Le pistolet fut projeté dans les airs, tomba au sol avec un choc sourd, et tourna sur lui-même jusqu'à finir sous l'un des étagères. Izuku reprit brusquement conscience de ce qui l'entourait, en commençant par la légère odeur de brûlé dans l'air. Dans une bibliothèque ? Comment ça se faisait ? Il tenta de se remémorer, point par point, ce qui s'était passé. Il était parti ramasser le pistolet par terre. Et puis ? Ses souvenirs ressemblaient assez à un fichier vidéo corrompu, et il avait mal au crâne, comme une vibration pénible. Et d'un coup, les images l'assaillirent. Le train de ses pensées précédentes le percuta à pleine vitesse, et il se revit, au ralenti, lever doucement l'arme et poser le canon contre sa tempe. C'était terrifiant, et glaçant, et absolument cauchemardesque.
Mais bon, ça avait le mérite d'expliquer pourquoi Kacchan était en train de lui hurler dessus.
Uraraka était visiblement en train de lui crier dessus aussi, mais sa voix était complètement couverte par celle de son camarade. Ce qui ne donnait à ce dernier pas plus de chance de faire passer son message, quel qu'il soit : entre le volume beaucoup trop élevé, le ton de voix qui tenait de l'aboiement, et la distraction de la légère douleur là où Katsuki serrait ses avant-bras, Izuku ne comprenait qu'un mot sur trois. Mais à sa décharge, il n'était pas vraiment en état d'écouter. La scène repassait en boucle dans sa tête – sa propre main, qui agrippait une arme à feu, avec le seul but de lui tirer dessus. Il aurait aimé pouvoir blâmer l'alter de quelqu'un d'autre, mais ç'aurait été un mensonge. Il se souvenait de chacune des pensées qui l'avaient amené à lever son bras. De la voix dans sa tête. Sa propre voix.
Brusquement, le silence tomba, et la pression sur ses avant-bras se desserra un peu. Izuku réalisa qu'il pleurait. Les larmes silencieuses se muèrent rapidement en sanglots brûlants, plus nerveux qu'autre choses. On était passés à un cheveu d'une catastrophe, et c'était entièrement sa faute. Il croyait en avoir totalement fini avec elles, mais les pensées invasives étaient revenues. Et sans aucune échelle de progression, comme si elles n'étaient jamais vraiment parties. Comme si tous ces efforts pour les bannir de son esprit avaient été complètement inutiles. Comme si son état stable n'avait été qu'une comédie qu'il se serait joué à lui-même. Un auto-mensonge ridicule.
Ochako s'approcha calmement d'Izuku et le prit dans ses bras. Elle mit une main dans ses cheveux et guida doucement la tête du garçon vers son épaule ; il se laissa faire. L'étreinte de son amie était douce et chaude. Katsuki, voyant que son bras était au milieu, finit par lâcher et se détourna.
Après quelques minutes, les sanglots s'étaient un peu calmés. Ochako continua à caresser doucement la tête de son ami, et murmura :
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
Izuku se détacha lentement, et secoua la tête.
- Je-je ne suis pas très sûr. J'ai ramassé le pistolet pour le mettre en sécurité, et d'un coup, mes pensées ont fait n'importe quoi.
Ochako fronça les sourcils.
- Attends, dit-t-elle, ça ressemble beaucoup à ce qui m'est arrivé tout à l'heure.
- Je sais, fit Izuku, mais j'ai bien vérifié que la fille était inconsciente. Normalement...
Un énorme juron retentit dans la salle, les faisant sursauter tous les deux. Ils se retournèrent vers Katsuki, qui leur montra l'endroit où ladite fille était censée être évanouie. Sauf que son corps n'était nulle part en vue. Ochako réagit au quart de tour.
- Bakugou, s'écria-t-elle en partant en courant, suis-moi, on va bloquer la sortie ! Deku, appelle les héros pro !
Les deux autres acquiescèrent. C'était la meilleure division : la fugitive ne pouvait probablement pas manipuler deux personnes à la fois, sinon elle l'aurait fait avant. Et la priorité était de l'empêcher de sortir, au moins jusqu'à l'arrivée des renforts. Et les circonstances étaient trop graves pour s'offusquer de la formulation directrice, elle aussi commandée par l'urgence. Katsuki se rua à la suite de la jeune fille, et Izuku se saisit de son portable à toute vitesse. Pendant que la ligne sonnait, il ne put s'empêcher de remarquer que l'odeur de brûlé s'était intensifiée, mais son correspondant décrocha et il laissa ça de côté pour un instant. Il vérifierait rapidement après son appel.
~***~
Ochako slaloma dans les rayons, essayant de se souvenir du plus court chemin jusqu'à la sortie. Arrivant en vue du couloir principal, elle aperçut devant elle une silhouette féminine, qui semblait porter quelque chose dans ses bras avec peine. Sans hésiter, elle se jeta dessus et la plaqua au sol. La silhouette lâcha son chargement avec un cri de douleur. Quand la jeune héroïne releva le visage, elle constata avec stupeur que la fille qu'elle avait attaquée n'était pas celle qui se faisait appeler Aiko : cette dernière gisait, toujours inconsciente, juste à côté. C'était probablement elle qui était portée par l'autre fille. Autre fille qui avait de longs cheveux bruns, des lunettes, et une expression de panique totale sur le visage.
Ochako agrippa aussitôt les poignets de la fille de manière à ce qu'elle ne puisse pas s'échapper, juste au moment où Katsuki arrivait. Celui-ci, voyant que la jeune femme tenait l'une des deux vilaines sous contrôle, se dirigea immédiatement vers celle qui était au sol.
- ... Elle est putain d'évanouie, gronda-t-il en se relevant de son inspection.
- Mais alors..., murmura Ochako. Deku...
- C'était moi.
Tous deux se retournèrent vers la fille aux lunettes. Celle-ci tremblait comme une feuille, et ses yeux étaient embués de larmes, et pourtant elle semblait s'efforcer de rester garder la tête haute.
- C'était moi, reprit-elle d'une voix chevrotante. C'était mon alter. J'étais cachée sur la mezzanine, et je manipulais vos pensées. Elle m'a juste assistée. Ne lui faites pas de mal.
Katsuki serra imperceptiblement les poings.
- ...C'est toi qui l'as mis dans cet état ? gronda-t-il froidement.
Elle déglutit, mais soutint son regard. Et puis une voix résonna dans la tête du garçon. Sa propre voix.
« Oui. C'était moi et moi seule. »
En une fraction de seconde, le poing de Katsuki heurta violemment la mâchoire de la fille. Sa tête fut projetée sur le côté, et ses lunettes furent dégagées au sol. Ochako, bien que stupéfaite, eut le réflexe de ne pas lâcher ses poignets et les serra fermement.
- Bakugou, souffla la jeune héroïne, calme-t...
- TU L'AS VU ! hurla-t-il, la rage déformant les traits de son visage. TU AS VU CE QU'ELLE LUI A FAIT ! ET TU ME DEMANDES DE ME CALMER ?
Le regard d'Ochako se durcit, et lorsqu'elle parla, ses mots semblaient presque crachés.
- J'ai envie de la frapper autant que toi, je te l'assure. Mais, poursuivit-elle en se radoucissant un peu, ce n'est pas à nous de le faire, c'est à la justice. Et être condamnés pour coup et blessures est la dernière chose dont on a besoin, toi comme moi.
Katsuki soutint son regard avec colère, mais finit par se détourner et donna un grand coup de poing dans une étagère, qui vacilla.
- Fais comme tu veux, gronda-t-il sourdement.
Ochako acquiesça.
- Merci beaucoup, murmura-t-elle avec un air rassuré.
Elle fronça les sourcils avant de reprendre :
- Dis, tu trouves pas que ça sent le...
- KACCHAN ! URARAKA !
Avant qu'elle ait pu finir sa phrase, Izuku surgit d'entre les rayonnages et fonça sur eux.
- Le bâtiment est en train de brûler ! débita-t-il, à bout de souffle. Il faut qu'on sorte tout de suite !
Katsuki jura et courut vers la porte principale, au bout de l'allée. Il s'acharna quelques secondes sur la poignée, sans résultat : elle était verrouillée. Il allait devoir changer de méthode.
- RECULEZ ! cria-t-il à Ochako, qui tenait toujours la fille, et Izuku, qui avait ramassé le corps inconscient d'Ai.
Tous deux, qui l'avaient suivi de près, s'éloignèrent de quelques pas. Katsuki étira ses doigts. Sans ses collecteurs, impossible de déclencher l'une des grosses explosions qui le caractérisaient d'habitude ; mais défoncer une serrure, c'était un jeu d'enfant pour lui. Il plaça ses deux mains contre le verrou, compta jusqu'à trois, et le loquet fut brisé net en deux par le souffle. Un coup de pied plus tard, la porte était ouverte.
- ALLEZ, BOUGEZ-VOUS ! aboya-t-il aux deux autres, qui obtempérèrent immédiatement.
Katsuki s'engagea à leur suite dans les escaliers du bâtiment, sans un regard en arrière.
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Overjoyed [Katsudeku/French]
FanfictionUne déclaration d'amour, c'est compliqué pour tout le monde. Encore plus pour Katsuki, qui n'est pas du genre à montrer ses sentiments. Forcément, il stressait. Il avait passé un temps incroyable à imaginer la scène dans sa tête, à envisager toutes...