Chapitre 33

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La nuit a été courte pour moi et agité pour Lauren. Tout ça la travaille. Je ne peux pas la blâmer.
Une jeune fille devrait se soucier de problèmes plus futiles liés à son âge, comme trouver un petit ami ou comment cacher des trucs à ses parents.
En aucun cas à comment déjouer les autorités en endossant une fausse identité suite à un achat dans un réseau de trafic humain.

On a paressé toute la journée enfin surtout moi. Je me sens broyé. Grâce aux astuces de filles de Lauren, mon visage a dégonflé et je peux à nouveau ouvrir mon œil. Tant mieux car demain je bosse, même si je donnerais cher pour rester ici avec elle.

Un sms de Pete me ramène à la réalité. Amène-toi. J'attrape ma veste et tape à la porte de la salle de bain.

-Lauren, je dois m'absenter quelques heures. Si tu as besoin, appelles-moi.

-Ça marche. À tout à l'heure.

Quelques minutes plus tard, me voilà devant la porte de la suite de Pete.

-Salut mon frère.

-Salut vieux, je t'écoute.

-Y'a jamais de préliminaire avec toi hein ? Bon, on peut le faire ce soir. D'ici une heure je dirais.

-On a un créneau dans une heure ? Et c'est maintenant que tu m'avertis ? Bref, c'est quoi ton plan ?

-On entre sans se faire prendre, on vole les infos avant de déguerpir vite fait.

-Donc t'as pas de plan.

Je souffle. Comment on peut être un crack comme lui dans son domaine, à faire des programmations, à tout faire dans le détail, dans l'ordre et être aussi laxiste dans la vraie vie ?
J'inspire en faisant une check list mentale de ce qu'il nous faut, avant de lui demander :

-Tu as un plan des lieux ? Les horaires des employés des différents étages ? Le planning des agents de sécurité ? Un accès aux vidéos de surveillance ?

Je le vois se gratter le haut du front. OK..., pourquoi c'est toujours sur moi que retombe ce genre de merdes ?

Je me demande bien si y'a pas quelqu'un tout là-haut qui s'amuse à me mettre des bâtons dans les roues quoi que je fasse.

Mais bon après l'épisode du kidnapping, à quoi je pouvais bien m'attendre d'autre de sa part. Je réfléchis deux secondes à reporter la mission du jour puis me ravise :

-Allez en route, on va faire un peu de reconnaissance avant de voir. Je ne rentre pas à l'aveuglette. Je veux estimer les chances de réussite de l'opération.

On est planqué devant le cabinet depuis plusieurs dizaines de minutes. En silence, je repère et chronomètre les allers et venues. Je sens son regard sur moi depuis le début de la surveillance. N'y tenant plus, je me tourne vers lui et l'interroge avec agacement :

-Quoi ?

-Je ne pensais pas te retrouver un jour et surtout pas maqué.

-Y'a rien entre Lauren et moi.

-Pourtant, vous avez l'air d'un joli petit couple bien pépère.

-Ouais ben non. À ce sujet, je sais que tu m'en dois déjà pas mal, mais j'aurais un petit service à te demander.

-Pas de problème, tu sais que tu peux compter sur moi comme j'ai pu compter sur toi à l'époque. Dis-moi quoi et quand ?

-Ok. On y va dans 10 minutes. Tiens-toi prêt.

Au top départ, on entre dans le bâtiment chic et on monte direct dans l'ascenseur.

-Tu m'expliques ton plan ?

-J'en ai pas.

-Tu déconnes, t'avais l'air tellement sérieux et sûr de toi dans la voiture à guetter je sais pas quoi.

-Ça s'appelle l'assurance, Pete. La preuve, t'y as crû.

Quand l'ascenseur s'arrête, je sors en premier et fais semblant de me diriger vers le bureau mitoyen à celui de Douglas Carlisle puis reviens sur mes pas après avoir croisé un employé.

Pete me sert de cachette tandis que je sors ma pochette contenant mes outils de crochetage. Je suis un peu plus lent que d'ordinaire. Le manque dû à la prise récente de stupéfiant et le manque d'exercice me font perdre un temps précieux.

Quelques secondes plus tard, je referme le plus doucement et silencieusement possible le battant. Je reste près de la porte en verre brouillé, histoire de faire le guet pendant que Pete se charge de la partie informatique.

Je check ma montre toutes les deux minutes. Quand Pete lève son pouce et me rejoins, je souffle de soulagement et ouvre la porte doucement pour passer ma tête.

Et merde, dans le couloir, un peu plus loin, se trouve un couple d'employés en plein badinage, si je prends en compte la mèche de cheveux de la jeune femme avec laquelle les doigts de l'homme jouent et le petit sourire timide qu'elle lui offre en retour.

Pete m'interroge du regard. Je lui fais un non de la tête et consulte à nouveau ma montre. On est encore dans les temps. Enfin je l'espère. Deux minutes supplémentaires s'écoulent quand je repasse ma tête par l'entre bâillement. La jeune femme scrute les alentours avant d'embrasser furtivement l'homme et se sauve aussi vite que ses chaussures à talons le lui permettent. J'aurais pu en rire dans un autre contexte.

J'attends que la voie soit libre et tire sur la veste de Pete. Avec autant d'assurance qu'à l'aller, on repasse devant les agents de sécurité et gagnons la sortie.

Le chemin jusqu'à l'hôtel où loge Pete se fait sans bruits. Une fois dans sa suite, celui-ci se dirige directement vers son ordinateur et y connecte la clé USB. Je ne peux pas m'empêcher de faire les cent pas tel un lion en cage.

-Dis-moi que tu as les numéros de compte ?

-Tu vas finir par me vexer mon frère.

Je le vois froncer les sourcils et analyser le contenu de l'écran.

-Viens voir. Je ne suis pas un expert de la finance mais je crois que ce sont les numéros de compte ouverts dans les paradis fiscaux que tu recherches. Regarde, les sommes sont astronomiques mais bizarrement la commission qui gère les fraudes fiscales n'a émis aucune alerte de surveillance sur ces comptes. Ton gars sait y faire ou alors il a quelqu'un dans la poche.

-Super, tu pourrais en faire une copie ?

-C'est déjà fait. Alors maintenant, parle-moi du petit service que je dois encore te rendre.

-Sans entrer dans les détails, il faut que tu établisses un certificat de mariage plus vrai que nature et ouvrir un compte commun. Je ne veux pas passer par l'administration et la banque, c'est trop de paperasse et j'ai pas le temps.

-Ok, repasse demain avec ta chère et tendre, vos papiers d'identité et on fera ça en un tournemain. Je te dirais bien de rester boire un coup mais quelqu'un t'attend déjà.

Une fois chez moi, l'obscurité, le calme et une bonne odeur sortant du four m'accueillent. Je m'y ferais presque.

Un rai de lumière sous la porte de la chambre m'indique où se trouve Lauren.
Je pousse la porte doucement et la retrouve allongée sur le lit. Elle est sur le ventre, les jambes relevées, la tête se balançant au rythme de la chanson que passe son baladeur mp3. Je lui donne une tape sur le pied. Elle sursaute et manque de tomber du lit. Je retiens un fou rire avant de lui demander avec moquerie une fois ses écouteurs enlevés :

-On mange quand femme ? Je meurs de faim.

-Va te faire foutre Eddy, je ne suis pas ta bonniche.

-Demain, tu le deviendras officiellement, enfin, si tu es toujours d'accord.

Je ris en esquivant les oreillers qu'elle me lance au visage.



Une petite touche de légèretè pour finir ce chapitre.

Les preuves s'accumulent les amis. Êtes-vous prêts à faire tomber un cartel??

On se retrouve dimanche pour un autre chapitre. Bonne fin de semaine à tout le monde.

Bis.

S.

Troublante UsurpationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant