VIII. L'inconnu en noir

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Denwall repensa à ce que lui avait dit la déesse Olwen: « Ta seule chance, c'est l'intelligence ». Aujourd'hui, plus que n'importe quand, c'était vrai. Comment allait-il pouvoir pénétrer dans le château? Et, une fois qu'il y parviendrait, comment retrouverait-il le coeur du korrigan?

Heureusement, Denwall était intelligent. Il avait déjà commencé à réfléchir en prenant sa chambre d'auberge: la vue qu'il avait par la fenêtre donnait sur le château et sur son entrée. Sa connaissance des Dieux était limitée, mais le peu qu'il en avait vu lui faisait dire que leurs pouvoirs étaient infinis, et le château de la Déesse Keridwenn ne faisait pas exception à la règle.

Observer pendant une journée les gens qui entraient et venaient dans le château lui apprit une chose: que personne ne rentrait ou ne sortait du château. De toute la journée, personne ne passa sur le pont qui menait à la citadelle. Mais qui habitait ce maudit château? Il devait bien y avoir un moyen pour y pénétrer! Des serviteurs, des gardes?

Enfin, en fin de soirée, alors que le soleil était couché depuis quelques heures et que les rares passants devaient se munir de torches pour progresser, une silhouette, portant une longue cape noire et un large capuchon de la même couleur, se présenta sur le seuil du château. Il toqua à la porte avec le poing, cinq coups réguliers. L'immense battant s'entrebâilla, et le mystérieux homme fut avalé par la pénombre, avant que le portail ne se referme dans un claquement sourd.

Denwall resta éveillé toute la nuit, à sa fenêtre, pour vérifier quand l'inconnu en sortirait; il dû pour cela patienter jusqu'au milieu de la journée du lendemain. L'inconnu sortit comme il était rentré, et se dirigea vers le centre de la ville.

Denwall ne laissa pas passer cette occasion: il sortit en trombe de l'auberge avant que l'homme ne s'évanouisse dans les ruelles boueuses.

Le jeune réussit à rattraper l'ombre, et la suivit de loin, sans la rattraper. Au passage, il saisit sur un étalage une courte dague, sans que le vendeur ne le remarque. Il se jura de la ramener quand il en aurait finit.

Cette poursuite le mena jusqu'à une grande bâtisse, avec une court intérieur accessible par un porche, fermé par un grand portail. L'inconnu à la cape l'ouvrit, et après un bref coup d'œil en arrière, y disparu.

Denwall refusa de laisser passer sa chance une deuxième fois. Dès que les battants furent refermés, il traversa la rue et essaya à son tour de pénétrer dans la maison. Mais c'était peine perdue: le portail était verrouillé. En rage, le jeune homme retourna à l'auberge, gardant avec lui le poignard, mais repassant tout de même par la ruelle où il l'avait subtilisée. Dans cette ruelle, son vol avait provoqué une grande agitation: le marchant s'était aperçu de la disparition, et accusait des passants de la lui avoir volée. Denwall passa sans demander son reste, et retourna à sa chambre.

Le soir, il ressortit peu avant l'heure où, la veille, l'inconnu en noir avait pénétré dans le château. Il se posta alors au coin d'une maison, avec son poignard dans une main, un solide gourdin dans l'autre, et une grande capuche lui masquant son visage. Il attendit, espérant que, comme la veille, l'inconnu allait se présenter aux portes du château.

Et, effectivement, quelque minutes après une silhouette tout de noir vêtue approcha par la ruelle adjacente. Armant son bras, se préparant à lui sauter dessus, Denwall se tendit. Et lorsque l'ombre apparut, il se précipita par derrière, levant son gourdin.

Mais... alors que l'inconnu était à porté de main, et que Denwall tenait un moyen en or de pouvoir pénétrer dans le château en prenant sa place, un doute le fit hésiter. Était-ce donc ça, l'intelligence? Assommer des inconnus pour parvenir à ses fins? Ça, c'est ce qu'aurait fait Eòghan le korrigan, mais lui, Denwall, n'était pas comme ça. Il laissa retomber son bras, et se laissa lui-même tomber à genoux, vaincu par sa conscience.

Surpris par le bruit derrière lui, l'ombre se retourna, et dans le même geste dégaina une courte rapière affutée comme une lame de rasoir, reflétant la lumière de la lune. Mais lorsqu'il vit le jeune homme à genoux, sa dague et son gourdin posés à terre, il resta interdit pendant quelques secondes, sur ses gardes.

Jugeant que Denwall, à terre, ne présentait pas de danger, il rengaina son épée, et il fit une chose très surprenante: il tendit sa main droite à Denwall, pour l'aider à se relever

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Jugeant que Denwall, à terre, ne présentait pas de danger, il rengaina son épée, et il fit une chose très surprenante: il tendit sa main droite à Denwall, pour l'aider à se relever.

Le jeune homme resta figé pendant quelques instant, se demandant s'il devait accepter l'aide de celui qu'il voulait assommer quelques secondes auparavant. Puis il prit la main de l'inconnu. Ce contact fut très déstabilisant: la main était fine, douce. Cependant, l'inconnu l'aida à se relever avec force, sans lui laisser le temps de s'attarder davantage sur cette question.

L'inconnu à la cape était légèrement plus petit que Denwall, et, maintenant qu'il était plus près, le jeune homme s'apercevait qu'il était également très menu. Celui-ci lui fit un signe de la tête, pour que le jeune homme le suive, et l'entraîna vers la grande bâtisse d'où il venait, celle où il avait disparut derrière le grand portail plus tôt dans la journée.

L'étrange personnage l'invita alors à rentrer dans cette cours intérieur, et referma le portail derrière eux. Était-ce un piège?

L'ombre enleva alors sa capuche, et une cascade de cheveux long s'en échappa, d'un noir de jais, brillant à la lumière de la torche, encadrant un visage arrondi, doux et splendide, aux lèvres fines. Ses yeux, noirs et insondables, semblables à une nuit sans lune, fixaient Denwall d'un air sévère.

Ses pommettes étaient saillantes, et sur la droite, un minuscule tatouage était esquissé, représentant une sorte d'étoile à trois branches, formée par huit points. 

 

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