15. Héros

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Pour la première fois de ma vie, j'ai peur et je ne comprends pas pourquoi.

Ce genre de sensation, d'impression qui vous prend aux tripes et qui ne vous lâche pas. C'est pire qu'avoir juste un "mauvais pressentiment", il y a quelque chose de plus, quelque chose qui me fait trembler. Douter.

- Gabriel, ça va ? Tu deviens tout pâle brusquement ?

Cléo s'avance vers moi et pose sa main sur la mienne, mais je ne peux que rester bloqué sur ce ressenti. Pourquoi ? Pourquoi ai-je peur comme ça ? C'est horrible, j'ai l'impression que mon corps lui-même vient de perdre dix degrés. Je tremble. J'ai froid.

- Gabriel, vas-y.

Michael a le regard perdu dehors, l'air presque grave tandis qu'il ne se retourne même pas vers moi, mais sa seule phrase me laisse à penser...non. Je ne veux pas penser à ça. Je ne veux même pas l'imaginer. C'est juste mon côté un peu psychotique et possessif qui me joue des tours parce que Basile n'est pas dans mon champ de vision, c'est tout. Ce n'est que ça.

- Je reviens ! Attendez-moi là.

- Tu ne veux pas de l'aide ? me demande Cléo

- Non ! Ça va aller ! J'ai juste...Je reviens, c'est tout. Je vais juste chercher Basile.

Où est-ce qu'il a bien pu aller à un moment pareil ? Ce n'est pas comme s'il était familier avec l'hôpital et ses alentours. Je me rappelle de cette fois où il m'a avoué ne pas être à l'aise quand il est tout seul dans un environnement qu'il n'a pas tout à fait appréhendé. Pourtant, Basile est un grand garçon, je veux dire, malgré son handicap, il arrive toujours à s'en sortir et il a toujours réussi à le faire jusqu'à présent alors pourquoi ça serait différent maintenant ? Ça doit être ça, c'est juste un pressentiment qui m'induit en erreur. Je dois forcément exagéré pour trois fois rien.

Foutue jambe de merde putain ! Je ne peux pas courir, même pas trottiner à travers les couloirs.

J'aperçois alors une infirmière avec un fauteuil vide arrivant dans ma direction.

- Je vous emprunte ça ! Je vous le ramènerais promis

J'irais plus vite en roulant.

Rien que le fait de traverser l'hôpital en long me tue les bras et j'avais presque oublié la sensation d'être en fauteuil. Maintenant je m'en souviens. Je me souviens avoir enduré des heures et des heures de kiné et de rééducation pour essayer de marcher à nouveau. Je l'avais fait pour Basile. Non, non. Je l'avais fait pour moi. Par égo sans aucun doute. Je ne voulais pas être considéré comme diminué.

Comme handicapé.

C'est fou, non ? De prendre conscience de ça maintenant, au pire moment alors que la situation que j'ai absolument cherché à fuir semble être soudainement la solution à mon problème. Je trouve ça horrible d'avoir un rappel pareil. J'ai l'impression que c'est l'univers ou une sorte de main visible qui se fout de ma gueule et qui me rappelle qu'au final, rien n'a changé.

Pour moi, c'est juste un brusque retour en arrière.

- Excusez-moi ? Vous n'auriez pas vu un jeune homme, la vingtaine, brun, portant un sweat blanc.

- Un jeune homme est venu me demander une direction tout à l'heure, il correspond à peu près à votre description, mais je crois l'avoir vu sortir de l'hôpital il y a déjà une bonne dizaine de minutes !

- Dans quelle direction ? S'il vous plaît c'est important !

- Dans la rue, plus bas il y a une petite boutique, un joaillier, il m'a demandé de lui indiquer le chemin

Voyage au centre de ton cœur (BxB) - Tome 2 (PAUSE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant