Chapitre 9

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Un an et demi plus tôt

La chasse était vraiment, pour Peau d'âne, la corvée la plus ingrate. Elle détestait prendre une vie humaine, alors la vie d'un être innocent et sans défense la répugnait encore plus.

Entêtée comme elle était, elle avait décidé que cela n'était pas une absolue nécessitée, alors sans qu'August ne le sache, elle allait acheter des dépouilles fraîches chez le trappeur du village le plus proche. Elle avait revêtu sa plus longue cape, dont le capuchon ne laissait entrevoir que ses lèvres et qui traînait sur le sol derrière elle.

Venir à l'aube était la solution la plus sûre. Les prises étaient tout juste fraîches, et la plupart des villageois étaient encore assoupit, au chaud dans leurs maisonnettes.

Elle se dirigea vers l'étal du trappeur, qui était, à l'aurore, encore en train d'installer ses proies, et réfléchissait à ce qu'elle allait acheter pour aujourd'hui. Elle hésita un instant entre du lièvre ou de la perdrix. L'oiseau était un peu plus cher mais elle avait plus de mal à dépecer l'autre petite bête poilue aux grand yeux brillant, et au petit museau adorable.

Elle acheta la perdrix pour le prix de quatre pièces d'argent, et attacha ses petites pattes au bout d'une corde tissée. Satisfaite, et toujours sur ses gardes, elle s'apprêta à repartir quand quelque chose attira son regard vif.

Elle aperçut un jeune garçon. Il avait à quelques mois près, le même âge qu'elle, mais cela était difficile à déduire pour la princesse tant il était sale et décharné.

Il tenta d'avancer discrètement, caché dans l'ombre du clocher, vers l'étale du boulanger pendant que celui-ci regardait ailleurs. Alors que sa main frêle se tendait pour attraper une miche de pain encore fumante, le boulanger se retourna.

L'expression de colère se peignant sur le visage du marchand n'avait d'égale que l'effroi sur le visage du jeune mendiant.

Au voleur ! hurla le marchant.

Aussitôt, le village, comme poussé par un héroïsme dont aucun ne faisait preuve à l'accoutumé, se retourna vers le jeune homme, et non pas un, mais trois hommes se dirigèrent vers lui.

S'il n'avait pas tout de même, poussée par le vent du désespoir et de la faim, attrapé le bout de pain, il aurait pu leur échapper. Mais ce n'est pas ce qu'il se produisit, et le jeune homme glissa dans la boue, tout en arrachant désespérément de ses dents un morceau de pain et, aisément, les trois marchants en colère se saisirent de lui avant de le traîner plus loin, dans la même ruelle sombre dans laquelle il venait de sortir.

Peau d'âne aurait voulu réagir, mais elle ne le fit pas. Elle avait appris à ses dépens qu'elle ne pouvait pas sauver tout le monde, et qu'avant tout, elle devait se protéger. Alors, nauséeuse, elle se retourna, lâchement, et repartis vers les autres étales du marché.

Elle ne s'arrêta acheter que quelques épices, lasse des plats fade qu'elle mangeait depuis plus d'une année.

Quelques branches de thym, de lauriers et d'oliviers en mains, elle repartit vers la forêt, afin de rentrer à une heure plausible auprès d'August.

****

Tara déambulait dans la forêt, cueillant quand elle le pouvait, quelques pommes, qu'elle rangeait aussitôt dans son sac de toile, puis repartait.

Elle entendit soudain un bruit étrange, qui n'appartenait, en aucun cas, au concert habituel de la forêt.

Des sanglots.

Peau d'âne, il était une autre histoire : Tome 1, la princesse disparueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant