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Sans même qu'il ne s'en rende compte, ses mains s'étaient accrochées avec force aux pans du manteau long de l'autre, son souffle s'était fait plus court et irrégulier. Sans même qu'il ne s'en rende compte, il avait fermé ses yeux douloureusement en retenant les larmes de couler, il avait senti son coeur accélérer drastiquement à tel point qu'il en était essoufflé. Le poids de la tête du brun reposait sur son épaule, se ressentait dans tout son corps, l'appuyait contre le sol s'apparentait à un ancrage solide au concret, au réel. Un ancrage qui lui demandait de regarder les choses en face, de les accepter et de les contrer, mais à deux. A deux, ça semblait si illusoire, si impossible. Il ne savait même pas réellement ce que cela signifiait en réalité, qu'est-ce "à deux" ? En quoi cela consistait-il ? Jimin n'avait pas l'habitude de lier ainsi son destin à celui des gens, il n'avait pas l'habitude de se rattacher aussi solidement aux autres et pourtant, ici, il avait l'impression que c'était son propre destin qui avait choisi de lui-même de se reposer sur cette tête pensante brune et encore jeune.

Il ne comprenait que si peu de chose et n'arrivait pas réellement à comprendre ce que voulaient dire ces paroles, ce qu'elles entendaient et quelles en seraient toutes les conséquences. S'aider ?  Et comment ? Jimin n'était même pas en mesure de prendre soin de lui, comment pouvait-il ne serait-ce qu'espérer prendre soin des autres ? C'était risible, et pourtant, aussi étrange que cela paraissait, les paroles de cet écrivain singulier semblaient si confiantes, si sûres d'elles qu'il avait presque envie d'y croire. Il se demandait bien ce qui pouvait passer par la tête de Jungkook pour oser penser de cette façon, il se demandait ce qu'il avait été en mesure de voir à travers le blond pour lui accorder ainsi sa confiance. Le plus âgé ne comprenait même pas comment ils étaient passé d'une relation de haine pure et dure à une relation de dépendance.

Il n'y avait pas eu de déclic, il n'y avait pas eu de prise de conscience. Le blond pensait peut-être que ça c'était installé lentement durant dix ans, tout du moins pour lui. La culpabilité qui l'avait rongé et continuait de lui pourrir la vie tous les jours, la culpabilité d'être un tel monstre, la culpabilité de n'avoir su faire autre chose que de détruire ce grand brun, la culpabilité de toujours se réfugier dans la violence pour alléger sa propre peine, la culpabilité d'être lui. D'être cet homme destructeur, cet envoyé des enfers, celui qui détruisait tout ce qui passait sous son regard sensuel et chaud. Cette culpabilité l'avait amené à penser quotidiennement au brun, il s'était une place bien ancrée dans ses pensées et ne les avait quitté que très rarement sans même qu'il ne s'en rendre compte. Et aujourd'hui il se surprenait à ressentir cette horrible pression dans son estomac lorsqu'il voyait le parasite de ses pensées en compagnie d'un autre, il se surprenait à ne pas comprendre pourquoi ce dernier était si différent quand il était avec lui, pourquoi ces rides d'inquiétudes naissaient sur son front, dessinaient la ride du lion et pourquoi parfois il désirait entendre son rire un peu plus longtemps.

Il prit une grande respiration tremblante en se mordant la lèvre inférieure en sentant ce souffle chaud s'écraser dans le creux de son cou. C'était doux, enivrant et faisait se dresser ses poils le long de ses bras. Il laissa sa tête tomber en arrière contre le mur sale dans son dos alors qu'il se concentrait sur son souffle pour ne pas s'étouffer. Jungkook semblait s'être soudainement calmé dans ses bras et cette simple idée faisait se torde son estomac. Lui se retrouvait assaillis par tout un tas d'odeur de fleur et de sucre qui venait atténuer ses sens. C'était doux et semblait adoucir ses moeurs.

Soufflant longuement pour calmer le rythme chamboulé de son coeur, il fit de son mieux pour élever sa voix craquelée.

- Comment ? souffla-t-il alors que lentement ses mains remontaient dans les longues mèches brunes.

- Je sais pas. Juste t'avoir là, près de moi. Sentir ton odeur. Entendre les battements de ton coeur. Comme avant.

Encore un raté, le coeur de Jimin avait du mal à garder un rythme logique et il se sentait beaucoup trop épuisé. Il avait envie de s'asseoir, de s'allonger et de dormir des années durant. En même temps, il avait envie de sentir ces bras sécurisants autour de lui, ces grandes mains sur ses hanches fines, aussi innocentes que douces. Il avait envie de sentir cette odeur de fleur l'entourer et le protéger, comme une aura qui repousserait toutes ses inquiétudes. Il avait envie d'arrêter de s'inquiéter et de se reposer sur quelqu'un. Pour la première fois en presque trente ans, Jimin avait envie de lâcher prise.

ROSE COTONNEUX T.2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant