La Silhouette

Une alliance réticente

Un monde de douleur, une vie de désespoir.

Un être condamné et lié, par sa propre bêtise entravé.

Son enfance en ruines, autour de lui, la bruine.

Plus rien ne le sauverait, pas même celle qu'il aimait.

Perdu à jamais dans ses limbes, la silhouette n'a plus de nimbe°

° Nimbe : Auréole - Cercle, auréole que les peintres, les sculpteurs mettent autour de la tête des saints.

*

Après la mort de Kastia, beaucoup de choses avaient changées. Y compris Salia elle-même. Elle n'était plus la jeune fille naïve qu'elle avait été. En trois ans, elle était devenue digne du rang de Général, prenant le relai en mémoire de sa jumelle.

Voilà pourquoi, aujourd'hui, ou plutôt, cette nuit, elle regardait ainsi Zeika. Pour elle, la rousse était responsable de la perte de son enfance. Et de la mort de trois de ses proches. Elle ne voulait pas lui pardonner. Laocris, lui, âgé alors de 12 ans, avait décidé d'enterrer le passé et d'oublier. Mais Salia s'y refusait.

C'est alors que Thundarius prit la parole.

- Je sais combien ce qui s'est passé ce jour-là t'a hanté, Salia. J'ai eu le même problème. Mais il faut apprendre à pardonner. Malgré la haine, la tristesse et le désespoir d'avoir perdu un proche. Si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour Kastia et mon fils. Fais-le pour ton père.

Salia ferma les yeux. Elle était partagée. Les paroles sages du Général lui rappelèrent celles de sa sœur, dans son lit de mort. Elle aussi l'avait poussée à pardonner. Puisque c'était la seule solution, elle allait accepter. Mais elle ne pardonnerait pas, à moins que Zeika lui explique les raisons de son geste et qu'elle les trouve suffisantes.

Rouvrant les yeux, elle se redressa et s'avança d'un pas déterminé vers son ancienne amie. Les autres se crispèrent, inquiets pour la jeune rebelle. Pourtant il n'y avait aucune raison de l'être. La jeune Alfide tendit la main à son ennemie, la regardant d'un air fier. Zeika hocha la tête et prit la main qui lui était tendue. Une alliance fut ainsi conclue entre les deux jeunes femmes, le temps d'une mission.

Ironique que ce soit pour sauver le Général que Zeika devait auparavant neutraliser... Un sourire sarcastique naquit sur le beau visage de la brune. Lâchant la main de la rousse, Salia fit signe aux autres de se mettre en place.

Elle venait d'entendre le convoi de prisonniers se remettre à bouger, signe qu'ils n'allaient pas tarder à repartir. Il était temps d'aller sauver son père.

*