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Ses yeux ambrés se relevèrent en entendant des pas de la rue sombre où il était. Il jura un instant, avant d'offrir un sourire mi-désolé mi-moqueur au jeune garçon coincé entre lui et le mur, avant de venir lui mordiller le lobe de l'oreille et de murmurer d'une voix suave.

    - Désolé, ça sera pour une prochaine fois. Je te recontacterai.

Il se dégagea alors des mains posées sur ses hanches avant de quitter cette ruelle à l'odeur désagréable, un air contrarié peint sur son visage et largement visible à ses sourcils blonds froncés sur son front. Il détestait ça, il détestait ce qu'il faisait, il détestait sa terrible manie qui le poussait à la destruction, il détestait cette ville qui puait le faux et le plastique, il détestait ce pays, il détestait sa vie et tout ce qui la composait. Rien n'y faisait, ce qu'il détestait le plus, par dessus tout, était bel et bien ce qu'il était.

Coinçant une cigarette entre ses lèvres, il jura en sentant la sueur couler le long de son dos sous son tee-shirt blanc et alluma le bâtonnet en râlant contre son briquet capricieux. "Putain de feu de merde" souffla-t-il en le secouant dans l'espoir vain qu'il ne fonctionne. Rien n'y faisait et il jeta le zippo dans la rue dans un geste rageur alors qu'il sentait ses mains trembler sous la tension. Il était si faible face à cette merde que ça l'énervait encore plus. En désespoir de cause, il héla un homme au coin de la rue d'en face et réussi enfin à allumer sa cigarette, un grognement en guise de remerciement pour le prêt. Déjà que sa journée avait relativement mal commencé, l'idée qu'il ne doive acheter un nouveau briquet ne fit que rajouter un poids à celui qui déjà le tirait vers le bas depuis le matin. Ce n'était pas comme s'il roulait sur l'or, après tout.

Une quinte de toux plus tard, il se remit en route, coinçant sa main calleuse dans ses cheveux pour les décoller de son front en sueur. Littéralement tout l'énervait aujourd'hui, et cette ritournelle qui ne semblait vouloir prendre fin et continuait à le piéger lui faisait petit à petit perdre pied. Il se sentait perdre la tête au fil des jours et n'arrivait pas à sortir de ce cercle vicieux. Après réflexion, il se demandait s'il en avait vraiment envie, ce n'était pas comme si les opportunités de changer de vie s'étaient faites rares ou comme si c'était une chose impossible à faire. Il manquait juste de détermination, il manquait d'envie, il manquait d'à peu près tout sauf de tristesse et de désespoir. Il pouvait même ouvrir une banque de malheur à ce niveau là. Son karma était à chier, son humeur était au plus bas et sa vie faisait peur aux vieilles dames du quartier, Jimin avait l'impression qu'il avait eu le combo gagnant de celui qui avait raté sa vie. Ce n'était sans doute pas qu'une impression.

Il rentra chez lui d'un tour de clef, surpris que son colocataire ait fermé la porte alors que celui-ci ne se souciait en général pas de ce genre de chose, puis débarqua dans le salon, les yeux fixés sur son téléphone avant de relever la tête sous le silence étrange qui régnait dans l'appartement. Ses yeux ambrés s'ouvrirent grandement en voyant son colocataire assis sur le canapé, une jeune femme visiblement entièrement nue assise sur lui alors que l'image qui lui était offerte ne laissait que peu de place à l'imagination. Ils ne faisaient certainement pas une séance de yoga, ne pu s'empêcher de penser Jimin en sentant sa colère monter sourdement. Il allait craquer, il le sentait et ça n'allait pas être la chose la plus amusante.

    - Putain merde mon canap', t'es sérieux là ? cria-t-il dans la pièce en faisant sursauter les deux amants. Toi casses-toi, gronda-t-il alors qu'il manqua de pousser la jeune femme plantureuse hors de son appartement, entièrement nue.

Il se retint et la vit se rhabiller rapidement avant de se faufiler dehors. Son regard se reporta sur son colocataire, l'air visiblement un peu trop ailleurs pour qu'il ne soit dans son état normal. Ses yeux passèrent du corps masculin nu à l'état lamentable de son appartement. La lumière était tamisée alors que des cadavres de bouteilles traînaient sur la table basse, des cendriers et beaucoup trop de mégots. La poussière traînait au sol, le canapé était éventré et recrachait son rembourrage dans une image triste, alors qu'une odeur de tabac froid emplissait les narines. Rien n'allait dans sa putain de vie, rien n'allait et ça avait toujours été le cas, alors pourquoi avait-il vainement espéré qu'il rentrerait dans une pièce lumineuse et bien rangée ?

ROSE COTONNEUX T.2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant