Chapitre 5

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L'homme, que je reconnus comme étant l'ancien « numéro deux » de mon père, m'ouvrit la porte. J'entrai dans la cour de la maison, où m'attendait le clan au complet, réparti de part et d'autre de l'allée centrale. Je marquai un temps d'arrêt, m'attendant à tout sauf à ça. L'ancien second de mon père arriva près de moi et s'inclina. Les autres l'imitèrent immédiatement, lâchant en chœur un :


« Okaerinasai (Bon retour), Elena-sama. »


Whoah. Mon regard papillonna de droite à gauche, perplexe. J'avoue que là, j'étais sur le cul. Déjà, que tout le clan se réunisse pour m'accueillir dans la cour, c'était exceptionnel. Alors qu'en plus ils utilisent le suffixe « -sama », ça tenait de la démence. On ne réservait ce suffixe qu'aux personnes haut-placées. Ce qui n'était évidemment pas mon cas. Je n'avais pas imaginé ça. Mais alors pas du tout. Qu'on me ligote dès mon arrivée et qu'on me traîne devant l'oyabun comme une moins que rien m'avait semblé être des options plus plausibles. Mais là, ça dépassait toutes mes attentes. Reprenant une certaine contenance, je m'inclinai également et répondis :


« Tadaima (Je suis de retour) ».


Ils se relevèrent et je reconnus quelques visages. Certains me sourirent, tandis que d'autres semblaient n'attendre qu'un signe pour faire disparaître mon corps dans le port. Déglutissant, j'essayai tant bien que mal de comprendre ce qui était en train de se passer. La situation était juste irréelle. Jamais les membres du clan ne m'avaient témoigné autant de respect. A quoi ça rimait, tout ça ?... Mes pensées furent interrompues par mon guide, qui m'annonça :


« Hiroki-sama vous attend dans son bureau. »


Il passa devant moi et je le suivis à travers la cour au sol blanc comme neige, sentant les regards des autres yakuzas sur moi. Arrivée au niveau de l'entrée, je montai les quelques marches et enlevai mes chaussures (tradition oblige...). Je continuai de suivre mon guide à travers le salon, où rien n'avait bougé depuis mon départ, et j'arrivai bientôt devant une porte coulissante en bois sombre. Il l'ouvrit et je pénétrai dans le bureau après l'avoir remercié d'un mouvement de tête. Et là, je me stoppai net.

J'étais en train de rêver, c'était pas possible. L'oyabun releva la tête à mon entrée, et ma bouche s'ouvrit d'elle-même. Je me trouvais face à la copie conforme de mon père, avec trente ans de moins. C'était exactement les mêmes yeux couleur d'encre, les mêmes cheveux raides plaqués en arrière couleur ébène et les mêmes traits asiatiques. La seule petite différence que je notais était que ses cheveux étaient rasés sur les côtés. Mais le plus troublant était qu'il avait également le même regard froid, le même visage dur et la même attitude supérieure. Seul le dégoût de mon père envers moi avait été remplacé par la défiance dans les yeux de cet inconnu. Sinon, c'était son clone parfait.

Refermant finalement la bouche, je m'inclinai, les traditions reprenant vite le dessus. Pendant une bonne minute, il ne parla pas, et je n'osai pas me relever, de peur que cela passe pour de l'irrespect. Les yakuzas étaient un peu tatillons à ce sujet, et je n'avais pas envie de froisser le nouvel oyabun dès les premières minutes. Il finit par prendre la parole et je faillis défaillir en entendant le même ton méprisant qu'employait mon père quand il s'adressait à moi.


« Je vois que tu n'as pas perdu l'étiquette. Peut-être que tu aurais dû y penser également avant de fracasser mes gars. »

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