Chapitre 3

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« Mais Toru, on n'a pas besoin de porte blindée pour remplacer la porte d'entrée ! Et il faut qu'on se débarrasse de nos armes, Toru ! Et puis est-ce que je t'ai déjà dit à quelle point j'étais idiote, Toru ?! »


Mes mâchoires se crispèrent et je relevai les yeux vers l'abruti qui me servait de compagnon. Ce dernier venait de m'imiter d'une voix aigüe, tout en nettoyant pour la quatrième fois son Beretta favori. Il regarda pour la énième fois dans le canon en fermant un œil, puis ses yeux se posèrent sur moi, pour m'offrir un sourire mi-goguenard, mi-agacé.


« - Si tu veux tant que ça mourir, il fallait me prévenir avant, Crow. Je me serais arrangé avec les pompes funèbres. Tant qu'on y est, tu veux quoi comme épitaphe sur ta tombe ? Lâcha-t-il en visant un point au-dessus de la télévision, vérifiant ainsi la précision de son arme.

- Mais tu vas finir par la fermer, oui ?! » M'exclamai-je en le foudroyant du regard.


Ça faisait deux heures qu'il me serinait ainsi, et j'allais lui faire avaler son flingue s'il continuait. Il me jeta un regard en coin et plissa les yeux. Mais mon attention s'était déjà reportée sur la carte de visite que je tenais à la main et qui était la cause de notre prise de tête. Je l'avais trouvée dans la boîte aux lettres ce matin et je ne pouvais pas détacher mon regard des deux oiseaux noirs se faisant face, ailes grandes ouvertes sur un fond rouge sang. Il s'agissait de la déclaration de mort du clan Hanagami, mais ce n'était pas ça qui m'inquiétait le plus. Je m'y attendais, et ça m'étonnait même qu'ils aient attendu une semaine entière pour nous l'envoyer. Retournant de nouveau la carte, je lus pour la dixième fois les quelques mots écrits à l'encre noire, sentant une chape de plomb me tomber une fois de plus dans l'estomac.


« L'oyabun Hanagami Hiroki vous somme de vous rendre au quartier général du clan, demain à 22 heures. Ceci n'est pas négociable. »


Deux choses me faisaient tiquer. Déjà, le fait que je sois conviée à me rendre au quartier général. En temps normal, ils auraient débarqué chez nous et nous auraient liquidés tous les deux. Ils savaient où on habitait, comme le témoignait la carte posée dans notre boîte aux lettres (expliquant par là même la fureur du blondinet...). Mais, étant un ancien membre de la famille, je pouvais comprendre qu'ils préfèrent régler cette affaire au sein du clan même. Cependant, et c'est ce qui me faisait actuellement déglutir d'appréhension, le nom du « chef de famille » actuel ne me disait rien. Hanagami Hiroki... Bordel, mais c'était qui celui-là encore ? N'ayant pas d'autres enfants à part moi et n'ayant pas d'autres membres de sa famille biologique dans le clan, le nom de mon père aurait du s'éteindre avec lui. Or, ce gars l'utilisait. La première option était que c'était un homme de confiance de mon père qui avait repris son nom, ce qui dénotait un manque de respect total. Peu probable donc, dans l'univers extrêmement protocolaire des yakuzas. La deuxième option (et je serrai violemment les poings en y pensant) était qu'un membre de la famille apparu de nulle part avait repris le business. Et dans ce cas là, ça n'arrangeait pas mes affaires. Mais alors pas du tout... Si jamais il se mettait à penser que je venais reprendre la couronne, il voudrait m'éliminer. Et là, on serait sacrément dans la merde...


« Ça ne fait même pas un mois qu'on est là et on est déjà repérés par la pègre locale. Je ne te félicite pas, Crow. » Continua Toru sur sa lancée en remettant le chargeur de son flingue.


Cela eut le mérite de rompre le fil noir de mes pensées et, arrêtant finalement de faire les cent pas dans le salon, je vins m'assoir sur la table basse, face à lui. Il reposa son Beretta à côté de moi, frôlant ma cuisse au passage, puis il attrapa son nouveau jouet. Un Uzi flambant neuf. Il l'admira quelques instants en le faisant tourner dans ses mains, puis il attrapa un autre chargeur rempli de munitions et le plaça dans la culasse. Il se préparait visiblement à en découdre.

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