Chapitre 23

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RESTEZ CHEZ VOUS SI POSSIBLE ET PRENEZ SOIN DE VOUS ♥️ Yalna niou YAllah samal bopam !

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Petite question: Qui est pour Aysha/Smail ? Qui est pour Aysha/Zac ? 🤔

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Le samedi, on se retrouve avec une véritable fête à la maison. Car au lieu d'inviter uniquement ses amis, on a convié tout le bas peuple. Mahmoud et sa femme Hadja, Moustapha, Bachir, Laetitia, Maina et Ameth, Nabou, Karim, Fabi et Babacar, Mansour et même Satou. Âge limite 35 ans, lol.
Il est presque 13h et ils arrivent un à un. Satou et Fabi sont arrivées très tôt pour m'aider dans la confection du repas. Du thiebou niébé, commandé par Bachir. Invité bu effronté nii moussou ma ko guiss. (Trop gonflé le gars)
J'ai choisi de le préparer blanc plutôt qu'avec de la tomate. Rien qu'à l'odeur, je sais que ça va être bon.
Comme il ne reste pas grand chose à faire, j'envoie Fabi et Satou prendre leur douche pendant que je termine. Dès que je mets le riz à cuire dans la marmite, je file en prendre une aussi.
Dans le couloir, je croise Ismaïla qui monte chercher des tapis de prière pour les invités. Il me demande de passer aux filles des tenues pour qu'elles puissent prier avec eux. Je lui en remets avant de m'enfermer dans la salle de bain.
Dès que je sors, j'appelle Satou au téléphone pour m'assurer qu'elle garde un œil sur le riz. Puisqu'elle a déjà vérifié, j'en profite pour prier. Puis, je sors une robe en coton bleue électrique et l'enfile. Ismaïla passe la tête à travers la porte et me trouve en train de mettre mon mouchoir de tête.
- Tu es prête ?
- Oui. J'arrive. Tu as faim ?
- Très.
Il n'a rien mangé depuis ce matin alors je me doute bien qu'il doit avoir la dalle.
- J'ai envie de tester quelque chose, dit-il en ouvrant un tiroir.
Il en sort des boules et me les tend.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Ce sont des boules de geisha. Tu connais ?
- Non.
- Encore mieux. Je veux que tu les mettes.
- Où ça ?
- À ton avis ?
J'ouvre grand la bouche.
- Sérieusement ?
- Oui.
- D'accord, je veux bien essayer. Laisse les sur le lit. On verra ça ce soir.
- Qui a parlé de ce soir ? Mets les maintenant.
Je ris nerveusement.
- On a des invités Smaïl. Tu as oublié ?
- D'autant plus excitant. Ça va être amusant de voir comment tu réagis. Et ça va me faire de l'effet d'être le seul à savoir.
- Mais où tu es allé pêcher cette idée ?
- Tu te souviens quand tu m'as obligé à regarder 50 shades of Grey ? J'ai pris des notes. Donc techniquement, c'est toi qui en demande.
Il dépose un baiser dans ma paume droite avec un regard coquin.
- Alors, t'en dis quoi ?
Je m'entends répondre oui. Si lui est pervers, je ne suis pas loin derrière.
- Lii mo takh nga nekh ma. (C'est pour ça que tu me plais) Toujours cap. Bouge pas, je reviens.
Il court presque dans la salle de bain où j'entends l'eau couler. Il revient, essuie les boules avec une serviette propre et sort un lubrifiant du tiroir.
- Mais c'est que tu étais préparé dis donc.
- T'as vu ?
Il sourit et me demande si je suis prête. Je hoche la tête en soulevant ma robe.
Il fait glisser mon slip en m'écartant légèrement les jambes.
Il insère les boules l'une après l'autre tout doucement. Les avoir en moi me fait me sentir bizarre. Je me sens comment dire, remplie ?
Ismaïla fait remonter mon sous vêtement avec un sourire satisfait. On croise Fabi à la porte de la chambre. Elle venait me chercher pour que je vienne servir. Si seulement elle savait ce que nous faisions.
On se rend ensemble à la cuisine tandis qu'Ismaïla rejoint les invités au salon. Fabi et Satou s'occupent de mettre les nappes et d'emmener les couverts pendant que je sers. Puis avec l'aide de Laetitia, je ramène les plats dans le salon.
Je salue ceux que je n'avais pas encore eu l'occasion de voir. Puis tout le monde prend place autour des bols. On commence à manger mais tout le monde reste silencieux. Pendant un moment, j'ai la boulot au ventre en me demandant ce qui cloche avec le repas. Ma fierté de femme ne supportera pas un flop.
- Sett na ba sett nak mais takk diabar diot neu quoiii, commente Bachir. (Franchement, il est temps de prendre épouse).
Tout le monde éclate de rire.
- Aysha mom daf niu yapp. Genrou togg yii moussou ko togg keur geu, rouspète Fabi. (Aysha ne nous respecte pas, elle n'a jamais fait des plats aussi bons à la maison)
- Mais est-ce que vous avez goûté à la petite chose là à côté ? Demande Moustapha.
J'ai fait une petite confiture de mangue mélangée à du tamarin. C'est une première. D'habitude, je les fait séparément. Ravie que cela plaise.
- Faut que tu me donnes la recette du njambane Aysha, demande Hadja.
- Waw lolou mom dina am solo lolou sakh sokhna si, renforce son mari. (Excellente idée, madame)
- Macha'Allah ! Crie Ismaïla. Vos bouches sur la cuisine de ma femme.
À chaque compliment, je souris. Je suis fière gué. En même temps, il est difficile de le rater ce plat.
Par contre, j'ai beau être là physiquement, mentalement, mon esprit est entre mes jambes. Ce truc, boules de je ne sais pas quoi est en train de me rendre folle. Mon entrejambe est toute humide. Tout au long du déjeuner, je lutte contre l'envie de sauter sur mon mari.
Ça s'empire quand on se croise dans la cuisine pendant qu'on débarrasse et qu'il me donne une tape sur les fesses. Je me suis contractée direct de peur que les boules ne tombent. Je les ai senties vibrer à l'intérieur de moi et j'ai gémis sans le faire exprès.
Seigneur. Je ne sais pas combien de temps je vais tenir.
Après le déjeuner Mansour fait le thé dans la cuisine pendant qu'on reste discuter dans le salon. Bachir et Moustapha animent la conversation en faisant les pitres comme d'habitude. Mahmoud est beaucoup plus calme. Ça doit être dû à la présence de sa femme. J'ai envie de le taquiner un peu mais j'ai un problème tellement plus urgent.
Pire, Ismaïla ne cesse de jeter de l'huile sur le feu. Après que j'ai servi à boire, il m'a attirée à lui pour que je m'assoie sur ses genoux. Et depuis, il ne cesse de me faire des bisous dans le cou tout en me caressant le bras. Résultat : je ne tiens pas en place. Mes orteils s'enfoncent dans le tapis, en pleine lutte. Mon corps le réclame.
Je me tourne vers lui et lui chuchote d'arrêter. Il rit en me faisant remarquer que j'ai les pupilles dilatées.
Il faut que j'aille enlever ces choses avant de faire une bêtise ici. J'essaie de me lever mais il m'arrête.
- Tu vas où ?
- M'occuper du dessert.
- Attends, je viens t'aider.
- Non ! Je veux dire t'inquiètes. Je gère.
Je me lève, lui sur mes talons. Il se plie de rire dès qu'on se retrouve dans la cuisine.
- Tu devrais voir ta tête. Hahaha !
- Ce n'est pas drôle Ismaïla. Enlève moi ce truc. J'en peux plus.
- Je sais. Moi non plus.
- Quoi ?
Il s'approche. Je lève les mains en l'air.
- Hors de question. On a des invités...
Je ne termine pas ma phrase que Satou et Fabi pointent le bout de leur nez. Je suppose qu'elles sont venues aider. J'espère juste qu'elles ne nous ont pas entendu.
- Vous pouvez retourner au salon les filles, Aysha et moi on va s'occuper de tout, propose Ismaïla.
- Mais non. On va vous aider.
- Vous êtes nos invitées, insiste Ismaïla. Aysha et moi on gère. N'est-ce pas bébé ?
Heureusement que ce n'est pas Laetitia. Car elle aurait compris de suite.
- C'est toi qu'on devrait chasser plutôt, renchérit Fabi.
- Ouste j'ai dit.
- Ouste toi même.
Je le regarde d'un air supplicateur. Il hausse les épaules. Il faut que ces trucs sortent de moi. J'ai peur de me mettre à miauler d'un moment à l'autre.
Je sers le dessert sur de petites assiettes, tarte au citron fait maison et des chouquettes achetées à Kabylie. Les filles vont distribuer au salon. Dès que les dernières assiettes sont parties, Ismaïla m'enlace.
- Non...
Il m'embrasse et j'en perds toute ma volonté par la même occasion. Je sens sa main glisser sous ma robe et retirer les boules. J'en soupire de soulagement et de plaisir.
Les voix nous parviennent là où on est. Nous sommes totalement imprudents. Et fermer la porte n'est pas une option. Dieu seul sait comment, j'arrive à le repousser.
- Pas ici.
- Viens.
Il me prend la main et m'entraîne avec lui. Je croyais qu'on allait dans notre chambre mais non. Il ouvre la première porte et s'y engouffre, refermant à clé derrière nous. Non, il n'a pas osé nous enfermer dans les toilettes.
- Tu es complètement fou.
- Je sais.
On ne perd pas de temps en préliminaires. Je défais sa ceinture. Il me soulève et me plaque contre le mur. Je suis tellement lubrifiée que sa verge glisse directement. Je gémis en m'agrippant à lui.
Je ne sais pas si c'est l'effet des boules, ou le fait de faire l'amour alors qu'on a tous nos amis dans la pièce à côté, en tout cas j'ai juste envie de crier. J'ai d'ailleurs du mal à me retenir. Si bien qu'il me plaque une main sur la bouche. Ça a duré quoi ? Quatre minutes ? Mais c'était assurément l'un des meilleurs coups de ma vie. Top 3.
La poignée tourne brusquement. On se fige tous les deux. Heureusement que c'est fermé à clé. La personne toque. Ismaïla me fait signe de ne pas faire de bruit. Difficile, quand tout ce que j'ai envie de faire, c'est crier de plaisir.
La personne finit par s'en aller. On se nettoie rapidement, réarrange nos vêtements avant de sortir à pas de loup.
On essaie de noyer le poisson en retournant dans la cuisine. Là, on éclate de rire tous les deux.
- Ah vous êtes là, dit Fabi. Qu'est-ce qu'il y a ? Vous riez pourquoi ?
- Pour rieeen.
- Tout le monde vous cherche.
- Ouais on arrive.
Il me met les boules dans la main et me demande de les garder. Khay. Je m'empresse de les envelopper dans un mouchoir et de les cacher dans un tiroir. En espérant que personne n'ira farfouiller ici.
Je retourne au salon et m'assois près de Laetitia. Elle me demande où j'étais et je marmonne quelque chose d'incompréhensible avant de lui demander comment ça se passe avec Bachir. Ils sont assis l'un à côté de l'autre. Le bras de Bachir est négligemment posé derrière les épaules de Lae. Elle me chuchote qu'on en parlerait plus tard. Hum.
On continue à discuter jusqu'à l'heure de la prière qu'ils effectuent sous la direction de Mahmoud. Car Ismaïla et moi devont prendre un bain de purification avant.
C'était chaud à expliquer. J'ai subitement prétendu devoir faire la vaisselle, n'écoutant pas mes sœurs quand elles m'ont demandé d'attendre après la prière. Ismaïla leur a demandé de commencer, qu'il les rejoindrait en route.
Je pense qu'ils ont tous compris en fin de compte. Mais ils sont assez gentils pour ne pas nous acculer. Mdrr
Je commence à faire la vaisselle avec Laetitia. Puisque de toute façon je n'ai pas de bonne, c'est une tâche qui m'incombera. Il est d'ailleurs temps d'en trouver une nouvelle. Comme Mr et moi sommes réconciliés.
- Wa pourquoi tu ne pries pas ? Demande curieusement Lae.
- Je vais rattraper après.
- Ça ne m'explique toujours pas. Vous êtes chelous Smaïl et toi. J'espère que vous n'avez pas fait des choses pendant qu'on était tous dans votre salon.
- T'es trop bête. Quelles choses ? Ishh. Raconte moi plutôt. Bachir ? On en est aux bras derrière les épaules.
- Même pas vrai.
- J'ai tout vu meuf. Du coup, t'en es où avec lui ?
- Je ne sais pas Aysha. Il me plaît beaucoup. Je me sens très à l'aise avec lui. Seulement le truc de religion me bloque. Je n'ai pas envie de revivre l'histoire avec Ibou.
- Toujours aucune nouvelle de lui ?
- J'ai posté un statut l'autre jour. Tu sais la photo avec mon nounours. Il a eu le culot de me demander si c'est avec lui que je l'avais remplacé. Je n'ai même pas répondu. Ibou si bopam mo ma yapp. (Il se fiche de moi)
- Je ne sais pas ce qu'ils ont dans la tête. Mais bon, c'est pas parce que ça n'a pas marché avec lui que ça ne marchera pas avec Bachir. Tu lui en parles dès à présent comme ça t'es fixée.
- Je lui en ai déjà parlé.
- Et ?
- Selon lui, cela ne posera pas de problème.
- Alors c'est quoi le problème ?
- J'ai peur boy. En plus, je n'ai plus de temps à perdre.
- Donc attendre qu'un chrétien avec tous les critères se présente ce n'est pas une perte de temps ? Bachir c'est un homme bien. Il dit qu'il est totalement prêt pour le mariage. Il lui faut juste trouver une femme avec qui ça colle. Et il pense que tu pourrais être cette femme. Après la décision te revient.
- Je vais y penser.
- Imagine deux meilleures amies avec deux meilleurs amis. Bul niu yakkal wayow. (Ne gache pas mon fantasme)
Nabou est la première à nous retrouver dans la cour arrière pour proposer son aide. Les choses sont tendues entre nous. Il va me falloir du temps avant de digérer ses bêtises. Elle m'a apporté une boite de gâteaux au fruits en arrivant. Mais ma copine, il va en falloir beaucoup plus.
Pendant qu'on termine la vaisselle, Fabi et Satou servent le goûter. Des amuses bouche. Apparemment, mes invités ont trop mangé parce qu'on finit par le leur emballer à emporter.
La journée se termine sur une bonne note. Babacar prend mon numéro, en promettant de m'appeler. Il veut sûrement une intervention auprès de ma sœur.
Fabi, Satou et Mansour sont les derniers à partir. Je laisse les filles ranger et faire le ménage. Elles me font payer bien sûr. Les arnaqueuses ! J'aurais dû les laisser faire la vaisselle tchip.
Pendant ce temps, j'ai une petite discussion avec Mansour, mon bébé. Il me manque trop. On ne se parle plus autant qu'avant. Je ne sais pas comment se passent ses études ni qui est la fille du moment, rien.
Ismaïla arrive pendant qu'il me fait un résumé et ces messieurs oublient ma présence, parlant aussitôt de sport. Par conséquent, je rejoins les filles. Elles au moins ne vont pas me laisser tomber. Dès que j'arrive, Fabi me lance.
- Chiiii am negn xibaar. (Y a le kongossa)
- Fabi ! Proteste Satou.
- Raconte vite, dis-je en prenant place sur le comptoir.
- Devine à qui on a demandé son numéro.
- Satou ? Noooooooon. Jure !
- Lolou dé mo fi khew si sa guinaw. (C'est ce que tu as raté)
- Mais yow gaw nga dé, se plaint Satou. (T'es trop une commère)
- Chiiii lii évènement leu. Mais racontez vite.
- Moustapha daal mo dieul suniu niméro, fass yener defanté yu baax ak nioune. (C'est Moustapha qui a pris son numéro.)
- Quel Moustapha ?
- Moustapha de ton mari bien sûr.
J'éclate de rire.
- Pour de vrai ?
- J'ai l'air de blaguer ?
- Arrêtez, vous aussi, dit Satou. Ce n'est rien.
- Donc vous pensez que chez moi c'est 1 2 3 love ? Bachir par ci, Moustapha par là, Babacar par là bas...
- Eh sort mon Babacar de ta liste dé.
- Babacr dé, on a échangé nos numéros. Et c'est sûr qu'il va m'appeler pour me parler de ton cas. Alors tu peux d'ores et déjà t'attendre à mon discours.
- Sans façon.
- Fabi, à un moment il va falloir que tu grandisses. Personne n'est prêt pour le mariage. Jamais. Tu te lances avec 90% de foi, c'est tout. Tu es au stade de ta vie où tu penses que tu as le temps. Et lui il en est au stade où il veut fonder une famille. Ça fait deux ans que tu sors avec. Tu ne peux pas me dire que tu ne t'attendais pas à une telle évolution. Si c'était la situation opposée, tu commencerais à lui en vouloir parce qu'il ne t'épouse pas. Ne sois pas égoïste. Sois tu te décides, soit tu le laisses partir. Au pire, donne lui du concret. Qu'il sache exactement combien de temps il doit attendre encore. Qu'il sache s'il peut attendre ou pas.
- Tu n'essaies même pas de te mettre à ma place.
- Si justement. Je sais ce que tu ressens. Pour l'avoir vécu. J'ai fait courir Ismaïla pendant des mois. Mais à un moment, j'ai porté mes ovaires et j'ai sauté le pas. Et franchement, je le referai dans toutes les dimensions. Cependant si au temps, si j'étais persuadée que le mariage ce n'était pas ce que je voulais, je l'aurais laissé partir. Parce qu'il y a une différence entre avoir peur et ne pas vouloir se marier à la personne. À toi de voir lequel des deux c'est.
Elle boude et ne répond pas. Je me concentre sur Satou et lui demande dans quelles circonstances Moustapha lui a demandé son contact. Apparemment, ils se sont parlés au courant de la journée. Et ils ont échangé leurs numéros juste avant de rentrer. Je vais avoir un petit mot avec ce chenapan. Alors comme ça, il drague ma petite sœur sous mon toit. Et puis c'est quoi le délire avec les potes d'Ismaïla qui veulent se partager les membres de ma famille ? Allons seulement.
Après leur corvée rangement, je leur remets à chacune un billet de 10000f. C'est qu'elles me coutent cher ces petites. J'en remets aussi à Mansour en lui demandant de m'appeler, histoire qu'on termine notre conversation. Et les voilà partis, nous laissant seuls.
En guise de dîner, on réchauffe les amuses bouche. On a mangé juste pour la forme. Pour ma part, je me serais contentée d'un verre de jus bien frais.
La soirée se termine calmement. On s'endort dans les bras l'un de l'autre.
Après la prière du matin, on se met à parler au lieu de dormir. Du moins je parle, l'empêchant de dormir.
Il est couché, yeux au plafond, me caressant distraitement.
- Tu penses à quoi ?
- Au bébé.
- Ah.
L'atmosphère se refroidit aussitôt. Depuis le temps, trop concentrée sur ma propre douleur, je n'ai jamais songé à ses sentiments à lui. En réalité, on en a jamais parlé à cœur ouvert. Moi parce que je lui en voulais. Lui certainement parce qu'il ne voulait pas s'enfoncer davantage. Il est peut-être temps de crever l'abcès.
- Il me manque, avoué-je. Je me demande ce que ce serait avec lui ici, en ce moment.
- Moi aussi.
- Tu veux en parler ?
- Je ne sais pas.
- Tu devrais. Depuis, on ne parle que de mes sentiments à moi. Alors que toi aussi tu as perdu ton fils.
- Je me sens coupable bien évidemment. De n'avoir pas été là pour vous deux. D'avoir entièrement raté ta grossesse. D'avoir causé ton accident, indirectement. C'est un poids qui ne s'allège pas avec le temps. Et j'ai toujours voulu que mon premier fils porte le nom de mon père. Cet homme a été tout pour moi. Et je n'ai même pas pu appliquer ne serait-ce qu'un cheveu de l'exemple qu'il m'a montré. Tout le contraire. Finalement, j'ai dû lui donner le nom de mon frère. Pas parce qu'il compte moins mais voilà...
- Je ne peux pas dire que c'est oublié. Mais si je suis là, c'est qu'une partie de moi a pardonné.
Il me serre la main sans un mot.
- Ce que je regrette moi, c'est de ne l'avoir jamais vu. Je ne sais même pas à quoi il ressemblait.
- Il avait ton nez. Et ta petite bouche. C'était un beau bébé. Un petit mélange de nous deux. Je sais que c'est difficile de déterminer à cet âge. Mais je peux t'assurer qu'il nous ressemblait.
Mes yeux se remplissent de larmes.
- Et il aurait été très chanceux de t'avoir comme mère.
Il me serre un peu plus contre lui.
- On en aura d'autres Incha'Allah, dis-je la voix brisée. Et l'un d'eux portera le nom de ton père.
- Oui. S'il plaît à Dieu.
- Je suis désolée aussi.
- Je sais.
Il me fait un bisou sur le front. Et on reste silencieux pendant un long moment.
C'est dur d'avoir cette conversation. C'est une de celles qui a le don de réveiller ce qu'il y a de plus triste en nous.
Seulement, j'ai envie de laisser tout ça dans le passé alors autant en finir une bonne fois.
- J'ai une question.
- Dis moi.
- Il s'est passé quelque chose avec Astou ? Physiquement je veux dire. Mon Dieu, j'arrive pas à croire que je demande ça. Est-ce que tu as couché avec elle ?
Un très très long silence s'en suit. J'en ai la chair de poule. De dégoût. Je me détache de lui et me rassoit.
- On a pas couché ensemble, dit-il aussitôt.
- Parce que tu penses que je vais te croire après ce silence.
- Je cherchais la manière la plus diplomatique de te dire ce qui s'est passé.
- Je n'ai pas besoin de diplomatie. J'ai besoin de la vérité.
Je croyais vouloir crever l'abcès mais je n'étais en réalité pas préparée pour cette éventualité. Je suis énervée et dégoûtée.
- Oh waouh.
- On a pas couché ensemble je te dis. Mais les choses ont un peu dérapé une fois. Une seule fois.
Ma voix monte sans que je puisse la contrôler anymore.
- Tu avais perdu la mémoire Ismaïla, pas ton esprit. Tout ce manque de respect ce n'était pas une perte de mémoire. Tu l'as fait sciemment. D'accord, je ne représentais rien pour toi. Mais tu aurais dû avoir du respect envers ta femme parce que tu te savais être un homme marié. Ça, ça veut dire que tu peux me tromper à tout moment.
- Absolument aucun rapport. Pourquoi je te tromperais ? Qu'est-ce que je vais aller chercher ailleurs que tu n'as pas déjà ?
- Ce que tu es allé chercher chez Astou.
- Ce n'est pas pareil.
- En quoi est-ce que c'est différent ? Tu... Argghhh !
Je me prends la tête dans la main, prête à exploser.
- Bébé, toi aussi...
Il pose sa main sur mon avant bras en un geste calmant. Je retire mon bras sans ménagement et me lève, croisant les bras sur ma poitrine.
- Aysha. S'il te plaît.
- Tu penses que ça me fait plaisir d'entendre que tu as presque couché avec une autre femme.
- Évidemment que non. Mais tu aurais préféré que je te mente ? Encore une fois, le mal est déjà fait. Je n'ai absolument aucune excuse. Mais crois-moi, ça ne se reproduira plus. On essaie d'avancer là. Nous disputer à cause de ça, c'est faire un pas en arrière.
Pffff.
- Je vais prendre ma douche.
Je m'enferme dans la salle de bain en claquant la porte. De grands mots pour finir par claquer la porte.
J'ai envie de leur casser la gueule à lui et à Astou. S'ils avaient couché ensemble, je ne suis pas sûre que j'aurais pu passer outre. Je regrette d'avoir demandé. J'aurais encore préféré ne rien savoir.
Je prends une longue douche sans arriver à me détendre pour autant. Quand je reviens dans la chambre, Ismaïla est sur sa tablette. Je lui demande sèchement ce qu'il veut manger pour le petit-déjeuner. Il me demande de ne pas m'en faire, qu'il se fera un café après avoir pris une douche.
Je descends dans la cuisine et lui prépare des tartines de nutella et un café. Il m'énerve tropppp. Je devrais mettre de la colle pour rat tchip.
Kuy perte ? (Et qui va y perdre ?) me demande sournoisement ma conscience.
Je vais mettre du sel dans son café ! Ça lui apprendra. Sauf que ça risque d'être drôle et je n'ai pas envie de rire.
Le problème avec le pardon c'est qu'on est obligé de tout pardonner. Ça m'apprendra à poser des questions dont je ne veux pas entendre les réponses.
L'appétit coupé, je me contente d'un verre de jus. Ismaïla me retrouve dans la cuisine, je lui tend son plateau de petit-déjeuner sans un mot.
- T'as déjà mangé toi ?
- J'ai pas faim.
- Mange avec moi, s'il te plaît.
- Je n'ai pas faim, merci. Tu veux quoi pour le déjeuner ?
- Est-ce qu'il reste du riz d'hier ?
- Oui.
- Ce sera parfait pour moi.
- Ok.
Je m'installe dans le salon et ouvre mon application Wattpad. Il est peut-être temps de me mettre à jour sur mes chroniques.
Ismaïla me rejoint quelques minutes plus tard et allume sa playstation. On reste ensemble sans vraiment l'être, chacun perdu dans son monde.
À 13h30, je réchauffe le déjeuner. Il essaie de me faire la conversation puis finit par abandonner. Il me propose d'aller à la plage mais je lui demande d'attendre la fin de la soirée.
On se replonge dans le silence pendant un bon moment. Lui jouant toujours, moi sur mon téléphone.
À un moment donné, son téléphone sonne. Il décroche, répond par monosyllabes et termine en disant qu'il passerait.
Il se lève et disparaît en haut. Pendant son absence, Zac m'appelle. Il m'accuse de l'avoir abandonné. J'avais complètement oublié de le rappeler en réalité. Entre les tensions et la réconciliation, je ne savais plus où donner de la tête.
Il m'informe que les photos du shooting sont prêtes depuis quelques jours et m'invite à passer les voir avant qu'elles ne soient publiées. J'hésite parce que monsieur va encore me faire la tête. Mais en même temps c'est le fruit de mon travail, il va bien falloir que j'y jette un coup d'œil.
Ismaïla redescend tout habillé et parfumé.
- Je sors. Je reviens bientôt.
- D'accord.
En temps normal, j'aurais demandé où il va etc. Mais là...
- Attends.
Il s'arrête.
- Les photos du shooting sont prêtes . J'aimerais aller les voir tout à l'heure.
- D'accord.
Aussi simple que ça ? Même pas un soupir ? Eh bin.
Il s'en va me laissant perplexe. Je rappelle Zac et confirme. On décide de se voir en ville à 18h.
L'après-midi passe rapidement. Vers 17h, je me maquille légèrement et prends même le temps de me coiffer, bun et baby hair on fleek. Puis, direction le Pullman.
Je retrouve Zac au bord de la piscine. Il est habillé en jeans bleu et chemise en jean sur les même ton. Ça lui va bien. Et non, je ne suis pas en train de le reluquer. J'apprécie juste sa tenue.
Ça me fait penser que je n'ai jamais vu Ismaïla avec une chemise en jean. Il faut que je lui en trouve. Je suis sûre que ça va bien lui aller.
On se fait la bise puis je prends place près de lui. Il fait signe au serveur. Je commande un mojito sans même consulter la carte.
- Alors ces photos ? Pas trop un désastre ?
- Elles sont mais topissimes.
- Ah ouais ? Pourquoi j'ai l'impression que tu sugarcoat les choses ?
- Juge par toi même.
Il tourne l'écran de l'ordinateur vers moi. Très sincèrement, je suis surprise du résultat. C'est vrai que les photos ont été retouchées. Mais, quand bien même.
- C'est moi ça ? Plaisanté-je.
- Laisse-moi vérifier.
Il me prend par le menton, ne fait tourner la tête plusieurs fois en regardant l'écran en même temps, me faisant rire.
- Ah on dirait bien. Ou peut-être que c'est ta jumelle audacieuse.
Je fais défiler les images et m'exclame :
- Mais ça en jette !
Il se moque de moi
- Tu doutais ?
- Beaucoup à vrai dire. Surtout que Boub's ne m'a pas laissé regarder la dernière fois. Les photos avec Papi sont grave belles en plus.
- Tu te sous estimais trop. J'ai l'œil, je te dis. Je devrais me reconvertir d'ailleurs. Et ouvrir une agence de mannequinat.
- Tu devrais !
- Et toi, ça te dirait d'en faire un métier ?
- Mounii ? Mdr Zac bayima ! ( Sois sérieux Zac)
- Mais qu'est-ce qui t'en empêcherais ? Tu es photogénique. Tu es absolument magnifique sur les photos. Et mieux en vrai en plus.
- Chiii c'est pas mon truc. Tu ne peux même pas imaginer à quel point j'ai stressé lors de la séance. Façon, j'ai déjà un métier. Il faut juste que je trouve du boulot.
- Oui mais l'un n'empêche pas l'autre.
- Oublie ça. En plus, je suis mariée.
- Parce que tu crois que tous les mannequins sont célibataires ? Et puis ton mari ne vit pas à l'âge de pierre. Il ne va quand même pas s'opposer à ce que tu fasses un travail dans lequel tu excelles clairement. Ou si ?
- Laisse moi trouver un travail dans mon domaine.
- Tu as fait gestion c'est ça ? Pourtant la demande est là. Comment ça se fait que tu sois au chômage ?
- Tout simplement parce que je refusais d'être pistonnée. Puis,il y a eu tous ces incidents et je n'ai pas eu le temps de chercher. Mais je crois qu'il est temps que je redescende sur terre.
- Le pays fonctionne ainsi. Tu marches avec ou tu coules toute seule. En tout cas, si tu as besoin de contacts, je t'apporte volontiers mon aide. Et surtout si tu changes d'avis pour le mannequinat, il suffit de me passer un coup de fil. Je te décroche un contrat dans l'heure. Tu as du talent pour ça. Et ce serait dommage de le gâcher.
- Je garde ça en tête, merci.
On défile pendant un moment en commentant les photos une par une. C'est que je ne me sens plus. Qui l'eut cru ?
- Parlons plus sérieusement maintenant. Je sais que tu ne veux pas être payée. Mais il est hors de question que tu fasses un si bon boulot sans rémunération.
- C'est ma manière à moi de te remercier pour tout ton soutien.
- Quel soutien ? Nekkal nitt waay (sois sérieuse). Si j'accepte, ce serait malhonnête. De l'exploitation pure et dure.
- On en a déjà parlé Zacharia. C'est un cadeau. De moi à toi. Tu vas refuser un cadeau de ma part ?
- Et toi tu vas refuser un de ma part ? Considère que c'est un cadeau aussi.
On argumente là dessus pendant quelques minutes jusqu'à ce que je le force à changer de sujet.
Comme d'habitude, je me sens bien avec lui. On a la conversation facile.
- Bon pour en revenir à ton cachet.
- Zac sérieusement tu commences à me saouler avec ça. Khana do degg ? Je l'ai fait avec plaisir. Je ne veux pas de ton argent. Seugn bi T ma la ka wax si hindou bok ? (Tu veux que je le dise en hindi ?)
- Mais j'ai envie de te faire plaisir moi aussi.
- C'est super simple. Chante.
- Pour de vrai ?
- Bah oui.
Il se lève, s'entretient avec quelques membres du personnel. On lui remet un micro, et aussi simplement que ça, il s'improvise une scène.
- Bonsoir à tous. Je m'appelle Zac. Ce n'était absolument pas prévu au programme. Cependant, j'aimerais vous chanter une chanson. Une chanson que je dédie à une personne très spéciale à mon cœur.
Je souris comme une idiote.
- Sama mbeuguel thi yow...
Wessou na lu niuy comprendre
Dama doff si yow
Man sakh daf meu surprendre
Sama xol ngi teuf teuf si yow
Bayil samey dieuf wone la ko...

FlammeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant