Asgoria

Juillet 2040

Cela fait maintenant 6 mois entiers que nous sommes arrivés sur Asgoria. Nous avons donc eu le temps de nous approprier encore plus cette planète, et je vais m'efforcer de faire un compte rendu le plus détaillé possible de tout ce que nous avons pu observer pendant cette période. 

Tout d'abord, en ce qui concerne l'exploration, nous n'avons pas trouvé de nouveau biome notable, sur cette planète ne se trouvent que canyons, océans et plaines. Nous n'avons trouvé aucune trace de civilisation qui pourrait trahir la présence, ou ne serait-ce que le passage, d'une espèce intelligente sur la planète. Preuve supplémentaire, s'il en fallait, qui a rendu tous les non scientifiques présents ici que nous sommes bien seuls dans l'univers. Nous nous sommes cependant contentés, durant cette moitié d'année, de n'explorer que la surface de la planète, et il y a déjà fort à faire. Nous irons donc nous attarder sur le sous-sol, prometteur en ce qui concerne les minéraux nous l'espérons, plus tard. Pour le moment, il semblerait que le calme irréel régnant sur cette planète provienne en partie de la façon de vivre de la faune et de la flore, ou peut-être est-ce l'inverse. En effet, en 6 mois entiers passés à explorer chaque recoin de la surface, nous n'avons rencontré aucun organisme agressif, il semblerait que tous les êtres vivants présents ici vivent en symbiose parfaite, et que la mort ne provienne que de cause extérieure à toute volonté organique. Nos soldats, qui se sentaient désœuvrés jusque là, peuvent ainsi nous aider à récolter des échantillons, découvrir de nouvelles espèces et étudier leurs comportements... Cette planète est donc propice à la vie et à la découverte, il y a une myriade d'espèces à découvrir, de paysages à observer, le voyage de retour s'en voit ainsi reculé de plusieurs dizaines d'années, si ce n'est de siècles: nous nous devons de maitriser au maximum les connaissances que nous pourront récolter sur cette planète de manière à ce que l'installation future et définitive de la race humaine sur cette planète puisse se passer sans le moindre accroc et que tous voient en cette terre un nouvel Eden.

Grâce à l'aide de nos scientifiques, nous avons pu découvrir quels étaient les animaux et plantes comestibles et lesquels nous pouvions apprivoiser sans trop de difficultés. Bien que toute cette planète respire le pacifisme, nous ne pouvons tenir éternellement sur les réserves de nourriture que nous avons apporté avec nous. Nous allons donc, bien que cela nous en coûte, élever des animaux, cultiver des plantes, tout cela dans le but de leur ôter la vie afin de pouvoir nous sustenter et ainsi continuer nos études afin éventuellement de pouvoir trouver une solution qui ne porte pas atteinte au mode de fonctionnement idyllique de cet endroit. 

En ce qui concerne les êtres vivants répertoriés, nous avons pu déterminer la quasi totalité de ce qui constitue la vie sur Asgoria. A l'image de ses biomes, cette planète ne semble pas s'illustrer sur sa diversité, car nous n'avons trouvé que six espèces différentes d'animaux pour le moment, et je doute qu'il nous en reste encore beaucoup à découvrir après les recherches acharnées que nous avons effectué.

En ce qui concerne la flore, nous laissons à notre botaniste le soin de s'émerveiller longuement devant les trésors d'ingéniosité que peuvent déployer les végétaux afin de s'adapter à une vie sans lumière, tous les autres membres se contentent de regarder chaque espèce et dire par la suite si elle leur plaît, si elle paraît laide, affaire classée. Il est cependant important de spécifier que pour le moment aucun végétal répertorié ne semble posséder des vertus curatives pour notre espèce, ce qui pourrait probablement poser problème en cas d'épidémie inconnue. Heureusement, une telle chose semble peu probable au vu de ce qui a pu être constaté durant ces 6 mois mais nous avons tous en mémoire les tristes événements liés à de violentes pandémies qui ont poussé l'humanité dans leurs derniers retranchements, notamment la dernière en date, la grande épidémie de 2020, qui a bien failli causer notre fin à tous et dont nous sommes sortis grandement affaiblis.

Notre ornithologue a pu catégoriser 3 espèces fondamentalement différentes d'oiseaux, en plus de toutes les variations internes propres à chaque espèce . Toutes semblent vivre dans les plaines, vivant dans les plantes quand elles ne sont pas de sortie dans le firmament étoilé. Une sorte de dodo turquoise, car oui la planète semble condamnée aux couleurs sombres, mais ce n'est pas le cas des animaux qui eux semblent rivaliser de couleurs chatoyantes pour mieux égayer la nature. La deuxième espèce ressemble très fortement à un pigeon, signe que ces créatures démoniaques ne semblent pas vouloir nous laisser tranquilles, même sur une autre planète, à ceci près que ceux-ci sont roses, oranges ou verts en plus d'être fluorescents. Par souci d'originalité, nous les avons baptisés "Pigeons Chromatiques".  La dernière espèce est probablement la plus belle découverte que nous ayons fait jusque là. Il s'agit d'un immense oiseau, aux alentours de 4 mètres d'envergure, qui ressemble trait pour trait au phénix terrien. Bien entendu, il ne brûle pas mais possède des plumes aux bords de ses ailes qui ondulent telles des flaques de magma au gré du vent, et sa majesté est telle que plusieurs d'entre nous restent subjugués de longues heures sans ressentir le besoin de bouger devant cet animal mythique. Il reste encore à savoir si il possède les mêmes propriétés que l'oiseau de légende, mais ne comptez pas sur moi pour mener cette expérience à bien...

Pour la faune, l'animal qui semble être le plus commun ressemble à un scorpion bipède, avoisinant les 1m50 de hauteur, possédant une longue langue bleue, s'apparentant à celle du fourmilier, qui sort régulièrement de sa gueule sans raison apparente. Nous ne nous en sommes pas encore trop approché  car nous ne savons pas encore trop à quel point sa ressemblance avec le scorpion que nous connaissons est fondée, et nous sommes encore trop peu nombreux et nous ne disposons pas d'assez d'éventuels antidotes pour pouvoir nous lancer dans une étude bien plus poussée de l'animal. Nous l'avons toutefois baptisé "Pabo". Il semble cependant vivre dans des terriers dans les canyons, et vit par troupeau d'une quinzaine d'individus, raison de plus de ne pas les approcher sans préparation. Près des océans vivent aussi des tritons, bipèdes eux aussi, que nous avons baptisés "Ichtyans", en l'honneur d'une œuvre mythique ayant illuminé le début de notre millénaire. Vient ensuite le "Reptignal", une sorte de reptile de la taille d'un loup possédant des bois sur le crâne, que l'on pourrait exploiter à la fois pour son cuir et en même temps pour sa viande, qui, d'après nos études, est comestible. Les reptignals vivent dans les plaines et, maintenant qu'ils se sont habitués à notre présence, ne vont plus courir se cacher dans les fourrés comme ils le faisaient lors de notre arrivée. Ils semblent domesticables et pourraient donc assurer notre survie lorsque nos propres réserves viendront à manquer, pour le moment nous préférons ne pas nous mettre la vie de la planète à dos inutilement, ce qui rendrait bien plus difficile les études.

Nous n'avons pas tenté de nous plonger dans les océans, car il s'agit d'un tout autre monde et qui sait si le calme idyllique régnant à la surface ne laisse place à un chaos violent et sans pitié en dessous. De plus, il est plus important de se contenter d'étudier la surface au maximum plutôt que de diviser nos effectifs, déjà bien réduits, pour tenter l'exploration d'un monde dont nous ignorons totalement les règles.

Plus cette planète nous livre ses secrets, plus nous nous confortons dans notre idée d'avoir découvert un paradis, loin de notre planète originelle, soumise à une violence constante et une nature capricieuse, dangereuse et surtout non maitrisable. De plus, une dernière bonne nouvelle pour conclure ce rapport: deux des quatre femmes qui nous ont suivi dans ce voyage sont enceintes, la relève est assurée!

Fin de rapport.