Chapitre 19

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Quand j'ouvre les yeux, il est presque trois heures du matin. Fais chier. Je finis par me lever, inutile d'espérer me rendormir. Après avoir récupérer un soda dans le frigo, je file directement travailler sur mon ordinateur pour quelques heures. Je veux que le dossier d'accusation soit parfait, qu'aucun avocat ne puisse réfuter les preuves collectées.

Quand je relève mon nez du clavier, il est l'heure d'aller bosser. J'ouvre la salle de sport et les premiers gars arrivent. On fait les comptes ensemble et ils repartent. Toute la journée ça défile. J'ai des équipes qui tournent h24 pour cibler le maximum de gens. Le matin, ce sont principalement les jeunes et les travailleurs, en journée des habitués et en soirée, les clients fêtards réguliers et souvent huppés qu'on livre directement par coursier.

Alors que j'allais fermer boutique vers 18 heures, le boss de Javier entre dans mon bureau.

-Bonsoir, Eddy c'est bien ça ?

-Bonsoir, c'est exact.

-On n'a pas eu l'occasion d'être présenté. Moi, c'est Richard mais tout le monde m'appelle Dick.

Je lui fais un signe de tête en guise de réponse. Je déteste ce genre de personne. Appelez-moi Dick. Trop tape à l'œil. On dirait un commercial prêt à vendre sa mère ou un politicien véreux.

-Que dirais-tu d'aller boire un verre pour te remercier pour hier ?

-C'est pas la peine de me remercier pour si peu.

-En fait, c'était pas une question. Amène-toi.

Quelques minutes plus tard, on se retrouve à l'arrière d'un gros 4x4 noir aux vitres teintées et on file à travers la ville. L'arrêt se trouve être un club de strip tease assez classe semble-t-il. Avant de passer la porte, Dick me lance avec un grand sourire :

-Bienvenue chez nous, là où le fric n'a plus d'odeurs.

Je me demande comment on peut être aussi bavard (surtout stupide) et avoir un rang hiérarchique aussi élevé que le sien chez les Ghosts. Sa vantardise va lui jouer de vilains tours. Mais bon, je ne vais pas cracher sur cette source inattendue d'informations que représente sa grande gueule. Grâce à lui, je viens d'obtenir un indice capital.

C'est donc ici qu'arrive l'argent sale et où le gang le blanchit. Armes, drogues et sexe : le tiercé gagnant. De mieux en mieux. Manquerait plus que le trafic d'organes et on serait en plein cliché de série B. Si vraiment ils trempent dans le commerce de membres ou d'organe, je me tire. Je déteste ça. Les macchabées ou les morceaux de personnes, hors de question que j'enquête là-dessus. Moore pourra aller se faire foutre. Javier s'en chargera tout seul.

Je suis Dick à travers le club et en profite pour jeter un regard circulaire en me disant que si maintenant, je dois trouver les livres de comptes et la mère maquerelle, j'ai pas fini de bosser pour les Ghosts. Fais chier. Dès que j'ai l'impression d'avoir progresser, je me rends compte que je n'ai fait qu'effleurer le mur d'obstacles.

On finit par s'installer près d'une estrade et aussitôt une serveuse brune prend nos commandes tandis qu'une rouquine monte sur le podium pour faire son show. Je réponds distraitement aux questions de Dick sans m'épancher et étudie les lieux dans l'éventualité où je devrais revenir ou fuir rapidement.

-Ben alors gamin, elle te plaît pas la p'tite ? Tu préfères les blondes ou p't'être les brunes ? Les mecs ? J'ai rien contre mais...

-Non ça va sans façons, elle est très bien.

-Toi qui voit.

J'essaie de feindre de m'intéresser à la danseuse. Personnellement, je préfère mes gonzesses brunes et surtout consentantes. Je suis certain que la majorité des filles ici n'ont pas fait ce choix de carrière par plaisir. On nous ressert la même chose et après quelques phrases échangées, mon hôte s'excuse pour aller saluer des têtes connues. J'observe alors discrètement les gens de la salle dans l'espoir de pouvoir en identifier quand mon regard croise celui d'un homme dans le reflet du miroir derrière le bar. Il a l'air aussi surpris que moi. De sa main droite, il tapote l'arrête du comptoir, paie sa conso et sort du bar.

Devant mon indifférence totale, la danseuse part vers une autre table réclamer l'attention souhaitée. J'attends un quart d'heure et sort à mon tour. Je marche et deux rues plus loin, je bifurque à droite. Si je m'attendais à voir mon meilleur ami ici à New York.

-T'as toujours joué les princesses désirées. T'abuses, il fait froid.

Avec un sourire, je m'avance et l'enlace.

-Comment tu vas vieux frère ?

-Bien et toi ?

Je jette un regard aux alentours. On ne sait jamais qui peut nous surveiller.

-Bien. Allons discuter un peu plus loin.

-OK, je reste à deux pas d'ici si tu veux.

Je suis Pete jusqu'à sa chambre d'hôtel plutôt classe. En réponse à mon sifflement admiratif, il s'empresse d'ajouter :

-Je suis en ville pour un boulot. Un riche client.

On passe une bonne soirée remplie d'alcool et de « tu te souviens de ». Le tout, entrecoupé par nos rires. La conversation dévie sur des sujets un peu moins drôle. J'apprends que lui aussi a eu son lot de galères. La maladie de sa mère quelques mois avant sa majorité. On se ressemble sur de nombreux points et on se comprend mieux que n'importe qui. Même après toutes ces années passées loin l'un de l'autre, je sais que je peux lui faire confiance comme autrefois.

-Tu as toujours tes doigts de fée en informatique ?

-Je suis là pour quoi à ton avis ?

-J'aurais besoin de tes talents dans quelques jours.

-Je suis toujours dispo pour toi mon frère. Tu veux m'en dire un peu plus ?

-J'ai besoin que tu retrouves des gens depuis des adresses IP. Et que tu pirates un ou deux trucs pour que je puisse récupérer des données bancaires. J'ai pas encore toutes les infos mais je te tiens au jus.

-Rien que ça. T'es sur un gros truc on dirait ?

-Je te le dirais si jamais on trouve ce que je veux.

-Ça va te coûter un bras.

-Mets-le sur mon ardoise, enfin si y'a encore de la place. Je te contacte plus tard.

-Ok. Ça m'a fait plaisir de te voir Eddy.

-Moi aussi.

On s'échange nos coordonnés, on se salue et je repars chez moi pour me coucher. Aujourd'hui, je ne bosse pas. Tout le monde doit être en forme pour ce soir. 




On se retrouve dimanche.

Bonne année, bonne santé, des sous dans le porte monnaie mais surtout tout ce qui vous plait. 🥳🥳🥳🥳🥳

S.

Troublante UsurpationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant