Les bords de mes chaussures s'enfoncent mollement dans la boue du sol. J'ai encore la tête qui tourne un peu et pendant que je marche sous les regards affûtés des allemands, je pense à ce qui va m'arriver. Le soldat de tout à l'heure, m'a expliquée que j'allais à la visite médicale. Je ne sais pas si je peux le croire. C'est un allemand. Je ne peux pas lui faire confiance. Peut être m'a t-il dit ça parce que ça l'amuse de me voir espérer de tout mon cœur alors qu'il sait pertinemment que c'est finit pour moi. Je ne me fais pas d'illusions. Je suis une femme et les femmes sont rarement choisis pour les travaux de force, et s'il arrive qu'ils prennent des femmes ce sont les plus fortes, les plus résistantes. Moi, je suis danseuse et ce n'est pas mon physique qui me sauvera.
Un soldat me pousse dans le dos du bout de son arme. Sans m'en rendre compte j'étais sortie du rang. Je me remets dans la file docilement et j'avance, tête baissée. Nous finissons par rentrer dans un baraquement.
- SCHNELL ! SCHNELL ! Hurle un des officiers.
Ils frappent de leur matraque ma voisine qui n'avance pas assez vite. Elle pousse un cri et se rattrape de justesse sur le chambranle de la porte. Mon regard croise le sien et je peux percevoir sa douleur. Douleur qui n'est pas prête de s'arrêter. Je me remets en marche et suis les autres dans une grande pièce. Nous devons être une trentaine de femmes ici. Il y a quatre officiers avec nous. Ils nous toisent du regard. Je baisse la tête, ne voulant pas attirer l'attention sur moi.
Nous sommes compressées comme des bestiaux que l'on envoie à l'abattoir. La pièce pue la transpiration et le sang.
- ZIEHEN IHNEN AUS ! Hurle un des officiers.
Nous nous lançons des regards confus, cherchant à comprendre la signification de ses mots.
- On doit se déshabiller. Me chuchote, une jeune femme rousse, à côté de moi.
Elle est un peu plus grande que moi mais semble avoir environ le même âge. Son visage est creusé par la fatigue et la faim, néanmoins elle me lance un petit sourire d'encouragement alors qu'elle commence à déboutonner son chemisier. J'écarquille les yeux, éberluée. On doit se déshabiller... ensemble ? Devant les soldats ?
Je leurs lance un regard angoissé et croise celui d'un homme d'environ la trentaine. Il a un air malsain et cruel. Il me fait un petit clin d'œil obscène et se lèche les lèvres. Je déglutis et un frisson me remonte l'échine. Je tente de me cacher derrière d'autres femmes. Une fois que je me suis assurée qu'il me verrait le moins possible, je retire mon pull, mes bas et ma jupe. Je me retrouve alors en sous-vetements et j'ai l'impression d'être nue. Je lance un regard à ma voisine. Elle hoche lentement la tête. Je déglutis et commence à retirer mon soutient gorge. Ma poitrine est alors visible et je la cache de mes bras. Je lance des regards hagards dans tous les sens. Ma respiration se fait plus rapide et je sens cette foutue panique me broyer les os.
- ALLES ! S'écrit un des soldats, alors qu'il déchire la culotte d'une jeune fille d'à peine 16 ans.
Elle se met à pleurer en silence et termine de se déshabiller. Je déglutis. Je ne veux pas faire ça. Voilà à quoi je suis réduite. J'enlève mon dernier vêtement et me cache avec une seconde main. Je suis affreusement gênée, mais surtout je me sens vulnérable, comme si mes seules défenses résidaient dans mes vêtements. Comment aurais-je pu imaginer, il y a de ça un mois que je me retrouverais ici, nue devant des tas de soldats, qui à coup sûr se rinceraient l'œil ?
Après d'autres mots hurlés que la même voisine me traduit, nous nous mettons en ligne. L'un des officiers appelle les détenues une par une. Elles vont alors se présenter devant la troupe de soldat, qui les examinent, les touchent. Partout.
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En un battement de Cœur
Historical FictionAline a 19 ans, elle est juive et résistante. Son pire démon : les nazis. Déportée à Auschwitz, elle va comprendre que rien n'est prédéfini, découvrir que parmi ces soldats certains ont un cœur. Le Reichführer Himmler est l'exception qui confirme la...