22. INSPIRATION

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Sur le chemin du retour, je décide de ne pas allumer la radio et profite du silence, laissant l'inspiration émerger. Je sens que mon cerveau a besoin d'espace, de se concentrer. Je laisse mes idées voguer, en rentrant dans une torpeur bien agréable. Mes phares éclairent la route déserte, je pousse le bouton du chauffage à fond, la route défile devant moi.


Des mots me viennent en tête, des phrases, avec un rythme et des rimes, comme une chanson. J'essaye de les graver en moi pour m'en souvenir. Arrivée chez mes parents, juste avant de descendre de la voiture, je note pêle-mêle toutes mes idées sur mon téléphone pour ne rien oublier.


Chez moi, le soir, très tard. J'entends la grille du portail, les roues avancer sur les graviers dans l'allée. Puis la porte d'entrée s'ouvre, laissant apparaître Philippe, tout sourire de me retrouver, mais la mine fatiguée. Il s'assied sur le canapé avec un soupir d'aise, retire ses chaussures et relâche sa tête sur les coussins, puis me regarde en posant sa main sur mon genou : " Tu es magnifique ma chérie, je n'ai jamais été aussi amoureux de toi. "


Je commence à sentir la culpabilité monter en moi, comme une lame de couteau qui remonterait de mon nombril jusqu'à mon coeur, pour faire se répandre mes viscères un peu partout et révéler au grand jour la part la plus sombre et vicieuse de moi. Mettre en pleine lumière à quel point la vie peut être moche parfois, cruelle et injuste.  Je dis la vie car je n'ose pas dire que c'est moi qui suis moche.


Mal à l'aise, je baisse machinalement les yeux et l'invite sans le vouloir à porter son attention sur mon carnet de notes où j'ai recopié mes bribes de phrases, essayant de les retravailler, de les assembler, de leur donner un sens. D'habitude, je déteste que l'on regarde ce que je fais quand je suis en plein remaniement. " Je peux ? " Me dit-il intéressé. Je lui tends le carnet comme pour me débarrasser du même coup de ma gêne. Il lit. Je le vois froncer les yeux, d'abord interloqué, puis concentré. Enfin, il lève les yeux vers le plafond comme s'il était dans une profonde méditation. Tout ce temps, je reste suspendu à ses expressions, attendant que le couperet tombe. Il me regarde enfin : " Tu n'as jamais rien écrit d'aussi beau. "

Infidèl(e)sOù les histoires vivent. Découvrez maintenant