Chapitre 2 - Les Préparatifs

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- S'il vous plaît ! Un peu de silence !

Les bavardages cessèrent petit à petit mais certains chuchotements perduraient. Cependant l'enseignante n'en tint pas compte ; elle comprenait parfaitement l'engouement de ses élèves.

- Comme vous le savez tous déjà, grâce aux chimistes en herbe présents dans cette classe qui ont remporté le concours mis en place par la région, vous partez tous en voyage en Europe ! Bien sûr c'est un voyage scientifique et culturel mais tout de même récréatif. Faites de ce séjour un moment inoubliable pour fêter la dernière année de votre Secondaire.

Elle se tut et laissa les élèves s'exclamer, s'enthousiasmer, discuter des destinations, prévoir les binômes, les affaires à emmener. Elle savait qu'elle ne ferait pas cours aujourd'hui, que ses élèves ne lui accorderaient aucun moment de calme ; mais cela l'importait peu, elle avait choisi son métier pour faire progresser des étudiants, les aider à se développer. Quel genre de professeur serait-elle si elle les empêchait d'exprimer leur joie ?

Au contraire, elle était plus qu'heureuse de les voir dans un tel état. Cependant, il y avait une ombre au tableau. Certains ne s'enthousiasmaient pas ou étaient plus réservés, elle le savait, elle connaissait chacune des petites têtes en face d'elle, tout le monde se comportait exactement comme elle s'y attendait. Tout le monde sauf John Watson.

Le jeune garçon était assis au premier rang comme à son habitude pendant son cours ; il adorait apprendre, excellait en biologie, et voulait donc se tenir au plus près de l'action. Aujourd'hui son regard était sombre, perdu dans le vide, il lui semblait même que les poches qui se dessinaient sous ses yeux avaient gonflé. Cela faisait déjà quelques jours qu'elle avait remarqué un changement dans son comportement. Inquiète, elle en avait parlé à Ella, la psychologue de l'établissement, qui avait donc pris soin de convoquer le jeune homme qui avait alors effectué plusieurs aller-retours dans son bureau.

Elle s'approcha de lui et, dans un murmure étouffé par les exclamations des autres élèves, lui transmetta le dernier message en date de sa collègue.

- John, madame Thompson t'attend.

L'adolescent sorti de la salle ses affaires sous le bras, en souriant poliment à son enseignante. Il savait qu'il ne reviendrait pas de sitôt ; la psychologue allait le garder longtemps, essayer de le faire parler, de se confier. Mais il ne dirait rien. Et même s'il voulait partager ses états d'âme, il ne saurait pas par où commencer.

- Entre, installe toi.

Avec un grand sourire, elle déposa devant lui une tasse de thé. Elle ne faisait pas tant de manières avec les autres élèves qui lui rendaient visite ; mais John n'était pas comme les autres.

- Comment vas-tu ?

- Bien, très bien.

- Ce n'est pas vrai, n'est ce pas ?

- Vous avez écrit "se méfie toujours".

- Et tu lis mes notes à l'envers. Est-ce que tu vois où je veux en venir ?

Le jeune homme ne répondit pas, se contentant simplement de soutenir le regard de la femme qu'il détestait autant qu'il l'aimait.

- On sait tous les deux ce qu'il se passe autour de toi. Mais ce n'est pas pour cela que tu dois mettre de côté la vie que tu as toujours mené. Il faut que tu y reviennes tranquillement. Cela prendra peut-être du temps mais il le faut. Et je suis sûre qu'il y a au moins une personne qui ne voudra pas ta peau et te tendra une main amicale. À qui tu pourras raconter tout ce qu'il t'arrive.

- Il ne m'arrive rien.

John quitta le bureau sans y être invité, mais peu lui importait. Il voulait simplement que cette étrange journée se termine.
Mais pour couronner le tout, il ne pouvait pas rentrer chez lui et se glisser sous ses draps. Non, ce soir il avait un rendez-vous. Avec un type dont il ne connaissait que le nom et le visage. Peut-être était-ce un guet-apens ? Après tout, il n'avait pas vraiment l'air sain d'esprit. Cependant John s'en moquait ; il se sentait bien trop intrigué par cet énergumène, comme si toutes les forces de la Terre s'étaient réunies pour le convaincre que sortir de sa bulle, ce soir, avec lui, était la meilleure chose qu'il pouvait faire.

- Qu'est ce que tu fais là ?

En rentrant dans sa chambre, prêt à se laisser tomber sur son lit, il trouva sa sœur, Harriet, assise au bord du matelas dans une tenue qu'elle n'avait pas pour habitude de mettre.

- J'ai besoin d'une couverture pour ce soir. Chuchota la jeune femme.

- Tu sors ?

- J'ai rendez-vous avec Clara. Avoua-t-elle.

Le petit homme toussa bruyamment. Trop bruyamment et exagérément à son goût, mais il se devait d'étouffer les paroles de sa sœur.

- C'est bon, John. Notre père est un con mais quand même pas au point d'écouter aux portes, non ?

- Ton language, Harry ! Écoute, j'adorerais t'aider, encore une fois, mais je... je sors aussi ce soir.

- Toi ?! S'étonna la dénommée Harry avant d'exploser de rire. Très drôle John. Je ne me souviens pas t'avoir vu sortir après 20h pour une autre raison que descendre les poubelles.

- Peut-être. Mais ce soir je sors.

- Tu as rencontré quelqu'un ?

- Oui. Enfin non ! Pas de cette manière là. Pas... Enfin... Bref.

- Comment est-ce qu'il s'appelle ? Lui demanda-t-elle avec un sourire et un regard en coin.

- Sher... Comment tu sais que c'est un garçon ?

- Je te connais par cœur, John. Je dirai rien à papa, tu le sais. Précisa Harriet devant l'embarras de son frère. Je suis ton alliée.

Quelques temps plus tard, après avoir fait croire à leur père qu'ils comptaient passer la soirée tous les deux en ville, les adolescents se retrouvèrent dehors, non loin de l'endroit que Sherlock avait indiqué à John.

- Tu veux un conseil ? Ne le ramène pas à la maison. Mais rien ne t'empêche d'aller chez lui. S'exclama-t-elle avec un clin d'œil exagéré.

- Laisse moi tranquille.

Sa sœur l'ennuyait, certes, mais John ne pouvait pas se retenir de sourire face à cette jeune femme si intrépide et téméraire.
Il essaya d'effacer son sourire qui cependant subsista légèrement lorsqu'il aperçu son nouvel ami se diriger lentement vers eux.

- C'est lui ? Il est mignon. T'as de la chance que ça soit pas mon style parce que je te l'aurais piqué volontiers.

John rigola, d'un vrai rire qu'il pensait avoir perdu, fixant Sherlock qui approchait et écoutant sa sœur délirant dans le creux de son oreille.

La jeune femme lui souria tout en l'observant d'un regard protecteur avant de faire demi tour et de manifester son intention de partir.

- Surtout ne bois pas trop, Harry. Lui demanda-t-il plus qu'il ne le lui conseillait vraiment tout en se dirigeant vers celui qui allait être son partenaire pour la soirée.

Le Voyage - Johnlock AUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant