Chapitre 8

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J'avais promis une partie à une gentille lectrice sur Facebook pour son anniversaire alors voilà. Hope you enjoyed your day 😘😘😘

Je me prépare machinalement pour aller rendre visite à Ismaïla. J'appréhende un peu cette rencontre vu sa réaction d'hier. En plus, les propos d'Astou m'ont hantée la nuit dernière, m'empêchant de dormir.
Je croyais que j'allais verser un torrent de larmes en quittant la demeure de mes beaux-parents mais non. J'ignore par quelle miracle, je suis rentrée chez moi, pris une douche et je suis retournée à l'hôpital sans une seule larme.
À l'hôpital, j'ai croisé ses meilleurs potes Mahmoud, Moustapha et Bachir en arrivant. Ils sont partis quelques minutes après mon arrivés. Après leur départ, Ismaïla était réticent à me faire la conversation alors j'ai abandonné.
J'avais prévu de passer la nuit avec lui mais Karim est arrivé vers 21h. Il a insisté pour me relever même s'il rentrait tout juste du travail. J'ai abdiqué quand Ismaïla l'a «choisi». Tout en promettant de revenir très tôt pour que Karim puisse se rendre au boulot.
Je me suis posée une tonne de questions, évidemment sans réponses. J'ai peur quant à ma relation avec Ismaïla. Nous devrons tout recommencer à zéro s'il ne recouvre pas rapidement la mémoire. C'est déjà difficile. Très difficile.
Je mets un djellaba beige crème et attache mes cheveux en un chignon bas et discret. Je ne mets pas un temps fou à me préparer. Car malgré l'appréhension, les doutes, la peur, je suis impatiente de revoir mon mari. Il m'a manqué. Il continue à me manquer. Et, aujourd'hui plus qu'hier, je suis follement amoureuse de lui.
Je prends ma voiture pour m'éviter les tracas relatifs aux services d'un taxi. Dakar est la plus petite région du Sénégal mais il me semble que les trois-quarts de la population y résident. Sans surprise, étant donné la forte concentrations des structures industrielles et administratives dans la capitale.
En tout cas, les embouteillages sont infernaux dernièrement avec tous les travaux routiers. Ça n'avance pas depuis plus d'une dizaine de minutes. Dire que je suis sortie tôt juste pour éviter cela. Il faut croire qu'on a tous eu la même idée. Je tapote le volant distraitement en écoutant la radio. Apparemment, le président a fait une bourde vis à vis d'un chef religieux. Ce dernier lui avait gentiment ordonné de fournir des passeports diplomatiques à quelques uns de ses disciples communément appelés Talibés. N'y voyant pas l'intérêt, il a tout aussi gentiment refusé. Cela a choqué plus d'un car les chefs religieux occupent une place importante dans notre société. Ils sont chefs de leurs propres états et le mot non ne leur est jamais destiné. Ils sont des rois et cette royauté nouvelle se transmet de père en fils.
Je suis de ceux qui se proclament «musulman tout court». Au Sénégal, il faut faire partie d'une confrérie religieuse. J'ai un respect profond pour ces érudits. De grands hommes, sans nul doute. Seulement les sénégalais sont toujours dans l'excès. Par exemple, certains talibés trouvent normal de donner la moitié de son salaire à son marabout tandis qu'on ne fait rien pour ses parents. Les souhaits d'un marabout doivent toujours être exaucés. Car, ils sont, selon eux, le chemin menant au paradis.
Ce qui me choque davantage c'est cette division entre musulmans. Des fêtes religieuses célébrées à des dates différentes. Des gens qui se battent. Alors qu'au final tout ce qui compte c'est Allah.
J'ai mes propres opinions sur ce sujet. Néanmoins, j'évite de publiquement les exposer car étant un sujet très sensible. Je n'ai aucune envie de me faire lyncher par des fanatiques.
Un coup porté sur ma vitre me sort de mes pensées et je vois un marchand de journaux. Je lui fais un rapide signe de tête pour lui faire comprendre que je ne suis pas intéressée et lève le pied du frein. Les voitures commencent enfin à circuler. Ce n'était pas trop tôt.
J'arrive à l'hôpital une dizaine de minutes plus tard. Je me dirige vers le bureau du docteur, espérant qu'il puisse me recevoir.  Des yeux, je cherche sa secrétaire qui n'est pas à son poste. Oh well. Je repasserai plus tard.
Je prends le chemin inverse et remarque une certaine agitation chez le personnel, les femmes en particulier. Un petit attroupement s'est même formé un peu plus loin. Si tôt. J'espère juste que ce n'est pas un décès.
En arrivant à leur niveau, je réalise que c'est Zac. En vraie fan, je m'immobilise d'instinct en souriant. Cet homme, je l'adore. Toutes ses chansons, je les connais par cœur.
Le major intervient pour calmer la bande d'hystériques qui s'était formée autour de lui. Il les réprimande et les somme de se remettre au travail. L'espace d'un instant, j'avais même oublié qu'on se trouvait dans un hôpital.
Les blouses blanches se dispersent et on se retrouve presque seuls dans le couloir. Nos yeux se croisent et je ne sais pas trop quoi faire. Il plisse les yeux un instant puis s'adresse à moi.
- Votre visage m'est un peu familier mais, je n'arrive pas à le situer.
Je me rappelle furtivement du meet and greet auquel j'avais assisté grâce à Ismaïla juste avant son accident. Tout allait alors si bien. Ismaïla avait usé de ses relations pour que je puisse rencontrer mon groupe favori de tous les temps.
- Nous nous sommes rencontrés au Meet and Greet qui a eu lieu au King Fahd il y a quelques semaines.
- Aaah. Aysha, c'est bien ça ?
Il jette un regard sur ma main gauche, comme lors de notre première rencontre. Pour Dieu sait quelle raison, mon alliance l'intrigue.
- C'est ça. Vous m'aviez même donné votre numéro.
- Je m'en souviens. Mais, je n'ai jamais reçu un message de vous. Cela m'a étonné vu votre réaction ce jour là.
Il dit sur un ton moqueur qui me fait sourire. C'est vrai que j'étais surexcitée ce jour là. La voix de Zac quand il parle est bien différente de celle quand il chante. Elle est douce et lascive dans ses chansons. Elle est un peu plus rauque en vrai.
- J'admets avoir complètement oublié la présence de ce numéro dans mon répertoire. Désolée.
- Ce n'est rien. Alors, j'espère que tu te portes bien. Ça te dérange qu'on se tutoie ?
- Non. Pas du tout.
- Qu'est-ce qui t'amènes ici ?
Ma tristesse ressurgit.
- Je viens pour mon époux.
Je n'ai pas trop envie de m'epancher sur le sujet, encore moins avec lui. Après tout, il reste un inconnu. Il semble comprendre et hoche la tête tout simplement.
Une porte s'ouvre derrière lui et un médecin en sort accompagné d'une femme âgée qui le  remercie chaleureusement. Puis elle se tourne vers Zac et le présente au docteur comme étant son fils. C'est bizarre de voir qu'en plus d'être des artistes, ils ont aussi des vies, de la famille. On a l'impression de tellement bien les connaître alors qu'on ne sait rien d'eux. Du moins pas vraiment.
Zac me présente brièvement à sa mère et je la salue en souriant.
- Envoie moi un texto quand même un de ces jours, ça me fera plaisir.
Je réponds simplement Incha'Allah.
Le jour du meet and greet j'étais loin de m'imaginer que ma vie changerait à ce point.

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