Chapitre 10

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24 Janvier 1356

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24 Janvier 1356

Un étrange calme avait envahi la cour depuis le départ du roi et de sa troupe pour le tournoi. Les joutes se déroulaient à Greenwich Palace construit en 1447 par Humphrey de Lancastre à Greenwich, sur les bords de la Tamise, en aval de Londres. Il était surnommé Palais de Placentia et était l'une des résidences favorites du roi Henry VIII. C'est dans ce lieu qu'Anne Boleyn donna naissance à la princesse Elizabeth en 1533.

En cet après-midi du vingt-quatre janvier le temps était clément et les rayons du soleil filtraient à travers les vitraux venant réchauffer les cœurs. La plupart de la cour de la reine était partie assister au tournoi, ne restait plus au palais que Félicité, le musicien Mark Smeaton, Madge Shelton et la reine Anne. Paisiblement installés dans les appartements de la reine, les jeunes femmes étaient en train de broder bercées par les douces mélodies jouées par Mark Smeaton.

-J'ai entendue dire que Monsieur Sharpe allait porter vos faveurs durant le tournoi Lady Hastings, es-ce vrai ? S'enquit Madge en souriant.

Anne releva les yeux de son ouvrage pour venir regarder Félicité qui sentie le rouge lui monter aux joues.

-C'est exact. Répondit-elle.

Madge souris malicieusement avant de renchérir:

-Il me semblait bien avoir remarqué vos regards amouraché ! C'est très symbolique vous savez ? Je suppose que le roi porte vos valeurs Majestée ?

-Non. Répondit Anne en replongeant dans son ouvrage mettant fin à la conversation.

Félicité et Madge échangèrent un regard en silence lourd de sens avant de l'imiter. Félicite repris le travail de sa broderie. Elle tentait de représenter sur un tissus le motif des lettres H&A entrelacées symbolisant l'union d'Henry et Anne. Elle comptait offrir ce mouchoir au bébé lorsqu'il serait né. Malheureusement, la jeune fille peinait à broder et faire ses points si bien que le motif ne ressemblait pas à grand chose. Elle s'entraînait souvent le soir à la lumière des bougies afin de réussir.

Alors que la jeune femme se concentrait afin de faire un point de croix un vacarme assourdissant la fit sursauter et elle se piqua le doigt avec l'aiguille. Elle réprima un juron et laissa son ouvrage tomber au sol. Anne se redressa un sentiment d'inquiétude plaqué sur son visage, Mark Smeaton cessa de jouer et tous les regards se tournèrent vers la porte ou des bruits de pas précipités se faisaient entendre.

La porte s'ouvrit dans un fracas laissant apparaître Thomas Howard, le duc de Norfolk et oncle de la reine par sa mère Elizabeth Howard. La mine sombre qu'arborait l'homme ne présageait rien de bon. Le visage fermé, il pénétra dans la pièce et marcha droit vers sa nièce avant de s'incliner devant elle. La relation entre Anne Boleyn et Thomas Howard n'avait rien de cordiale, en effet les deux se détestaient respectivement. La présence d'un éminent membre de sa famille à la cour n'était d'aucun soutient pour Anne. Le duc de Norfolk était un homme ambitieux et impitoyable. Il avait activement participé à la chute du cardinal Thomas Wolsey et effectuait des missions diplomatiques pour le roi.

-Mon oncle ? S'enquit Anne blême, que ce passe t-il ?

Le duc de Norfolk retira son chapeau dévoilant un crâne dégarnit et la regarda dans les yeux la mine sombre avant de répondre trois mots. Trois mots qui résonnèrent dans la pièce comme un coup de tonnerre et traversèrent le cœur d'Anne comme un coup de poignard. Trois mots qui ébranlèrent l'Europe toute entière.

-C'est le roi.

Anne posa la main sur son ventre et recula, sa respiration s'accélérant à mesure que la nouvelle prenait de l'ampleur dans son esprit.

-Sa majesté à été touché durant les joutes, il est tombé de cheval et à perdu connaissance mais vous ne devez pas vous inquiéter. Continua t-il.

-Non non non ! Gémit Anne en s'effondrant.

Félicite courue vers elle pour la soutenir avant qu'elle ne s'écroule au sol et la serra contre elle. Anne murmurait des paroles incompréhensibles des larmes roulant sur ses joues. Elle s'accrochait désespérément à Félicité comme à un phare, un repaire dans l'obscurité.

-Pensez à votre enfant, vous devez vous ménager. Dit Norfolk d'une voie grave.

Mais Anne ne l'écoutait pas, si le roi venait à mourir ce serait la fin pour elle. Elle tomberait en disgrâce, sa position ainsi que celle de sa fille deviendrait délicate, elles ne comptaient personne pour les défendrent. Sans la protection du roi, elles étaient à la merci de tous les nobles assoiffés de pouvoir. Dans un monde dirigé par les hommes et pour les hommes, elles n'avaient aucunes chances.

Si le roi venait à mourir, le seul rempart d'Anne face à la disgrâce serait de mettre au monde un fils qui succéderait à son père. A nouveau, son sort reposait sur son ventre rond et l'espoir qu'il s'agisse d'un garçon.

-Ethan Sharpe se trouve aux côtés du roi, il nous avertira de l'état de sa Majesté. Déclara Norfolk.

-N'y à t-il rien que nous puissions faire ? S'enquit Félicité en berçant Anne.

-Attendre. Répondit-il.

La jeune femme se mordit la lèvre et contempla la reine impuissante. Elle détestait cette situation de spectatrice cela ne lui rappelait que trop bien leur fragilité face à la vie. Cependant elle ne devait rien laisser paraître et se montrer forte afin de soutenir la reine dans cette épreuve.

Un sentiment d'angoisse s'empara de Félicité alors qu'elle repensait à l'histoire des Tudors qu'elle connaissait, était-elle en train de la revivre ou bien ne faisait-elle que l'imaginer ? L'important était qu'elle se trouvait à cet endroit en cet instant précis et peut-être était-ce pour cela. Pour modifier l'histoire. Sa mère lui répétait souvent que les choses arrivaient pour une raison, que tout avait une place dans l'univers et un but à accomplir, une raison d'être. Alors peut-être que la raison de sa présence ici résidait dans ses paroles et que son but était de réécrire l'histoire.

C'est sur cette pensée qu'elle aida la reine à se relever et qu'elle tenta de la rassurer.

-Venez Majestée allons prier pour le roi.
Proposa t-elle.

Anne acquiesça et Félicite saisit son bras pour la soutenir sur le chemin les menant à la chapelle. La foi prenait une place importante dans la vie des gens de l'époque, ils étaient animés par une ferveur religieuse.

La spiritualité d'Anne avait été grandement influencé par la reine Claude et Marguerite d'Angoulême, qui était une figure bien connue à la Renaissance et avait de fortes opinions religieuses. Anne était une femme de la renaissance exposée aux idées nouvelles qui se développait. Si elle avait été élevé dans la foi catholique traditionnelle, elle avait découvert en France les idées réformistes de Marthin Luther et avait soutenu les reforme ouvrant la voie au protestantisme en Angleterre.

La réforme protestante est née du rejet des orientations prises par le catholicisme. En ce début du 16ème siècle, l'église était corrompu et les prêtres menaient une vie de débauche. Anne Boleyn s'alliera avec le dévoué Thomas Cromwell, un des principaux acteurs de la Réforme en Angleterre. Ensemble ils participeront à la dissolution des monastères et œuvrerons pour installer le protestantisme en Angleterre. Cette nouvelle religion rejette l'autorité du pape et place le roi en dessous de Dieu. Elle repose sur les textes sacrés, à savoir la Bible, uniquement constituée de l'Ancien et du Nouveau Testament. Le protestantisme conserve une majeure partie des pratiques catholique ainsi que la foi en Dieu.

En arrivant dans la chapelle, Anne s'avança jusqu'à l'autel ou elle releva les pans de sa robe pour venir s'incliner devant la croix. Aussitôt, ses dames de compagnies l'imitèrent et se mirent à genoux derrière elle, joignant leur mains, priant avec ferveur pour le roi.

L'attente semblait durer une éternité. Les secondes se transformaient en minutes, les minutes en heures et chaque heures étaient aussi longue qu'une journée. Prostrées dans la chapelle, elles perdirent la notion du temps. Elles étaient réduite à attendre une nouvelle qui permettrait à la vie de reprendre son cour. Le soleil qui filtrait à travers les vitraux ne parvenait pas à réchauffer la reine en proie à une profonde agitation. Agenouillée sous la figure de dieu, elle tenait fermement son chapelet entre ses mains devant son visage, ses lèvres murmurant sans cesse des prières.

Comme il est cruel que du sors d'un seul homme dépende tant de choses.

A la cour d'Angleterre, c'est Henry VIII qui fait la pluie et le beau temps. Les membres de son entourage vivaient dans la peur en permanence, leur sors dépendait de l'humeur de leur souverain. Paranoïaque, Henry écoutait toutes les médisances sur ses courtisans et n'attendait pas d'avoir des preuves pour agir en cas de soupçons. Henry considérait qu'il était au dessus de tous, il aimait être courtiser et flatter. Pour perdurer à la cour, il faut allier ruse et politique mais tout en parvenant à rester dans les bonnes grâces du roi. Il suffisait d'un rien pour qu'un homme parvenu au sommet se retrouve plus bas que terre du jour au lendemain, dépourvu de ses titres et disgracié. Nombre des membres de l'entourage du roi, ses amis proches, avaient expérimenté le déplaisir du roi. Thomas Wosley, l'homme de main d'Henry,son conseiller et son confident n'avait-il pas été destitué pour avoir failli à faire annuler son divorce avec Catherine d'Aragon ? Et thomas more qui lui avait succédé n'avait-il pas également été arrêté pour s'être opposé à la volonté du roi en refusant de signer l'acte de succession? Tout deux l'avaient payés de leur vie et reposaient en paix à présent.

Aujourd'hui, du sort d'Henry dépendait l'avenir d'Anne ainsi que de toute l'Angleterre.

Au bout de ce qui sembla une éternité, des bruits de pas précipités vinrent briser le silence de mort qui régnait dans la chapelle. Ethan apparut alors et la reine se leva la peur lui tordant les entrailles, elle s'attendait au pire. Félicité s'approcha de la reine afin de la soutenir en cas de choc.

-Sa majesté est saine et sauve !
Annonça t-il.

-Dieux soit loué ! S'écria Anne en tombant à genoux pour faire le signe de croix.

-Nous venons de rentrer, Il se trouve en ce moment même avec les médecins. Poursuivit-il.

-Emmenez-moi le voir. Ordonna Anne en se relevant.

Ethan acquiesça et les guida à travers les longues galeries de Greenwich palace pour les conduire aux appartements du roi. Anne et Félicité le suivaient d'un pas précipité.
Avant qu'Ethan ou les gardes n'aient le temps de frapper pour annoncer leur arrivée, Anne ouvrit la porte et s'engouffra à l'intérieur de la chambre avant de pousser un hurlement.

-Oh mon dieu ! Qu'es ce que cela ?!

Avant qu'Ethan ou Félicité n'ait le temps d'esquisser un mouvement, Anne claqua rageusement la porte les empêchant d'assister à la scène qui se déroulait de l'autre côté, seuls les cris d'Anne leur parvenait.

-Alors que je mourrais d'inquiétude pour vous je vous retrouve batifolant avec maîtresse Seymour ! S'époumona t-elle.

Au moment ou elle prononçait ses mots, la porte adjacente à celle par laquelle la reine venait d'entrer s'ouvrit laissant apparaître Jane Seymour qui fila sans demander son reste.
Félicité voulut intervenir mais Ethan la retenu en lui intimant de rester la, c'était une affaire à régler entre le roi et la reine. Son corps bloquant la route de la jeune femme, il sortit de sa poche le bout de tissu qu'elle lui avait donnée la veille. Peu d'humeur à batifoler avec le jeune homme, elle lui arrache le tissu des mains et s'apprêtait à répliquer lorsque sa voie fut couverte par celle d'Anne.

-Pourquoi faites-vous cela ?!

Bientôt, les cris furent remplacés par des sanglots. La reine était hystérique, elle hurlait, pleurait, frappait du poing sur la table. Chacun de ses cris résonnaient dans les couloirs du château et se répercutait sur les murs comme un écho. Félicité aurait voulue la rejoindre mais le torse musclé d'Ethan lui bloquait la route, la maintenant de leur côté de la porte.

-Il n'y a rien que vous pourrez faire. La raisonna t-il. C'est une affaire qui les concernent. 

Épuisée par cette journée dont elle ne voyait plus la fin Félicité se laissa aller contre le jeune homme oubliant leur différent pour se réfugier dans ses bras. Elle ne voulait plus penser, seulement apprécier la chaleur du corps du jeune homme contre le sien et ses bras rassurant qui se refermèrent sur elle après un moment d'hésitation.

De l'autre côté de la porte, les cris avaient cessés plongeant le palais dans le silence. Au bout de quelques minutes, la porte s'ouvrit interrompant le moment partagé entre Ethan et Félicité qui se sépara aussitôt du jeune homme pour se placer à une distance respectable.

Henry apparût soutenant Anne dont le visage reflétait l'agonie dans laquelle elle se trouvait. Ses cheveux étaient défaits et son visage rougis par les larmes qui l'avaient ravagés. Aussitôt, Félicité s'avança vers la reine pour l'aider.

-Sa Majestée à besoin de repos. Emmenez-là dans ses appartements et veillez sur elle. Ordonna le roi sans état d'âme.

Félicité s'inclina et emmena la reine dans ses appartements sans jeter un regard vers Ethan. Après l'avoir dévêtue et mise en robe de chambre, la jeune femme s'apprêta à l'aider à s'allonger lorsque la reine la repoussa, trop digne pour se permettre de laisser tomber son masque devant quiconque. Elle se glissa dans les couvertures le cœur lourd tandis qu'un serviteur entretenait le feu. Il y avait bien longtemps que le roi ne venait plus réchauffer son lit et la place vide à ses côtés restait froide.

Inquiète, Félicité veilla sur la reine jusqu'à ce qu'elle parvienne à s'endormir, rêvant d'un temps ou Henry avait remué ciel et terre pour elle. Un temps d'idylle et pleins de promesse, de passion dévorante et d'une frustrante attente. Durant sept ans il l'avait désiré, durant sept ans il s'était battue pour pouvoir l'épouser. Et voilà qu'à peine trois ans après leur mariage leur relation se dégradait. De ses amants fougueux et passionnaient il ne restait rien.

Et tandis qu'elle s'endormait seule dans ses appartements, le roi lui se perdait dans d'autre lits.

Et tandis qu'elle s'endormait seule dans ses appartements, le roi lui se perdait dans d'autre lits

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