Chapitre 1

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« Plus la patience est grande, plus belle est la vengeance. » Massa Makan Diabaté.

31 décembre 1983.

Dans exactement treize heures cette année ne sera plus qu'un souvenir. J'assiste au dernier serment annuel de Peter, le plus symbolique comme il l'appelle. Je maitrise par cœur les thèmes qu'il aborde, c'est chaque année les mêmes ; l'amour, la joie et le pardon. Je pourrai trouver ça lassant, mais c'est Peter. Il a cette façon de vous captiver... Je pense que même un homme ivre lui prêterait attention.

« Comment pouvons-nous prétendre être heureux si dans notre cœur il y a de la haine ? »

Cette phrase par contre il la répète depuis mes onze ans. Et je sais déjà ce qui va suivre :

« Je ne me lasserai pas de nous le répéter, nourrir de la haine envers quelqu'un ne nuit pas à cette personne mais plutôt à nous ! »

Vas dire ça à ceux qui se sont fait tuer ! Ai-je envie de crier. Peter est probablement la troisième personne que j'admire le plus en ce monde, après mes morts. Le problème est que nous ne sommes pas d'accord sur tout.

C'est pourquoi, j'ai l'impression qu'il s'adresse à moi à chaque fois. En plus son regard est rivé sur moi ! N'est-ce pas une preuve ?

« Alors je vais demander à chacun de se tourner vers son voisin, de le regarder droit dans les yeux et de lui dire : je t'aime, tout le reste n'a pas d'importance ! »

C'est le signal pour Grace, elle se place devant la rangée de la chorale dans sa toge violette, la tête baissée, les doigts entrelacés. Elle stresse.

Comment peut-on stresser quand on a une voix à en faire pleurer un ange ?!

Les lèvres tremblantes, je la vois murmurer une prière avant de se laisser aller à la mélodie que David joue depuis qu'elle s'est levée. Elle se tourne vers son frère puis commence à chanter.

"I want a heart that forgives,
A heart full of love,
A heart with compassion just like yours above"

Au même moment l'assemblée se lève et chacun se tourne vers son voisin. Je me tourne vers mon voisin qui se trouve être Georges Philips.

« Dites lui qu'il compte pour vous ! »

Georges prend mes mains et les rapporte à ses lèvres pour les embrasser. C'est le seul caucasien à qui je pourrai autoriser un tel geste.

− Ma petite Tanny, je veux que tu saches que je t'aime, que tu ne sois pas notre fille ne change rien au fait que pour Margaret et moi, tu es l'ange que Dieu a envoyé pour combler nos vies.

Ses paroles me touchent, cet homme m'a toujours traité avec beaucoup d'affection. Qu'il soit le meilleur ami de Peter ne change en rien le fait que de tous les enfants PEARS, je suis sa préférée. Et j'ai cessé de me poser la question du pourquoi depuis bien des années.

− Georges, tu occupes une place particulière dans ma vie et Dieu sait combien tu comptes pour moi !

Ca n'est pas un mensonge. Cet homme a fait tellement pour moi que je ne pourrai ressentir autre chose que de la tendresse à son égard.

« Louons le Seigneur car il est Amour ! »

L'office est enfin terminé. Et je me dirige vers la sortie, espérant ne pas être retenue par un membre de ma famille. Ce qui est une peine perdue parce que je vois déjà Becky foncer sur moi.

− Tanny, Tanny, Tanny ! Me crie-t-elle.

Je me tourne vers elle, m'efforçant de sourire.

− Il faut que j'y aille Becky...
− Alors là non ! on est le 31, l'hôpital peut bien se passer de toi aujourd'hui ; tiens, Peter essaie de lui faire entendre raison !

Ton plan n'est pas le mien Où les histoires vivent. Découvrez maintenant