156 :

16 1 0
                                    

Si vous n'avez jamais ressenti cela, vous ne pourrez pas comprendre... Quand j'ai commencé à sombrer dans cette douleur et cette noirceur qui me hantaient nuit et jour, je n'avais pas conscience de l'impact que cela pouvait avoir dans ma vie de l'époque, et des répercussions que cela aurait sur le futur. J'avais douze ans à peine... Un âge où, d'après certains adultes, on est trop jeune pour comprendre. La vérité c'est que ce sont eux qui sont trop âgés pour comprendre notre douleur et notre incompréhension vis à vis de ce monde qui nous apparait soudain sous un autre visage... Douze ans, c'est un âge bien trop jeune pour porte seul une si grande douleur sur ces frêles épaules. Douze ans, c'est un âge qui nous fait grandir mais pas pour de bonnes raisons... C'est un âge qui nous fait grandir en nous heurtant violemment... C'est ce qu'il s'est passé pour moi... D'une part j'avais des problèmes familiaux qui me laissait dans un flou total, et d'autre part il y avait les autres qui me percutaient de leur violence. Cela à commencé au collège... D'abord c'était juste des insultes. Des "Grosse vache", "Salope", "Sale Merde", et d'autres noms d'oiseaux que je ne prendrais même pas la peine de vous citer... Puis ces insultes se sont transformés en gestes... Des coups, des bousculades, des portes lâchées en pleine face quand je passais ... Et comme si cela ne suffisait pas, ce triste jeux m'a poursuivit jusqu'à chez moi. Au début, leur grand jeu c'était de sonner, se cacher, m'insulter depuis leur cachette, et recommencer à chaque fois que je fermais la porte... Ce serait vous mentir de dire que je ne paniquais pas... J'étais seule chez moi, ma mère au travail... Et la seule chose qui me sauvait dans ce genre de situation c'était mon téléphone qui me permettait d'appeler mon amie. Après ce jeu tout bonnement stupide, ils ont pris la peine de m'écrire de magnifique déclaration de haine, ravivant chaque fois ma douleur... J'ai aussi eu le droit à des appels anonymes, des messages vocaux... C'est à partir de ce moment là que j'ai décidé de prendre les choses en moins, du moins c'est ce que je pensais... Leur haine tellement forte de ma personne me poussait à me haïr. Comme si la raison de leur rejet venait de moi... Avant cela, je ne les connaissais pas . Ils étaient tous plus âgés que moi, et certains étaient même dans un autre collège que le miens. 

Je ne pouvais pas continuer à les laisser me faire ça... Je n'en pouvais plus. J'avais douze ans, et tout ce que je voulais c'était mourir... Je voulais mourir en emportant avec moi ce lourd et laid fardeau que j'étais. J'en voulais à mon corps, j'en voulais à mon âme et je me détruisais petit à petit . Et un jour j'en ai eu assez, c'était l'insulte de trop. J'ai avalé une plaquette d'anxiolytique en esperant ne pas me réveiller le lendemain... Heureusement cela n'a pas fonctionné... J'étais complètement shooté, mais bel et bien vivante ... Et le pire dans tout ça, c'est que personne dans mon entourage ne s'en est aperçut... Le lendemain j'avais un rendez vous prévu de longue date avec une psychologue amie de ma famille car mes professeurs avaient parlés de ma baisse de moral à ma famille. C'est ce jour là que j'ai décidé que je devais prendre du recul. J'ai donc fait mes valises pour me retrouvé à l'hôpital. J'y suis resté un mois et demi . Un mois et demi où j'ai pu prendre de la distance et du recul sur ma vie, un mois et demi où j'ai laissé mes plaies cicatriser... Un mois et demi de repos intense... Mais dans ce repos, il m'est resté une chose : LE SPORT. Le tapis de course était devenu mon meilleur ami, et mon voisin de chambre -qui fut vraiment un élément essentiel de ma reconstruction- s'était donné pour mission de m'entrainer à devenir plus forte tant mentalement que physiquement... Et ce fut un pari réussit puisque lorsque je sortis les appels anonymes, les insultes, les coups et les bousculades recommencèrent. Seulement, j'étais devenu plus forte. Capable de les affronter. Il est vrai que ça n'a pas été facile. Mais j'ai réussi. Je me souviens parfaitement du premier appel que j'ai reçu, la semaine qui a suivit ma sortie. Deux voix de filles... "- Oui bonjour on vous appelle par rapport à la disparition des baleines...  - Oui... Qu'est ce que je peux faire pour vous ? - AH non mais c'est pour vous prévenir de faire attention  à vous. - En tous cas, les connes ne sont visiblement pas en voie de disparition, ELLES." Et c'est sur cela que j'avais raccroché. Quelques jours plus tard, je me faisais à nouveau tiré les cheveux au collège sans que personne ne le remarque. J'en parlait donc à un surveillant qui en parla lui même à la CPE mais cela ne changea rien. Les choses changèrent seulement lorsqu'un jour, alors que je me faisais encore tirer les cheveux, je balançais une magnifique, merveilleuse gifle à celui qui me tirait les cheveux. C'est uniquement ce jour là que la situation évolua. 

A partir de ce jour, j'avais décidé que plus personne n'aurait le droit de me faire du mal. J'ai toutefois gardé des "réflexes" de ce harcèlement : 

- Je panique quand quelqu'un essaie de m'appeler plusieurs fois sur mon portable.

- Je fuie les lieux publiques.

- Je ne supporte pas la proximité des gens dans la rue ou les transports.

- J'ai énormément de mal à faire confiance.

-J'ai souvent besoin de m'isoler pour "me remettre en phase avec ma vie"

- J'ai gardé des cicatrices tant sur le cœur que sur le corps.

- J'analyse tout. Les bruits, les odeurs, les attitudes.

- J'ai détesté mon corps, et je déteste qu'on me touche donc quand je permet le contact c'est que je fais confiance.

- J'ai perdu énormément de poids

J'ai toutefois choisi dans garder uniquement le positif  :

- Je suis en vie, et c'est la chose la plus importante. 

- J'ai appris beaucoup de choses, comme ; la détermination, le courage, mais aussi et surtout la douceur, la gentillesse, et la bienveillance grâce à tous ceux qui m'ont soutenu dans mon combat. 

Bien sûr, j'ai appris des tonnes d'autres choses, mais il serait trop long de tout raconter ici. Je synthétise énormément. 

J'ai également pris conscience que je n'étais pas un cas isolé, que si cela m'était arrivé à moi, ça pouvait également arrivé à d'autres sans que personne ne s'en aperçoivent. Pour ma part, ma mère n'a appris, et n'a pris conscience de ce harcèlement que deux années après. Elle pensait que mon état était du à mes problèmes familiaux. Je pense que cela prouve bien la discrétion de ce genre de situations, et l'importance de maintenir une constante vigilance concernant ce sujet. Si moi j'ai eu la chance d'y survivre, certains y ont succomber. Le harcèlement est un fléau invisible : discret mais dangereux. Si vous êtes témoins ou victimes de harcèlement, bien que cela soit extrêmement difficile, il faut en parler. 

PenséeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant