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"Le soleil de la ville l'a quitté.
Les lettres de sang sont apparues.
Mon esprit est corrompu.
La fille veut jouer.
La manipulation est devenue le jeu favori des royaumes.
Tous les pions ont été mangés.
Le jour disparaît."

Nous sommes partis le lendemain au lever du soleil. Les chevaux étaient reposés et nous aussi. La ville soleil était très belle, elle se détachait mieux sous le soleil. C'était peut-être de là que venait son nom. Nous avons descendu les collines pour se retrouver dans des plaines dont l'herbe était plus haute et plus bleue. On ne pouvait plus voir les sabots des chevaux. Au loin, on pouvait apercevoir une forêt d'arbres rouges comme le sang.
"C'est la forêt d'Ishal", dit le premier homme. "Nous y feront escale cette nuit."

Il faisait déjà nuit quand nous sommes arrivés dans la forêt d'Ishal. Les deux hommes sont partis chercher du bois pour faire du feu et chasser. Hylios s'est installé au pied d'un arbre. Je suis restée debout, ne sachant pas où m'installer. Je n'avais pas envie de parler à Hylios. J'étais déjà près de lui pendant le voyage, je ne voulais pas qu'il ait l'impression que je le suis partout. Je me suis alors installée à un autre arbre de l'autre côté de cette même clairière. J'avais très envie de dormir, je ne savais pas pourquoi d'ailleurs, mais je ne pouvais pas me le permettre, et mes nuits était constamment hantée de cauchemars.

Les deux hommes revinrent. Ils allumèrent le feu et nous avons commencé à manger le lapin que l'autre homme avait chassé. Un lapin pour quatre c'était très peu, et je m'en suis vraiment rendue compte ce soir là, surtout que je n'ai pas eu le droit à une grosse portion étant donné que j'étais la plus petite de mes trois accompagnateurs.
"Nous sommes en avance par rapport à ce que nous avions prévu. Il est possible que nous soyions dans deux jours à Vendel.", dit l'homme.
Il fallait que je leur parle. Au moins un peu. Ils ont le monopole depuis maintenant deux jours, et ni Hylios ni moi n'avons eu le cran de leur adresser la parole.
"Que se passera-t-il exactement, à Vendel ?", demandais je.
Hylios releva la tête de son lapin. Je ne sus dire ce qu'il pensait.
"Eh bien... Notre bon roi ne nous a pas trop informé de ce qui se déroulerait. Je crois que vous savez l'essentiel, qui est de la formation."
"Oui, mais dans quel but ? Je sais bien que le Maître et nous sommes en conflit, mais qu'allons nous faire de cette magie ? Vous allez nous envoyer sur le champ de bataille ?"
"Il n'est absolument pas question de guerre pour le moment", dit le second homme. "C'est une prise de précaution. Et notre roi est très fier de vous avoir à nos côtés."
Je n'ai pas bien perçu cette conversation. J'avais l'impression que l'on voulait nous cacher des choses. Je n'aimais pas ça. Mais je me suis tue. Hylios me regardait de travers, comme à chaque fois que j'ouvre la bouche. Je commençais à avoir l'habitude. Je n'y prêtais presque plus attention.

"La machine l'a ôtée.
Son sommeil est mortel.
Le temps sera son recours et l'histoire a décidé que le jeu n'aurait que deux issues.
Mais elle n'est plus seule.
Le bleu du ciel et les larmes.
Les lettres de sang.
Le soleil s'éteint."

"Si tout se passe bien, c'est en fin d'après midi que nous passeront la rivière forteresse qui garde la ville. Notre supérieur vous y accueillera et vous conduira au château platine.", dit l'un des deux hommes. J'avais déjà entendu parler du château platine. Un château brillant d'un tel éclat qu'on pourrait le confondre avec le soleil. C'était bien évidemment dans les intentions du roi. J'étais toujours accrochée à Hylios, qui ne parlait pas. L'allure des chevaux avait du accélérer pour que nous puissions arriver avant la nuit. Les paysages n'ont pas changé. Les plaines étaient toujours les même herbes bleues, moins hautes, peut-être, et le sol était d'un plat idéal pour les cavaliers.

Le soir déclinait déjà. Le soleil avait pris une teinte orangée, et il devait être quinze heure de mon heure. L'heure de Terre. La ville était très imposante. La rivière était extrêmement large et l'eau y coulait abondamment, se cognant contre les rochers. Le hommes nous expliquèrent qu'ils avaient du changer d'itinéraire car certains chemins devenaient dangereux et que beaucoup de brigands y rôdaient depuis quelques lunes. Nous avons franchi le pont-levis et sommes entrés dans la ville. Elle était très animée, partout étaient accrochés des drapeaux sur lesquels le soleil resplendissait et des étals multicolores bordaient chacune des rues.
"Bienvenue chez nous à Vendel.", dit l'homme. "Nous allons vous confier à notre supérieur et nous vous laisserons. Ce fut un honneur."
Les chevaux firent quelque pas avant que la troupe ne s'arrête devant un homme à l'armure étincelante frappée du même soleil. Les hommes firent demi tour, nous laissant avec le nouvel homme.
"Bienvenue à Vendel", dit-il. "Je suis Jaymery Enstel, chef templier de la garde rapprochée du roi. J'ai pour mission de vous escorter jusqu'au château."
Il me regarda moi, d'un air dédaigneux, puis Hylios, qui reçut de sa part un regard noir. Je me suis alors demandé s'ils se connaissaient, ce qui me parut bête étant donné qu'Hylios n'a jamais quitté le temple Absolu. Nous avons suivi Jaymery dans les rues sinueuses de Vendel, où, pour une fois, les gens ne nous étaient pas hostiles. Le château se trouvait au fond de la ville, derrière ses jardins luxuriants. Même si tout semblait se passer pour le mieux, je n'étais pas sereine. Mes cauchemars me tourmentaient et je ne savais pas vraiment ce qu'ils signifiaient. Je me suis dit plusieurs fois que je pourrais en parler à Hylios, mais j'y ai renoncé : il n'est sûrement pas la bonne personne à qui se confier... Je me suis alors dit que j'appréhendais sûrement, et rien de plus. Nous sommes descendus des chevaux devant le château et un jeune écuyer est venu les récupérer. Jaymery nous conduisit alors dans l'immense salle d'accueil du château. Le roi était assis sur le trône. Il était blond, légèrement barbu et jeune. Il portait une armure scintillante sur laquelle trônait le soleil blanc, et avait sur la tête une imposante couronne. À sa gauche se tenait la reine, qui était une belle femme très mate de peau avec les yeux sombres. Elle portait quant à elle une robe blanche et un fin diadème ornait ses cheveux noirs ondulés. Le roi se leva et vint vers nous les bras grands ouverts.
"Bienvenue dans mon royaume, mes amis. Je suis Lecrocelle, roi de Vendel, et c'est moi qui assurerait votre sécurité."
Hylios et moi demeurèrent muets. Le roi souriait toujours, et Jaymery faisait toujours la tête. Après un bref moment de silence, il reprit.
"Vous avez déjà vu mon fidèle chef de garde, je ne vous le présente donc pas. Voici ma femme, Ysamarine de Seynhal, reine de Vendel depuis peu."
La reine semblait extrêmement fatiguée. Ses yeux étaient cernés de bleu et elle regardait d'un très mauvais œil l'homme qui était son mari. Elle fit tout de même mine d'esquisser un sourire et je le lui rendit.
"On vous a sûrement parlé de la formation", continua le roi, intarissable. "Laissez moi vous présenter Elvirae, ma conseillère et celle qui vous apprendra ce que vous devez savoir."
Une jeune femme aux cheveux flamboyants et aux yeux blanc se détacha de l'ombre des deux trônes. Elle sourit de toutes ses dents blanches. Elle portait une tunique blanche avec une broche qui représentait le soleil, symbole des conseillers. Tous les conseillers de chaque royaumes sont Absolus, c'est plus une tradition qu'une loi, mais chacun s'y applique.
"Bonjour.", fit-elle sobrement.
"Je suis heureux que les si célèbres Absolus de Liéssance soient ici, en ma demeure. Jaymery."
Ce dernier s'avança.
"Oui, mon roi ?"
"Montrez donc le château à nos nouveaux amis."
"Bien, sire."

Jaymery nous indiqua une porte en bois au fond de la salle, et nous y sommes entrés. Il nous fit monter alors de très étroits escaliers en pierre, et nous pouvions voir l'extérieur par les petites meurtrières qui bordaient les murs. Quand nous sommes arrivés, il poussa la porte de l'étage.
"C'est ici que vous séjournerez."
Nous étions devant deux chambres, qui, manifestement, étaient prévues pour les invités de très haute importance.
"Merci, je...", commençais je avant que Jaymery ne m'interrompe.
"Je ne vous ait pas autorisé à m'adresser la parole. Vous n'êtes pas les bienvenus ici. Trop de gens vous cherchent, et pas en vous voulant du bien. Je pense que c'est une erreur que de vous avoir amené ici. Notre roi est quelqu'un de très sociable, mais nous, nous ne sommes pas amis. Tâchez de vous en souvenir."
Je sentais Hylios s'énerver. Il n'avait pas l'air non plus de vouloir s'entendre avec Jaymery. Ce dernier s'en alla sans se retourner, nous laissant seuls dans le long couloir lugubre.


Edanaelda - Tome 1 - Rien n'a réellement commencé Où les histoires vivent. Découvrez maintenant