Un Autre Monde

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"Je rêvais d'une autre Terre 
Qui resterait un mystère 
Une Terre moins terre à terre 
Oui, je voulais tout foutre en l'air"

-Téléphone


Le conditionnement. Si Deen Burbigo était intelligent, il n'en était pas pour autant un génie. Il comprenait le principe du conditionnement, mais jamais il n'avait pensé qu'être conditionné pouvait être aussi aisé. Il avait été conditionné et il lui avait fallu un moment pour le réaliser. C'est en entrant dans sa cabine de douche sans lancer sa traditionnelle chanson de motivation que la lumière se fit dans son esprit.

Sa chanson de motivation était une habitude qu'il avait prise des années plutôt. Un peu par hasard d'ailleurs. Ce jour là, l'aléatoire de sa playlist avait lancé I Will Always love you de Whitney Houston et dans l'après-midi, il avait cartonné un partiel qu'il n'avait même pas pris la peine de réviser. Depuis, il écoutait cette chanson, chaque fois qu'il entrait dans la douche, persuadé qu'elle lui portait chance. Ça lui avait plutôt bien réussi et en bonus, il adorait cette chanson.

D'ailleurs, il vouait une passion pas si secrète que cela pour les chanteuses à voix. Whitney, Aretta, Céline. Sans oublier Amy, Tina et Nina. Il les aimait toutes.

Mais Whitney avait une place particulière dans son cœur.

Il avait été donc conditionné. En entrant dans sa salle de bain, ce matin-là, il ne fit aucun geste pour lancer sa chanson fétiche. Inconsciemment, il avait réalisé que lorsqu'il ne chantait sur la voix de Whitney, l'eau ne se coupait pas. Mais ce jour-là, la réalisation le frappa fortement.

Deen décida donc de tester sa théorie.

Sortant un seul bras de la cabine pour attrapa son téléphone, il lança sa chanson qui en toute logique se trouvait parmi ses favoris. Plusieurs secondes passèrent sans que rien ne se passe. Considérant, qu'il avait simplement perdu la tête, Deen pris confiance en lui et sa voix recouvra rapidement celle de sa chanteuse préférée. Alors qu'il était sur le point de pousser La Note. L'eau devint froide le forçant un poussé un cri bien trop aigu pour son timbre de voix.

Cette fois, il n'y avait plus aucun doute. Elle était responsable des coupures d'eau dans son n'appartement. D'ailleurs, le filet d'eau froide se tarit lentement avant de simplement disparaît. Comme pour se moquait de lui, un rire étranglé parvint jusqu'à ses oreilles.

C'était bien elle, sa voisine.

-Ça te fait marrer ! Il hurla à l'intention de sa voisine.

Le rire étranglé cessa, le silence repris ses droits, uniquement perturbé par Whitney, qui s'égosillait toujours au travers la barre de son que le rappeur avait installé dans sa salle de bain.

Il balaya ses yeux couvert de mousse. À nouveau, il sortit son bras de la cabine de douche et d'un mouvement lasse, il coupa le son. Ce n'était pas un miracle, mais Deen le prit comme tel. L'eau refit son apparition et il put enfin se débarrasser du savon qui brûlait ses yeux.

La nouvelle voisine.

Il ne l'avait jamais croisé, mais il savait qui elle était. Pendant un temps, elle avait déposé presque quotidiennement des mots sous sa porte d'entrée lui demandant de faire moins de bruit. Il aurait pu s'exécuter et tuer dans l'œuf le conflit qui nous occupera pendant un temps, mais Deen avait senti ses poils de bras se hérisser quand déchiffrant l'écriture de mouche, il comprit qu'elle tentait de lui apprendre « la décence la plus commune ».

Les mots étaient méprisants, et Mikaël Castelle ne supportait pas qu'on se foute de sa gueule. Alors il s'était senti investi d'une mission. Celle de lui montrer quelle était « la décence la plus commune ». En conséquence, il avait donc pris l'habitude de mettre la musique plus fort chaque fois qu'il trouvait l'une de ses fameuses notes.

Il avait attendu des jours durant, que de colère elle ne débarque chez lui, pour voir si elle aurait le courage de réitérer, son mépris textuel de vive voix. Elle n'était jamais venue, à la place, elle avait choisi de le torturer à coup d'eau froide et d'absence d'eau.

Ce comportement appelait la vengeance. Elle venait de lui déclarer la guerre et il ne serait pas en reste. Personne, oh non personne ne se moquait de Deen Burbigo, il allait en faire son quatre heure, son goûter de minuit, les saucisses apéro qu'il appréciait tant. Des images, il en avait plein, mais ce qui était certain, c'est qu'il allait la bouffer tout cru.

Comme tout bon sudiste qui se respecte Deen était à quatre-vingts pour-cent du temps dans l'exagération. Aussi, cette colère qu'il ne parvenait pas à faire redescendre était exagérée et il en payait le prix fort. Il se brûla avec sa machine à café, perdit le compte des papiers qu'il devait glisser dans son sac à dos et enfila trois fois son t-shirt à l'envers. Il parvient tout de même à se préparer et à sortir de chez lui. Sur le palier, il croisa un livreur ubereats qui semblait hésiter entre deux portes.

Des années plutôt, les numéros étaient tombés, il ne comptait plus le nombre de fois où ses visiteurs avaient finit par sonner à la porte d'à côté.

-C'est pour vous la commande.

Le trentenaire eu un mouvement de recul étonné que l'on s'adresse à lui. Puis d'un geste peu sûr, il tendit la main. Sans plus attendre le livreur déposa le sac au nom du restaurateur Thaï du coin de la rue et s'en alla sans plus attendre.

« Louisa Leclerc ». C'était donc ainsi que se nommait sa voisine. Entre nous, c'était pour lui un prénom de sale conne. Jetant un œil à sa montre, il découvrit qu'il était effectivement midi passé. Eff allait l'engueuler, mais il était près à subir les foudres de son ami si cela pouvait lui permettre de prendre une revenche immédiate sur « Louisa ». Reculant d'un pas, il entra à nouveau dans l'appartement, se dirigeant rapidement dans la cuisine.

Elle était peut-être conne la Louisa, mais elle avait bon goût. Le PadThaï était délicieux, finalement, il n'était pas trop triste d'avoir mis autant de temps à se préparer. Manger gratuitement était et serait toujours pour lui une source de plaisir infinie.

Et parce que si elle ne le savait pas provocation n'avait aucun intérêt, il se rendit dans son salon. Là où il savait que le mur communiqué avec l'appartement d'à côté. Il tapa dessus avant de s'exclamer suffisamment fort.

-Il déchire ton PadThaï.

Sans surprise, il n'obtint aucune réponse. Il la savait étrange et ce n'était qu'une confirmation. Il ne l'avait pas croisé une seule fois depuis son arrivée, qu'il avait d'ailleurs estimé à cet été, quand il était encore sur les routes. Ce qui était étrange, ce n'était pas qu'il ne l'avait jamais crois, ce qui était étrange, c'était le défilé de livreurs de toute sorte qui frappés chez elle : course, fringues, plat de restaurant. Elle ne sortait jamais de chez il en était persuadé.

Voler sa nourriture, était un coup qu'il ne manquerait pas de réitérer. Encore une fois manger gratuitement.... Et s'il le faisait régulièrement, il s'en prendrait à sa source de subsistance principale. Oui, il était d'humeur un peu diabolique aujourd'hui, elle l'avait chercher.

Son téléphone, qui vibrait dangereusement dans la poche de son jean depuis un moment, le rappela à l'ordre. Il était plus qu'en retard. Mais il en était sûr, il venait de gagner la première bataille et rien que pour cela, il ne s'excusera pas de son retard.

Deen Burbigo allait jubiler, le reste de l'après-midi et sans doute les jours suivants.

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