8 janvier 1536
La première nouvelle de l'année tomba le 8 janvier lorsque l'on annonça au roi le décès de Catherine d'Aragon ayant succombé à la maladie. Avant de mourir, elle avait adressée une dernière lettre au roi dans laquelle et lui assurait son amour et lui pardonnait les horribles traitements qu'il lui avait infligé. Loin d'être dévasté par le chagrin, le roi ignora ses dernières supplications et l'ancienne reine fut enterrée en tant que princesse douanière privée de tous le cérémonial royal. Pire que cela, le roi avait organisé une fête pour célébrer sa mort.
Félicité s'était levée à l'aube afin de préparer la reine Anne pour l'occasion. Depuis le nouvel an, on avait plus revue Margaret Shelton qui avait été renvoyée du service de la reine pour une raison inconnue. Depuis, plus personne à la cour d'Anne ne parlait d'elle, comme si elle n'avait jamais existé.
Félicité finissait de lacer le corset de la reine lorsque celle-ci prit la parole.
-Apportez moi ma robe jaune, je souhaite la porter aujourd'hui. Annonça t-elle.
Félicité releva la tête vers la reine et la regarda un instant hésitante.
-La jaune majestéz ? S'enquit-elle. Vous êtes sûre ?
Le jaune était la couleur attribuée à la joie, à la fête et au soleil. Elle permettait d'égayer un univers et de la faire rayonner. C'était une couleur chaleureuse peu adapter pour les périodes de deuil tant cela revenait à f aire une démonstration de joie publique. Bien qu'il était de notoriété qu'Anne n'avait aucune empathie pour l'ancienne reine, il serait déplacé et de mauvais goût de continuer à insulter sa mémoire alors que son corps n'était six pieds sous terre que depuis la veille.
-La vie continue Lady Hastings, elle vaincra toujours sur la mort. Et nous avons des nouvelles à célébrer.
Afin de ne pas froisser la reine, la jeune femme alla chercher la robe et aida la reine à se parer.
-Quelles nouvelles Majestée ? S'enquit-elle.
-Un heureux événement. Répondit-elle en souriant, la main posée sur son ventre.
La jeune femme la regarda avant de reprendre la parole.
-Vous ... vous attendez un enfant ?
-Nous sommes à l'aube d'un âge d'or Lady Hastings. Souris la reine. Avec la mort de Catherine désormais plus personne ne pourra contester ma légitimité en tant que reine ni le fait que mon fils sera l'héritier du trône d'Angleterre.
La joie qui illuminait le visage de la reine semblait la rajeunir, libérée de ces tourments la jeune femme pouvait enfin respirer. Désormais leur avenir était assuré.
Félicité rendit son sourire à la reine.
-Je prie de tout cœur pour un fils votre Majesté.
Anne serra sa main et acquiesça.
-Pressons nous on nous risquons d'être en retard.
La jeune femme acquiesça et se remit au travail. La robe était d'une couleur jaune dorée brodée d'or sur le corset, la jupe et sur le bout des manches. A la tenue venait s'ajouter un chapeau de la même couleur en éventail placé sur le côté droit de la tête ainsi qu'une barre dorée formant un cœur maintenant le tout en place encadrant la tête. La reine avait choisie une parure de bijoux simple et élégante avec un collier en croissant de lune avec des perles et des boucles d'oreilles assorties. Félicité appréciait les tâches qui lui était confiées, elle était en permanence auprès de la reine et son admiration pour elle ne cessait de croire à mesure qu'elle découvrait les différents aspects d'Anne. Solitaire, elle ne laissait rien paraître de ses émotions et affichait toujours un masque impénétrable. Elle était d'une intelligence remarquable et incroyablement cultivée, elle excellait dans l'art de la danse et maîtrisait parfaitement le français. D'un naturel enjouée, elle aimait les plaisirs de la vie et profitait pleinement de sa position en tant que reine. Elle était sûrement la seule personne à la cour à oser tenir tête à Henry et lui dire non ce qui occasionnait de nombreux conflits entre les deux. Mais malgré cela, leur relation avaient beau avoir des hauts et des bas, ils se disputaient puis se réconciliaient.
Depuis son arrivée à la cours quelques semaines plus tôt, elle s'était rapprochée de la reine qui avait tout de suite apprécié l'esprit de Félicité et son goût. Souvent, c'est vers elle que la reine se tournait pour lui demander son avis et elle avait acquis une place de choix à ses côtés.
-Vous plaisez vous à la cour ? S'enquit Anne.
-Votre majesté m'honore de me permettre de la servir, nul doute que la cour m'enchante un peu plus chaque jours. Répondit Félicité.
Anne souris et remercia la jeune femme avant de se lever et d'observer son reflet dans le miroir, ses longs cheveux de jais était ramenés sur le côté droit et tombaient en boucles délicates sur son corset. Sa robe étincelait au soleil et elle renvoyait une aura de puissance et de royauté.
-Nous pouvons y aller. Déclara t-elle.
Lorsque le roi et la reine firent leur entrée dans les jardins de Hampton Court, tout les convives se turent et observèrent le couple royal. Vêtus tout deux de jaune, le roi tenait son épouse par la main et la guidait à travers une magnifique allée composée d'arbres ifs superbement sculptés. Une fontaine se trouvait au centre de l'allée suivi d'un grand canal appelait Long Water où il était possible de voir des cygnes paresser au soleil. Tandis que le couple royal progressait suivit de près par leur suite, les courtisans commencèrent à chuchoter entre eux en dévisageant les souverains. Personne ne comprenait vraiment ce qu'il se passait, le roi et la reine affichait une démonstration de joie publique en période de deuil. Beaucoup voyait cela comme une insulte à la mémoire de feu Catherine d'Aragon.
Même la petite Elizabeth, venue spécialement pour l'occasion et qui jouait sur la pelouse avec d'autres enfants sous l'œil attentif de sa nourrice, était vêtue d'une petite robe jaune à l'image de sa mère. De son père, la petite princesse avait héritée de ses cheveux roux flamboyants tandis que d'Anne, elle avait héritée de son intelligence, de sa détermination et de sa passion. A deux ans et demi, Elizabeth avait déjà l'esprit vif. Lorsqu'elle aperçut ses parents, elle courut dans les bras de son père qui souris et la prit dans ses bras, la faisant voler dans les airs sous les éclats de rire de la petite princesse. Les enfants qui jouaient avec Elizabeth coururent vers elle avec leurs épées de bois et le roi s'écria.
-Garde protégeaient moi ! S'écria t-il en riant et en jouant avec les enfants.
Tandis que le roi s'occupait d'Elizabeth, les invités s'assirent sur les couvertures étendues sur l'herbe afin de profiter du soleil de janvier en pique-niquant sur l'herbe au milieu des jardins. Félicité prit place aux côtés de Madge et Anne Bray tandis qu'Henry Norris et Ethan Sharpe vinrent se joindre à elles. L'ambiance était légère et en tendant l'oreille, on pouvait entendre des brides de conversations outrées quand à la tenue du roi et de la reine.
-On dirait un couple de poussins ! S'exclama Lady Rocheford, la belle-sœur d'Anne, à sa voisine qui pouffa à sa remarque.
-Ignorez cette femme, les cœurs aigris trouvent leur bonheur au détriment d'autrui. Murmura Ethan à l'oreille de Félicité.
La jeune femme sursaute honteuse d'avoir été surprise en train d'écouter les conversations et rougie lorsqu'elle se rendue compte de la proximité du jeune homme.
-Que sous-entendez vous ? Demanda t-elle.
-Tout le monde sait que Lady Rocheford n'a guère d'affection pour les boleyn, sont mariage avec le frère de la reine n'a pas su combler ses attentes et elle jalouse l'affection de son mari pour Anne.
Félicité regarda Jane, Lady Rocheford était la seule personne de l'entourage de la reine qui gardait une certaine réserve. Elle participait que rarement aux réceptions dans les appartements de la reine et ne semblait jamais de bonne humeur, gardant les traits tirés. On ne la voyait que très rarement en compagnie de son époux et lorsque cela devait arriver, ils ne parlaient que peu entre eux laissant paraître la discorde dans leur relation.
-Vous connaissiez Catherine d'Aragon ? S'enquit la jeune femme de but en blanc.
Ethan cligna des yeux surpris par sa question.
-Très peu, elle n'avait déjà plus les faveurs du roi lorsque je suis entré à son service, sa Majesté désirée déjà la reine Anne. Répondit-il.
-Comment était-elle ?
-C'était une femme admirable, dévouée corps et âme à son époux, elle était très pieuse. Expliqua t-il.
-Et comment était la cour lorsque vous êtes arrivé ? Enchaîna Félicité avide de réponses.
-La cour était divisée entre les partisans de Catherine et ceux qui soutenaient l'ascension de Lady Anne. Anne n'était encore qu'une dame de compagnie auprès de la reine lorsque je suis arrivé, mais très vite elle à commencée à prendre la place de Catherine à la table du roi, on la voyait partout au bras du roi qui la traitait comme une reine, bien qu'elle n'en avait pas le titre elle en avait tout l'air. Cela à fait tout un scandale à l'époque et nous sommes loin d'en avoir fini croyez moi.
Sur ses mots, il détourné son regard de Félicité pour observer le roi et la reine en train de pique-niquer, Anne regardant Elizabeth avec un air attendri tandis qu'Henry observait Jane Seymour du coin de l'œil. De loin, ils renvoyaient l'image d'un couple heureux et uni, mais les apparences sont trompeuses.
-La reine à de la chance de vous avoir à ses côtés Lady Hastings. Souris Ethan.
La jeune femme sentie le rouge lui monter aux joues. Elle se sentait telle une adolescente, troublée face à ce jeune homme qui dégageait un charme certain.
-J'aimerais apprendre à vous connaître, loin des intrigues de la cour, accompagnez moi en ballade demain.
Félicité le regarda avant d'acquiescer timidement.
-Retrouvez moi à dix heures aux écuries. Sourit-il avant de la saluer et de s'en aller.
La jeune femme le regarda partir avec un sentiment mêlée de crainte et d'excitation, elle avait hâte d'être à ce rendez-vous et en même temps elle angoissait à l'idée de se retrouver seule avec lui.
Le reste de l'après-midi fut calme, seul les cris des enfants qui jouaient dans l'herbe venait couvrir le bruit des discussions. La petite Elizabeth attendrissait les convives qui ne cessaient de murmurer quand aux tenues des souverains. L'ambassadeur Espagnol, Eustace chapuys avait fait demi-tour et était rentré au château en signe de protestation, ami fervent de Catherine d'Aragon, il était l'un des plus grands opposant d'Anne à la cour. La reine quant à elle dansait et riait, illuminant la cour telle un rayon de soleil timide tentant de percer à travers les ténèbres qui l'entourait. Malgré l'apparente tranquillité qui régnait à la cour, Félicité pressentait que cela ne durerait pas, telle le calme avant la tempête, Henry VIII était tel un volcan en ébullition prêt à exploser à n'importe quel moment balayant tout sur son passage, et le beau temps ne durerait pas.
VOUS LISEZ
Le temps viendra
Художественная прозаFélicité Hastings est une jeune historienne de 23 ans spécialisée dans la période des Tudor. Fascinée par l'incroyable vie et destinée d'Anne Boleyn, la tristement célèbre femme d'Henry VIII, elle décide d'écrire un roman sur la femme derrière la lé...