Partie 8 (1)

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J'ouvre les yeux difficilement. Le brouillard brouille ma vision. Allongée dans un lit qui n'est pas le mien, dans une pièce que je ne connais pas, la panique ne tarde pas à m'envahir. À ce moment-là, je fais la seule chose que je suis capable de faire : hurler.
- Angi ? Angi ? Angi ! Angi.
- Je suis là ma chérie. Calme-toi, tout va bien.
- Où est-ce que je suis ?
- A l'hôpital. Tu as fait un malaise.
- Ne me laisse pas.
- Tout va bien ma puce. Tu es en sécurité.

La voix de mon amoureuse m'apaise instantanément. Je me laisse bercer par ses paroles. Je sollicite ses bras un instant. Elle m'embrasse et se rassied sur la chaise à côté de moi tout en me prenant la main.
- Tu nous as fait une de ces peurs, reprend-t-elle. Tout le monde s'inquiète. Maddie en a fait une crise de nerfs et la patronne est intenable. Même Yaëlle est dans tous ses états. Encore plus que d'habitude.
- Yaëlle est venue ?
- Tout le monde est venu. Tu es là depuis quasiment vingt-quatre heures. Tu m'as fait tellement peur.
- Qu'est-ce que j'ai ?
- Je ne sais pas. Le médecin attendait ton réveil pour en savoir plus. Comment te sens-tu ?
- Fatiguée. J'ai la tête qui tourne. Tu es là depuis longtemps ?
- Je ne t'ai pas quitté. Je voulais veiller sur ma princesse.

Nous nous sourions. J'embrasse sa main tandis qu'une larme s'échappe de mon œil. Nous continuons à discuter jusqu'à l'arrivée du docteur. Après une série de questions, il déduit que mon malaise est le résultat d'un épuisement général, physique et psychologique, accéléré par le facteur stress. Lorsqu'il me demande si je vois un élément qui pourrait expliquer un tel état, ma compagne intervient immédiatement en s'adressant à moi.
- Le travail. Tu rechignes à y aller ces derniers temps. Et quand tu rentres le soir, il est tard et tu es épuisée. Je l'ai bien remarqué. Ça te démoralise.
- Pas du tout. Tout va bien dans mon job.
Je me défends autant que je peux, mais je ne convaincs ni l'un ni l'autre. Après un long moment, le médecin accepte de me laisser partir en me conseillant du repos.

De retour à la maison, Angi ne me lâche pas d'une semelle. Elle me fait installer dans le canapé et m'interdit presque d'en bouger. Quelques jours plus tard, c'est de ce même canapé que j'observe un drôle de manège. Angi s'agite dans tous les sens. Elle fait des allées et venues entre la salle de bains et la chambre, tantôt les bras libres, tantôt les bras chargés. Intriguée, je me lève et la suis jusque dans la chambre où je la vois ranger des vêtements dans une valise. Je finis par l'interroger en la regardant faire.
- Qu'est-ce que tu fabriques ?
- Je prépare tes affaires.
- Pour quoi faire ?
- Nous partons. Il te faut du repos. J'ai trouvé l'endroit parfait.
- Et ton travail ? On ne peut pas partir comme ça.
- J'ai parlé à la chef. Nous prenons un congé. Et j'ai promis qu'elle pourrait me joindre à chaque fois qu'elle en aurait besoin.
- Et où tu m'emmènes ?
- À la montagne, entouré par la nature et l'air frais.
- C'est complètement absurde.
- Au contraire, ça a du sens. Là-bas, tu seras au calme. Ça nous fera du bien à toutes les deux.

Je reste abasourdie par cette nouvelle. Pourtant, plus j'y pense plus cette idée me paraît bonne. Je me sens même reconnaissante d'avoir une concubine si prévenante. À quelques heures du départ, je me rends compte que je ne connais pas la destination. Quand je lui demande, Angi me répond simplement que c'est une surprise. Elle ne veut me dire ni le lieu, ni le moyen d'hébergement qu'elle a choisi. Je l'accompagne donc aveuglément jusque la voiture pour débuter ce voyage. Elle insiste pour que je me repose durant tout le temps du trajet. Nous discutons calmement pendant que nous regardons le paysage défiler. Les heures passent ainsi jusque notre destination finale. Angi se gare sur le parking d'un endroit pittoresque. Dès que j'ouvre la portière pour descendre, je suis frappée par la fraîcheur de l'air. Tout est calme, entouré de verdure et d'arbres. Au loin, les montagnes surplombent le décor. Je sais tout de suite que je vais m'y plaire.

Angi me prend par la main et nous dirige devant une grande bâtisse entièrement faite de bois. Lorsque je réalise qu'il s'agit d'un gîte, je suis d'emblée charmée. Je le suis encore plus lorsque nous franchissons la porte d'entrée. J'en reste bouche-bée. Nous sommes accueillies par une dame au sourire pétillant et la chevelure rousse qui vient nous saluer. Angi s'occupe de faire les présentations.
- Bonjour. Je suis Angi. C'est moi que vous avez eu au téléphone. Et voici ma fiancée Camille.
- Oh bien sûr, Angi et Camille. Je m'appelle Nathalie. Soyez les bienvenues.
- Merci madame.
- Appelez-moi par mon prénom. On ne fait pas de manières ici. Venez avec moi. Je vais vous montrer votre chambre.

Nous la suivons à l'étage où elle s'arrête devant la dernière porte du fond. Elle la déverrouille avant de nous faire entrer dans une chambre spacieuse aux couleurs vives. Le parquet est impeccablement entretenu, sans trace ni défaut. Un lit blanc trône au milieu de la pièce. Un bureau et une coiffeuse en bois ont pris place à l'opposé de celui-ci. Une grande fenêtre laisse entrer le maximum de lumière naturelle, donnant ainsi de l'allure à l'ensemble. Le fond de la pièce donne accès à un coin douche, à la fois intimiste et complet. Je reste ébahie par la beauté de l'espace. Nathalie nous souhaite une nouvelle fois la bienvenue et nous encourage à la prévenir en cas de problème. Elle nous laisse nous installer en nous encourageant à faire le tour du propriétaire une fois cette tâche achevée.

Lorsque toutes nos affaires sont en ordre, nous rejoignons le rez-de-chaussé pour découvrir le domaine et ses environs. Le cadre est semblable à notre chambre, rustique et chaleureux. En longeant l'accueil, nous tombons sur une salle à manger commune, fleurie et finement décorée. Une porte mène à la cuisine. L'autre sur un grand salon divisé en deux zones. La première moitié du salon comporte deux canapés faisant face à une télévision et des sièges disposés en rond. L'autre moitié fait office de salle de jeux avec un billard ainsi que plusieurs tables de jeux. La pièce jouxte un jardin composé d'une pelouse de grande taille parfaitement bien entretenue. La terrasse permet de se détendre et de partager de bons moments autour de la table d'extérieur. Une clôture fixe les limites du terrain.

Après avoir longuement admiré tout ça, nous retrouvons Nathalie dans le hall.
- Alors, ça vous plaît ?
- Oui, répond Angi. C'est vraiment magnifique ici. Vous gérez ça seule ?
- Oh non. C'est mon mari qui a eu l'idée de transformer cette maison en gîte familiale. Aujourd'hui, nous nous en occupons ensemble.
- C'est du très beau travail.
- Merci. J'espère que vous allez vous plaire.
- On s'y plaît déjà beaucoup. Croyez-vous qu'on pourrait voir votre mari ?
- Vous le verrez au dîner. Tout le monde se réunit le soir à dix-neuf heure. Vous y serez ?
- Bien sûr. Avec plaisir.

Le rendez-vous pris, nous nous retrouvons à l'heure indiquée dans la salle à manger. Plusieurs pensionnaires sont déjà installés. Nous les imitons en nous asseyant à table. Une délicieuse odeur émane de la cuisine. La voix de Nathalie résonne avant qu'elle n'apparaisse, un gros plat dans les mains. Un homme à la carrure imposante et à la chevelure grisonnante la succède en tenant un autre plat. Ils posent tous deux les plats au centre de la table. Pendant que Nathalie fait le service, l'homme se positionne en bout de table. Au cours du repas, nous apprenons que tout a été préparé par le copropriétaire du nom de Denis. Ils sont tous les deux charmants et bienveillants avec chacun de leurs hôtes, ce qui brise facilement la glace.

Épuisées par le voyage, nous décidons de rester dans notre chambre le reste de la soirée. Nous nous écroulons presque dans le lit. Je profite que nous soyons toutes les deux confortablement installées pour évoquer une question qui me tracasse depuis notre arrivée.
- Dis, j'ai pas rêvé. Tu lui as dit que j'étais ta fiancée ?
- Oui c'est exact. Il y a un problème ?
- Non. C'est juste que toi et moi on n'a jamais abordé le sujet.
- Alors faisons-le. Si ça te gêne parlons en.
- Tout de suite ?
- Oui pourquoi pas. C'est toi qui a posé la question après tout.
- Alors, je t'écoute. Qu'en penses-tu ?
- Eh bien, je pense... que c'est envisageable.
- Je le pense aussi.

Nous nous échangeons un sourire, sachant bien ce que cela implique. Puis nous nous embrassons avant de nous glisser sous les couvertures. Je suis presque assoupie quand je l'entends murmurer : « veux-tu m'épouser ? ». « Plutôt deux fois qu'une » dis-je pendant que je m'endors. Au petit matin, nous sommes paisiblement réveillées par la lumière du jour. Nous passons la matinée à admirer les alentours, émerveillées par la région. Nous consacrons notre après-midi à nous balader et découvrir le coin. Après le repas du soir, Nathalie nous invite à rejoindre les autres vacanciers dans le salon. Deux personnes regardent la télévision tandis que trois autres sont en pleine partie de billard. À première vue, il s'agit d'un couple et d'une femme, tous relativement jeune. À la fin de leur partie, ils nous invitent spontanément à les rejoindre. Pendant que je reste assez timide, Angi s'avère être une adversaire redoutable.

Au fil des tours, nous parvenons à gagner leur sympathie et faisons progressivement connaissance. Après le départ du couple, nous nous posons dans les fauteuils pour discuter. Prénommée Lauréline, la jeune femme est joyeuse et douce. Ses longs cheveux auburn semblent briller en permanence et sa peau est similaire à une poupée de porcelaine. Elle est véritablement belle. Plus âgée que nous, Lauréline vit à quelques heures de notre domicile. Elle travaille dans le numérique et a elle aussi pris un congé pour se ressourcer à la campagne. Nous discutons et rions comme si nous nous connaissions depuis des années. Même si nous évoquons à peine nos vies personnelles, le courant passe très vite. Nous sommes toutes les deux captivées.

Le temps nous sépare, mais nous nous promettons de nous revoir dès que possible. De retour dans notre chambre, nous avons d'emblée une curieuse conversation.
- Je pense qu'elle est gay, assure Angi.
- Qu'est-ce que tu racontes ?
- Je peux t'assurer qu'elle l'est.
- Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
- Sa façon de parler, de se tenir. C'est toi quand je t'ai rencontré.
- Elle ne me ressemble pas du tout.
- Intérieurement si. Elle est charmante, attentionnée, sensible. C'est tout ton portrait.
- Angi, il ne peut pas y avoir de gays partout où on va. C'est impossible.
- Et pourquoi pas ? Tu veux qu'on parie ?
- Après t'avoir vu jouer ce soir, je ne compte pas prendre ce risque.
- Tu verras quand on la reverra. Je suis sûre que nous allons devenir très amies avec cette fille.

Ses réflexions m'amusent. J'en ris encore une fois couchée. Comme convenu, nous la revoyons après le dîner le lendemain soir. Cette fois nous nous isolons dehors pour profiter de ce début de soirée. La conversation est plus ouverte que la veille. N'ayant pas caché la nature de notre relation, Lauréline semble plus apte à se confier. Lorsqu'Angi la questionne sur sa vie amoureuse, elle hésite un instant.
- Il y a quelqu'un. Mais je ne pense pas que mes sentiments soient partagés.
- Comment ça ? s'étonne Angi.
- C'est une fille. Elle travaille avec moi dans l'agence. Ça ne m'est jamais arrivé avant. Je craque complètement. Mais je ne crois pas qu'elle soit intéressée.
- Comment tu le sais ? Tu lui as demandé ?
- Bien sûr que non. J'ai trop peur.
- Alors comment peux-tu le savoir si tu ne franchis pas le pas ? Tu devrais essayer.
- Comment elle se comporte avec toi ? interviens-je. Est-ce qu'elle est tactile ?
- Plutôt oui. On rit beaucoup ensemble. Un peu comme avec vous.
- Bingo ! crie presque Angi. Si elle agit comme ça, il y a des chances qu'elle te drague.
- Nous sommes proches en dehors du travail. Je ne voudrais pas briser ça.
- Si tu n'essayes pas, tu ne pourras jamais savoir.
- Je suis d'accord, dis-je. Tu devrais y réfléchir.

Suite à cet échange, Lauréline a l'air pensive. De nouveau dans notre chambre, la discussion de la veille reprend.
- Je le savais.
- Angi.
- Quoi ? Je te l'avais bien dit, non ?
- Tiens donc. Je pars avec Angi et je me retrouve avec Yaëlle.
- Je ne plaisante pas. Il faut qu'on l'aide.
- Ce ne sont pas nos affaires, chérie.
- Pourtant on devrait la soutenir. On doit se serrer les coudes. Ce genre de choses n'est jamais facile. Surtout pour nous.
- Tu n'as pas tort. Mais je ne vois pas ce qu'on peut faire d'autre.
- D'abord, l'encourager à parler avec sa collègue.
- C'est déjà ce qu'on a fait.
- On peut l'aider à sauter le pas.
- On ne peut pas la forcer non plus. C'est à elle à se décider. Viens te coucher ma puce. Laisse ça de côté pour ce soir.

Elle m'écoute et s'allonge auprès de moi. Elle se blottit contre moi tandis que je l'entoure de mes bras. Nous nous endormons ainsi et passons la nuit pelotonnée l'une contre l'autre. L'occasion de penser à autre chose se présente à nous lorsque les propriétaires du gîte organisent un tournoi de cartes. Tandis que je m'incline lamentablement au bout de deux tours, Angi tient bon et se hisse en final. Elle épate les pensionnaires avec ses talents innés. Quant à moi, je n'ai jamais été aussi admirative. Pendant la partie, tout le monde reste attentif. Au dernier mouvement, un silence total règne dans la pièce. Angi sort sa dernière carte, et dans un ultime suspens, son adversaire dévoile la sienne. Nous éclatons tous de joie lorsque nous découvrons que celle d'Angi est gagnante. Fière, je lui saute au cou et la couvre de baisers. Nathalie est la première à la féliciter, suivi par le reste de la maisonnée. Humble, Angi se contente de les remercier poliment.

Malgré cette victoire, elle ne peut s'empêcher de jouer les entremetteuses lorsque nous croisons Lauréline le lendemain. Elle l'encourage une nouvelle fois à se lancer et la conseille à propos de ses craintes. Elle se montre compréhensive et rassurante. Ses efforts payent puisque Lauréline nous annonce plus tard qu'elle a téléphoné à sa collègue et qu'elle a l'intention de lui dévoiler ses sentiments à son retour. Angi s'en félicite en criant silencieusement victoire. Libérée d'une préoccupation, elle profite d'une soirée télé organisée par les propriétaires pour se détendre. Nathalie choisit un film léger et convie ceux qui le souhaitent à y participer. Quelques-uns suivent, Lauréline incluse. Angi et moi nous installons dans l'un des canapés. Notre nouvelle amie nous suit et pose une légère couverture sur nos jambes.

Le film commence. Plongées dans la pénombre, nous nous serrons l'une contre l'autre. Sous le drap, la main d'Angi se pose sur ma cuisse. Plus le film avance, plus sa main se rapproche discrètement de mon entrejambe. Arrivée à ce niveau, son doigt dessine des cercles à travers l'étoffe de mon vêtement. Je sens mon bassin bouillir de plus en plus. Ce jeu se poursuit jusqu'à la fin de la projection. Je peux à peine bouger une fois qu'elle se termine. Je rejoins la chambre, Angi sur mes talons. Une fois la porte fermée, elle s'approche et me prend contre elle. Nous passons un moment à nous regarder sans rien dire. J'ai l'impression de lire en elle, de pénétrer au plus profond de son âme. « Fais-moi l'amour. Je t'en prie mon amour. » finis-je par murmurer.

Elle me fait reculer jusqu'à ce que je m'allonge sur le lit, puis s'allonge à son tour. Elle se penche au-dessus de moi. Sa main se glisse sous mon pantalon, aguiche d'un doigt mon bassin avant d'y entrer. Elle attrape ma bouche et m'embrasse avec passion. Mon cœur s'emballe dans ma poitrine. Nous nous déshabillons l'une l'autre. Puis je prends les choses en main. Je nous fais retourner pour la dominer. Ma langue s'aventure dans son cou tandis que mes mains parcourent sa nuque et ses épaules. La tension montant, je deviens sauvage. Je m'installe entre ses cuisses et entame des frottements. J'impose la cadence en stimulant sa zone sensible avec frénésie. Nos peaux brûlantes se confondent, se fondent dans une même étreinte. Nous poussons à l'unisson des cris à intervalles réguliers. Nous explosons intégralement. Approchant l'apogée, nous nous accrochons de toutes nos forces à l'autre. Nous lâchons simultanément un ultime râle. À bout de force et ruisselantes, nous nous reposons l'une sur l'autre, le temps de rependre notre souffle. « Je t'aime tellement. Je suis désespérément amoureuse de toi. » confie-t-elle. Nous poursuivons la nuit en discutant et en nous confiant jusqu'à ce que le sommeil nous emporte.

Nous avant tout [girlxgirl]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant