Partie 16 : Vivant.

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Alix.

Ça fait plusieurs jours que je n'ai pas eu de nouvelles de Franck. Je ne suis pas vraiment inquiète, je sais qu'il effectue des patrouilles régulières. De plus, il m'affirme constamment que le pays est plutôt calme en ce moment. Aussi ne suis-je pas spécialement en état d'alerte quand j'allume la télévision pour préparer mon petit-déjeuner.

Une phrase perçue au milieu des infos me secoue, j'en laisse tomber ma cuillère dans le bol et saisis la télécommande pour augmenter le son. Le journaliste sur place présente le portrait d'un militaire décédé et évoque plusieurs blessés sans donner de nom. Le visage du chef de section de Franck s'affiche en gros plan sur mon écran. Mort au combat avec le grade de capitaine à titre posthume.

Oh mon Dieu, non !

Je comprends que le reporter s'exprime devant l'hôpital de Kaboul, en lisant le bandeau en bas de l'écran. Lorsque le reportage en différé reprend, une caméra s'arrête et zoome sur un groupe de soldats tentant d'échapper à la presse en rentrant à toute vitesse dans un des hôpitaux militaires internationaux. Je reconnais quelques gars de l'équipe des OMLT du régiment. Mon cœur manque un battement, je n'ai vu ni Franck ni Markus, enfin, l'adjudant-chef Faranti.

Pendant toute ma journée au régiment, je vais à la pêche aux informations. Personne n'est capable de dire exactement qui a été blessé. Ça fait partie des consignes. Seules les familles sont averties. Si un décès survient, la presse sera alertée, sinon, l'anonymat des soldats doit scrupuleusement être respecté.

Les jours suivants sont horribles. J'évolue dans le noir complet, je n'ai toujours aucune nouvelle, aucun mail ne m'attend dans ma boîte et mes messages restent sans réponse. C'est le black-out total. Je ne dors presque plus, me nourris à peine, et deviens fébrile dès que le téléphone sonne.
Quelle conne ! Pourquoi sonnerait-il ? Officiellement, tu n'es rien pour lui !

Enfin, après quatre jours d'angoisse, la nouvelle tombe au cours du rassemblement, par l'intermédiaire de notre capitaine. Franck a été blessé. Mais il est vivant. VI-VANT ! Il vient d'être rapatrié en France et a été directement transféré dans un centre médical des armées en région parisienne. Les heures d'angoisse s'estompent. Débute alors la valse des interrogations.
Dans quel état est-il ? Peut-il recevoir des visites ? Y a-t-il eu d'autres retours ? Qui puis-je contacter pour aller le voir ?
Cette dernière question ne reste pas longtemps sans réponse. À peine ai-je eu le temps de me glisser dans ma côte de travail qu'Emma appelle directement sur mon portable.

— Alix, le chef de corps veut te voir tout de suite.

— Mais je suis déjà en tenue pour bosser. Faut que je me change ?

— Oui, change-toi, et fais vite s'il te plaît. La famille de Franck vient d'arriver. Sa mère a demandé après toi.

— Hein ? OK, je me dépêche.

Un filet de sueur froide coule dans ma nuque. Celle-là, je ne m'y attendais pas. La rencontre avec les parents, c'est censé être un moment solennel qu'on a eu le temps de mariner pendant des jours. Celui pour lequel on s'entraîne à dégainer un sourire figé plus vite que son ombre. Particulièrement quand on nous demande combien d'enfant on prévoit d'avoir. L'épisode qui normalement fout la honte à son mec. Un truc sympa quoi.

M'enfin ! Notre relation n'a rien d'officiel ! Or l'armée a pour principe de n'associer que la famille proche aux événements de ce type. Aussi suis-je surprise d'être convoquée par le big boss. Moins de dix minutes plus tard, je monte les marches quatre à quatre et manque de buter contre une belle femme brune au type latin qui ne peut être que sa mère. Je lui présente de rapides excuses et me met au garde-à-vous pour saluer réglementairement le colonel, qui me présente sans plus de manière.

Cœur d'homme, âme de soldat 3 : Vivant !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant