Aurélien n'avait plus parlé à Guillaume depuis qu'il avait reçu son dernier mail.
Oubliez moi.
Oubliez moi. Oubliez moi. Oubliez moi. Oubliez moi. Oubliez moi. Oubliez moi. Oubliez moi.
Ces deux putains de mots résonnaient dans son crâne depuis une semaine et quoi qu'il pouvait faire, rien ne suffisait à calmer la peine qu'il ressentait. Oui, il pouvait être une vraie drama queen. Oui, il pouvait être collant et insistant. Oui, il avait certainement effrayé Guillaume. Oui, il aurait peut-être dû ne pas l'embrasser. Oui, il avait sans doute été trop loin.
Mais il avait toujours été sincère. Et petit à petit, à force de sourires, de discussions et d'œillades timides, lui et son cœur d'artichaut étaient tombés amoureux de lui. Et ça faisait mal, même très mal.
- Comment tu veux que je t'oublie, connard, t'es mon prof, je te vois cinq heures par semaine... murmura Aurélien en allumant une cigarette.
Aurélien faisait les cent pas sur le pont du bateau qui le menait lui et les autres étudiants en Angleterre. Il faisait nuit et sans surprise, il ne dormait pas. Claude lui avait taxé des capotes une demie heure plus tôt alors il était certainement encore occupé. Aurélien se retrouvait donc seul face à l'immensité de la mer, observant, impuissant, la côte française disparaître peu à peu dans l'obscurité.
Las de tant de marche inutile, le jeune homme décida de terminer sa cigarette accoudé à la rambarde. Le speaker annonçait via les hauts parleurs la marche à suivre si jamais les sept coups de sirènes retentissaient, et ce, en plusieurs langues. Aurélien s'imagina immédiatement que le ferry heurtait un ice berg et qu'il se retrouvait en plein milieu de l'océan, sur une planche flottante en train de pleurer un Guillaume sombrant peu à peu dans les abysses marines.
Perdu dans l'élaboration de son remake de Titanic qu'il aurait appelé sobrement Titanic ta mère, Aurélien sentit quelque chose se poser sur son dos. Surpris, il se retourna et comprit que Guillaume venait de l'envelopper de son manteau.
- J'avais peur que vous ayez froid, en tee-shirt, une nuit de décembre...
Un petit sourire timide s'affichait sur les lèvres de Guillaume. Le vent entremêlait ses cheveux qui cachait ses yeux, mais Aurélien y décelait tout de même quelque chose de différent ce soir-là, comme une lueur particulière.
Mais il n'eut pas le temps d'y penser plus longtemps que déjà Guillaume prenait son visage entre ses paumes et posait ses lèvres sur les siennes, lui offrant un baiser urgent, passionné, brouillon, mais tellement amoureux. Aurélien se demanda le temps d'un instant ce qui était en train de se passer, priant tous les dieux du ciel pour que ça ne soit pas un rêve, mais non, c'était bien réel. Le plus jeune ferma les yeux, laissant avec plaisir l'autre homme mener la danse tandis que ses mains remontaient le long de son dos pour finir par se perdre dans ses mèches sombres. Aurélien entrouvrit ses lèvres, invitant la langue de Guillaume à rencontrer sa jumelle dans une valse éthérée.
Le plus beau baiser de toute sa vie.
Ils restèrent là, à s'embrasser sur le pont désert du bateau pendant de longues minutes. Le temps s'était arrêté pour eux, leur monde figé, rien n'existait autour. Ils n'étaient plus Aurélien et Guillaume, ils étaient deux êtres qui s'étaient simplement enfin trouvés. Lorsque l'un d'eux, peu importait lequel, osa stopper ce délicieux baiser, l'autre le regarda avec un petit sourire timide, les lèvres rougies. Guillaume prit son étudiant dans ses bras, le laissant se blottir tout contre lui. Il faisait très froid dehors, mais ils s'en moquaient, enveloppés confortablement dans la chaleur de leur amour naissant.
Aurélien avait reposé sa tête contre le torse de Guillaume, écoutant avec un petit sourire les battements régulier de son cœur. Le plus vieux avait glissé sa main dans les cheveux bruns du plus jeune, les caressant avec douceur. Si ce dernier était heureux comme il ne l'avait jamais été, l'autre homme n'osait pas réfléchir à ce qu'il venait de faire pour le moment. Ce baiser aurait des conséquences, c'était certain, mais ce soir, pendant les dix minutes qui suivirent ce moment empli de tendresse, il n'appartenait qu'à Orel et ses bras qui le serraient fort, comme pour ne jamais le laisser partir.
- Je te l'avais dit...
Aurélien osa briser le silence et se mit sur la pointe des pieds afin de déposer un autre baiser, plus doux cette fois, plus tendre sur les lèvres de Guillaume.
- Pardon ?
- Je te l'avais dit, que le prochain baiser viendrait de toi...
Alors que Guillaume s'apprêtait à répondre quelque chose, une voix familière lui fit tendre l'oreille.
- Gringe ?
Lorsque les deux garçons entendirent au loin que Matthieu arrivait, ils se séparèrent aussitôt, quittant avec regrets la petite bulle de coton dans laquelle ils s'étaient réfugiés.
- Ah, t'es là... Je te cherchais... T'as encore le mal de mer ?
- Ou... ouais... C'est ça.
- Et vous Aurélien ?
- J'arrivais pas à dormir, sourit-il.
- Qu'est-ce que tu voulais ?
La voix de Guillaume était légèrement cassée, il était vraiment gêné par la situation. Il se demandait si Matthieu les avait aperçus au loin, dans les bras l'un de l'autre ou pire, en train de s'embrasser. De son côté, Orel souriait bêtement, comme si plus rien n'importait autour de lui. Il en avait même oublié qu'il portait le manteau, posé négligemment sur ses épaules. Le blond le remarqua, mais préféra ne rien dire devant Aurélien.
- Ah oui, t'avais oublié ton téléphone et j'ai vu que ta mère avait essayé de t'appeler. Ca devait être au sujet de Matthias.
- Ah ? Fais voir ?
Matthieu lui tendit son téléphone qu'il s'empressa de déverrouiller. Effectivement, sa maman avait essayé de l'appeler alors qu'il était en train glisser sa langue dans la bouche de son étudiant. Il sentit une vague de culpabilité l'envahir et s'empressa de quitter les deux hommes pour passer son appel.
- Maman ? Tout va bien ? ... oui. Il a fait un cauchemar ? ... ... Il s'est rendormi ? ... non, t'as eu raison de m'appeler... oui, passe le moi, merci. bisous maman... ... non ça va, j'ai pas trop le mal de mer... oui j'ai mangé ce soir... maman j'ai trente ans, c'est bon... passe le moi, s'il te plaît... merci, je t'embrasse... ... mon chéri ? Ca va ? ... mamie m'a dit que tu avais eu peur cette nuit ? ... vraiment ? ... ... je reviens dans pas longtemps... ... dans six dodos, c'est ça... demain ça ne fera plus que cinq... ... oui, mon chéri... ... d'accord... ... tu me repasses mamie ? ... je t'aime ... maman ? Merci de m'avoir appelé... ... oui... je t'envoie un message quand on arrive... je t'embrasse...
Lorsque Guillaume raccrocha, remettant son téléphone dans sa poche, il vit son ami marcher dans sa direction.
- Tout va bien ?- Oui, oui, il a fait un cauchemar, c'est tout... Je vais aller dormir un peu, je suis claqué.
- Attends... Y a un truc dont je voudrais te parler.
- Oui ?
Matthieu avait l'air visiblement mal à l'aise à l'idée d'entamer cette discussion.- Bah... c'était ton manteau qu'Aurélien portait, non ?
- C'est exact. Il était en tee-shirt en pleine nuit et en décembre cet imbécile, il allait attraper froid.
- Je crois qu'il à vraiment un crush pour toi depuis des semaines, je sais pas si c'est une bonne idée de faire ça, il va se faire des films...
- Un crush sur moi ? Mais pas du tout...- Je l'entendais souvent parler d'un Guillaume avec son pote Claude, je pensais qu'il avait trouvé un petit-ami, vu la façon dont il en parlait. Mais après j'ai vu comment il te regardait quand il passait près de toi, et je suis désolé mon pote mais il te matte constamment le cul, et vraiment pas discrètement. T'es sympa avec lui, et ce que t'as fait pour pas qu'il se fasse virer c'est vraiment cool, surtout que le doyen à encore fait son connard, il est complètement homophobe en plus. Mais du coup, j'ai peur qu'il se fasse des idées et qu'il croit que t'es amoureux de lui ou je sais pas. Je préférais t'en parler parce que c'est un jeune homme vraiment sympa et ça serait dommage qu'il se fasse des films et qu'il tombe vraiment amoureux. Surtout qu'il à l'air bien accro depuis des semaines.
- Ecoute, merci de m'en avoir parlé... je vais prendre mes distances avec lui, dans ce cas. Je n'avais vraiment pas remarqué qu'il était intéressé par moi...
Guillaume esquissa un petit sourire timide, s'efforçant de feindre la surprise en apprenant qu'Aurélien Cotentin était très certainement amoureux de lui.
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FanficAurélien est étudiant en dernière année de licence à la fac. Histoire en réécriture ❤️