Chapitre II

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Posé dans son canapé, Guillaume Tranchant se servit un verre de vin blanc après avoir allumé la télé. Tout en portant l'objet à ses lèvres, il repensa à cette première journée de cours dans cette nouvelle ville. Ca s'était plutôt bien passé se dit-il intérieurement. Les étudiants avaient l'air intéressés et il avait particulièrement aimé l'ambiance de son cours de Creative writing avec ses L3. Ils participaient, posaient des questions pertinentes, le rêve.

Deux verres de Pouilly fumé plus tard, Guillaume sortit de sa sacoche un paquet de feuilles qu'il posa sur la table basse. Il avait lancé de la musique en fond sonore et profitait de l'ambiance tamisée de son appartement pour se détendre. Il saisit quelques feuilles et se mit à les lire afin d'en apprendre plus sur ses étudiants.

Il lisait les prénoms inscrits sur les feuilles, beaucoup de filles et peu de garçons. Edith, Sabrina, Léa, Julien, Claude, Mathilde, Aurélie. Aurélie.

Commentaire : J'ai très envie de vous.

Le brun cru halluciner. Il cligna plusieurs fois des yeux et posa le verre sur la table basse avant de se redresser pour se concentrer davantage. Du bout de l'index il remit ses lunettes en place et relu plusieurs fois la phrase.

J'ai très envie de vous. J'ai très envie de vous. J'ai très envie de vous. J'ai très envie de vous.

Guillaume était décontenancé devant tant d'audace. Si de prime abord il se trouva surpris, la proposition vint rapidement flatter son ego trop souvent oublié depuis ces derniers mois. Qui était donc cette Aurélie Cotentin qui semblait être sous le charme de la figure d'autorité qu'il représentait ? Guillaume essaya de se remémorer les visages féminins de sa classe, se demandant si peut être il n'était pas passé à côté d'un sourire appuyé ou d'un regard trop insistant.
Mais rien ne lui venait, c'était certainement de la provocation. Qu'une étudiante craque pour lui s'était déjà produit par le passé, mais il n'était pas le genre d'homme à profiter de la situation. Il aimait les femmes de son âge, à savoir une petite trentaine, et n'était certainement pas attiré par une relation sans lendemain et encore moins avec une de ses étudiantes.

Il passa la soirée devant un film qu'il regardait d'un œil distrait, ne pouvant s'empêcher de penser à ce qu'il allait faire le jour suivant lorsqu'il découvrira qui se cache derrière cette mystérieuse jeune femme visiblement très sensible à ses charmes.

* * *

Guillaume devait dispenser son cours de phonologie avec la promo de L3 et entra dans la salle de classe avec une certaine appréhension. Le cœur serré, il n'osa pas regarder en direction de ses étudiants qui étaient déjà tous installés. Il pouvait sentir les yeux d'Aurélie posés sur lui et il ne sut pas si ce sentiment lui plaisait ou non. Guillaume se sentait seul depuis le départ de son ex compagne et ça allait faire maintenant deux ans qu'il n'avait pas partagé d'intimité avec quelqu'un alors l'audace de cette mystérieuse demoiselle lui fit reconsidérer les choses.

Assis à son bureau, Guillaume observait la quinzaine de jeunes gens qui travaillaient sur un exercice d'accentuation.

- Monsieur Tranchant ?
- Oui ?
- Vous pouvez venir voir, s'il vous plaît ?

Guillaume sourit au jeune homme qui l'avait sollicité et se leva de son bureau et pressa le pas jusqu'à lui.

- Je peux vous aider ?
- Oui, alors j'ai pas vraiment compris cet adjectif-là, dit-il en posant un doigt délicat sur sa feuille, je l'accentuerais bien, mais Claude pense que non.

Guillaume s'était assis sur la chaise libre à côté de lui afin de voir plus précisément de quoi il parlait. Il prit la feuille, la regarda en fronçant les sourcils et caressa sa barbe en réfléchissant. Alors qu'il s'apprêtait à lui expliquer que oui, il fallait bien accentuer l'adjectif en question, ses yeux se figèrent sur deux petits mots écrits en haut de la feuille.

Aurélien Cotentin.

Ah. Guillaume déglutit difficilement lorsqu'il comprit qu'il avait mal lu le prénom de sa mystérieuse admiratrice. Il sentit son cœur battre à cent à l'heure et une sensation désagréable vint se loger au creux de sa gorge.

- Monsieur ?
- Oui, oui pardon... Oui, et voilà le schéma c'est 2010.
- Merci...

Aurélien lui sourit et Guillaume, sans le vouloir, sentit le rose monter à ses joues. Il voulait faire comme s'il n'avait pas lu, comme s'il ne savait pas que le jeune homme qui se tenait si près de lui qu'il pouvait sentir son parfum lui avait fait des avances plus qu'osées, comme s'il n'était pas troublé par une telle audace. Aurélien s'était replongé dans sa feuille et se mordait la lèvre inférieure, signe qu'il était très concentré. Guillaume détailla son visage : des cheveux noirs qui s'arrêtaient en dessous de sa mâchoire agrémentés d'une mèche plus clair qu'il logeait derrière son oreille, des yeux noisettes légèrement en amande, de long cils noirs qui lui donnaient des yeux de biche et une bouche finement dessinée que Guillaume ne semblait pas vouloir cesser de dévorer du regard.

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