Elle sourit timidement, un peu plus soulagée.

• Bon ! On s'y remet ? lança-t-il

Elle l'observa un moment. Il essayait de le dissimuler, mais son bras tremblait et des traces de transpiration maculaient sa chemise.

• Non, dit-elle enfin, c'est fini pour aujourd'hui.

Il râla.

• Je t'ai dit que ça allait ! Nous n'avons presque pas avancé !

• On a avancé ! répliqua Tara

Il grogna.

• Écoute Sébastien, tu es blessé. Je sais que tu...

Elle se tu, juste à temps. Elle n'était pas sensée savoir quoi que ce soit sur lui.

• Je sais que ce n'est pas agréable de se sentir vulnérable, reprit-elle. Mais il faut que tu y ailles doucement.

Il releva ses yeux et plongea son regard océan dans le sien. Au bout de ce qui parut une éternité, au cours de laquelle Tara s'était perdue dans le bleu de ses iris, il abandonna.

• D'accord, céda-t-il. - Tara, rassurée ramassa ses affaires - Mais avant, tu m'accordes un duel, sourit-il en pointant son épée dans sa direction.

Elle leva les yeux au ciel, amusée.

• Non, répondit-elle, aussi autoritaire qu'elle le put.

Il laissa tomber son bras contre son corps.

• Allez ! Implora-t-il.

Elle rit franchement. Il se tut et la regarda intensément. Peau d'âne déglutit et détourna le regard.

• Demain. Pour l'instant tu as le niveau d'un bambin aveugle, plaisanta-t-elle.

Il sourit et accepta.

Ils repartirent au campement, mais elle savait. Elle savait qu'il commençait à comprendre. Elle se devait de faire plus attention, avant que le passé finisse par la rattraper définitivement. Sans possibilité, cette fois, de s'échapper.

Peau d'âne, il était une autre histoire : Tome 1, la princesse disparueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant