Il n'arrêtait pas d'y penser.
C'était vrai ; il allait gâcher sa vie.
Le bruit de la pluie contre la tôle de l'entrepôt ne suffisait pas à anesthésier sa tête.Il n'envisageait pas de perdre : il était trop préparé pour cela. Mais il n'avait pas envisagé toutes les conséquences d'une victoire.
Son réveil sonna à sept heure pile. Il avait à peine fermé l'œil. Confusément, le Professeur sentait que cette conversation devenait un risque. Pas de relations personnelles, avait-il exigé. Et pourtant, par nécessité, il devait en feindre avec l'inspectrice. En feindre sans en ressentir, bien sûr.
Comme en écho à sa pensée, son téléphone vibra deux coup secs.- Vous n'avez pas aimé mes mots d'hier.
« Bonjour à vous aussi, Inspectrice. »
- Bonjour Professeur.
« Vous avez prit du repos ? »
- Oui. Un peu. Ne vous en faites pas pour moi. J'ai eu un enfant.
« J'imagine. Vous en voulez d'autre ? »
- Seigneur non. Un me suffit largement. Je n'en veux pas d'autre. Et vous ?
« Je n'y ai jamais pensé. »
- Quel âge avez vous ? Approximativement.
« À peu près votre âge. »
- Et ça ne vous a jamais effleuré l'esprit ?
« Pas vraiment. La vie de famille ne m'irait pas. »
- Je croyais aussi. Que ça ne m'irait pas.
« Et quelle bilan dressez-vous de la vôtre ?»
- Mitigé.
« Mitigé ? »
- C'est ce que j'ai dit.
« Vous comprenez très bien ma question.»
- J'aime juste vous le faire demander.
« Cette phrase me rappelle quelques choses. »
- Possible.
« À quel heure mettez-vous votre réveil ?»
- Sept heure.
« Je tacherais de caler mes appels sur vos horaires. »
- Vous êtes si sûr de vous.
« J'attendais plus un merci, ou une vague reconnaissance. »
- Ça n'est pas de la gentillesse. Seulement un genre dans de condescendance paternaliste.
Il se figea un instant devant son téléphone, et remit ses lunettes. Un instant agréable, l'autre amer.
- Tellement persuadé que vous allez gagner que vous tentez de rendre ma défaite moins cuisante, pour apaiser votre conscience.
Ses doigts figés au dessus du téléphone ne tapèrent rien.
- Vous avez réfléchis à ma phrase d'hier soir.
« Oui. »
- Qu'en pensez-vous ?
« Que je ne compte pas gâcher votre vie.»
- Vous n'envisagez même pas de perdre.
« Inspectrice. Si vous perdez, votre carrière en prendra un coup, mais vous resterez celle qui a gardé tout les otages en vie. »
- À condition qu'ils s'en sortent
« Ils s'en sortiront. Vous avez bien comprit que je n'étais pas un tueur. »
- Admettons.
« Si je perd : je perd tout.
Je perd des années de liberté, de travail, d'idéalisme. Je perd tout ce que j'ai, tout ce que j'ai battit. Je ne peux pas perdre Raquel. Inspectrice. Oui. Je suis peut-être un peu condescendant. Parce que perdre n'est même pas une option. »Dans sa maison aux volets encore fermés, devant le premier café de cette longue journée, Raquel fixa l'écran, comprenant en un coup ce qu'elle aurait dû saisir bien avant.
Le Professeur avait de la famille à l'intérieur.
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De vous à moi
Fanfiction[ Bonjour, Cette histoire se déroule durant l'affaire de la fabrique, le jour après sa toute première rencontre avec le professeur, sous le nom de Salva. Dans cette version, je part du postulat qu'il ne l'a rencontré QU'UNE FOIS au bar. Cela aurait...