Au moment précis où il accepta la mission de Keridwenn et le Don qui allait avec, toutes les âmes semblèrent s'éteindre sous leur cloche de verre, et l'obscurité s'installa dans ce lieu mystérieux. Denwall avait beau appeler la Déesse, elle ne répondait plus.
Il avança alors à tâtons, ses mains en avant pour ne pas foncer dans une stèle.
Son regard fut attiré par un endroit, à quelques dizaines de mètres devant lui, où une des âmes brillait encore. Son coeur fit un bond dans sa poitrine: ce ne pouvait qu'être celle d'Eòghan. Il s'en approcha en manquant de trébucher plusieurs fois à cause de la pénombre.
Une fois arrivé devant la stèle où l'âme luisait paisiblement, il resta comme hypnotisé par la beauté de ce qu'il avait devant lui.
Il n'y avait pas prêté attention jusque là, mais une âme... c'était quelque chose d'une beauté absolue. Le regard se perdait dans cette petite sphère, qui rougeoyait à quelques centimètres de la surface, hypnotisé.
Devait-il vraiment soulever cette cloche de verre, et prendre l'âme?
Oui. Il avança ses mains vers la coupole transparente la souleva, et la posa à terre, à côté de la stèle. Il tendit sa main gauche vers la boule de lumière.
— Attends!
La voix de Laëna, derrière lui, fit stopper son geste à Denwall. La jeune déesse était enfin réapparut, et avec elle la luminosité commençait à augmenter de nouveau.
— Ne touche jamais une âme qui n'est pas à toi de ta main gauche. C'est la main du cœur, et l'âme te reviendrait directement. Elle s'intègrerait à ton cœur, et deviendrait tienne. Prends-la avec ta main droite, tu ne crains rien. Mais prends garde de ne pas l'abîmer...
Le jeune homme fit comme elle disait. En approchant sa main droite, la sensation était étrange; une douce chaleur se répandait, comme si les rayons du soleil chauffaient sa peau. Il referma ses doigts sur la petite sphère.
La chaleur devint alors insupportable, brulant sa paume; de douleur, Denwall ouvrit sa main, et l'orbe s'éleva de quelques centimètres, puis se stationna à cette hauteur. Lorsque le jeune homme bougeait sa main, l'âme suivait son mouvement, restant toujours à la même hauteur.
Denwall regarda alors Laëna, et la fille aux yeux d'émeraude lui sourit.
— Suis-moi, je voudrait te montrer quelque chose.
Curieux, le jeune homme suivit sa guide à travers les stèles. Combien d'âmes avait prit Keridwenn? Il y en avait tellement...
La salle des âmes semblaient infinie, et cela faisait plusieurs minutes que Denwall et Laëna marchaient sans voir de changement de décor, alors le jeune homme en profita pour questionner la fille:
— La Déesse Keridwenn ne m'a pas répondu, tout à l'heure, lorsque je lui ai demandé pourquoi elle avait prit l'âme d'Eòghan. Connais-tu la réponse à cette question?
— Ça ne m'étonne pas qu'elle ne t'ai pas répondu. Eòghan et elle se connaisse depuis que le monde a été créé, l'histoire entre eux ne date pas d'hier... Tu sais qu'Eòghan a été créé par Iwki, le grand frère de Keridwenn. Il est apparu dans ce monde en même temps que ma mère est née. Ils ont grandi ensemble, et...
— Ils se sont aimés?
— Profondément.
Denwall avait peine à croire qu'une femme puisse être attiré par une créature aussi laide qu'un korrigan, mais Laëna interrompit sa pensée:
— Ne le juge pas sur son apparence. Les Dieu peuvent prendre l'apparence qu'ils veulent. Les Arkassan, comme Eòghan, en sont incapables, mais la grandeur de leur esprit n'en est pas moins fabuleuse. Son image a bien peu d'importance... C'est ainsi que Keridwenn et lui se sont aimés. D'un amour pur, le même qui existe entre toi et Aëla. Malheureusement, Le Grand Tout, père de Keridwenn, n'accepta pas leur union. Alors Eòghan parti vivre en haut des montagnes, furieux contre le Dieu suprême.
— Je ne comprends toujours pas pourquoi son âme lui a été prise...
— J'y viens. Le Grand Tout gardait précieusement, au cœur du monde, dix-sept pierres, qu'on nommait les larmes de cristal. Elles étaient semblables à des diamant, mais infiniment plus solides, plus précieuses, plus inestimables... Chacune avait, disait-on, un immense pouvoir; l'une, la sagesse, l'autre, l'intelligence, et ainsi de suite. Mais la dernière, la dix-septième, possédait toutes les capacités des autres réunis. Elle rendait celui qui la possédait invincible. Ce n'est pas que le Grand Tout en avait besoin, mais il craignait de les révéler au monde et des les confier à quelqu'un, et encore plus à un humain. Un beau jour, ces pierres disparurent.
— Toutes?
— Les dix-sept. Le Grand Tout apprit par la suite que c'était le maître des Korrigans qui lui avait volé. Il était fou de rage. Pour se venger, et aussi pour punir Keridwenn de l'avoir aimé, il contraignit la Déesse à prendre l'âme du voleur, et ensuite, toutes les âmes des voleurs de ce monde.
— Alors l'âme d'Eòghan était la première... Mais pourquoi Keridwenn m'a-t-elle autorisé à rendre son âme au korrigan? Le Grand Tout ne va-t-il pas la punir?
Laëna sourit doucement, et répondit d'une voix douce:
— Non, ne t'inquiètes pas. Un voleur peut récupérer son âme si c'est un humain au cœur pur qui lui rend. Le tien l'est. Cependant, de nombreux voleurs ne désirent jamais reprendre leur âme, malgré tout ce que cela implique.
— Pourquoi?
— Lorsque quelqu'un perds son âme, il est alors incapable d'aimer. Mais cela lui confère également l'immortalité... Le Grand Tout a jugé que l'incapacité à aimer pour l'éternité était le prix le plus cher que quelqu'un pouvait supporter. Mais certains humains jugent que la vie éternelle leur sied mieux que l'amour...
— Mais Eòghan est un Arkassan, il était déjà immortel...
— Eòghan est immortel, certes, mais pas parce qu'il est un Arkassan. La décision qu'il le soit est revenu à sa créatrice, Iwky, déesse du soleil et du jour, du feu et de la fournaise, la vie avant la mort. En ce qui concerne les autres Arkassan, seule Elen est immortelle. Ean et Garwvyr, eux, sont bel et bien mortels car leur créateur en ont décidé ainsi. Mais la perte de son âme, même en ne lui conférant que l'incapacité d'aimer, était la pire chose qui pouvait lui arriver. En se rendant compte que tout les sentiments qu'il éprouvait pour Keridwenn s'étaient envolés, il plongea dans le désespoir et cela l'aigri. C'est pour cette raison que maintenant, il passe le plus clair de son temps à jouer de mauvais tours aux gens. Il ne manque jamais de défier les visiteurs qu'il rencontre d'aller récupérer son âme, mais la plupart des personnes refusent...
Denwall et Laëna arrivèrent alors enfin là ou la jeune Déesse voulait l'emmener.
Ils étaient sur un balcon qui dominait la cité. Au loin, dans les montagnes, le soleil se levait. Les couleurs étaient magnifiques, et aucun mot n'aurait pu décrire la beauté du paysage.
— Il est temps qu'une âme donne à nouveau la puissance d'aimer, déclara Laëna de sa voix douce.
VOUS LISEZ
Les Larmes de Cristal
Cerita Pendek« La légende des Larmes de Cristal retrace l'épopée de Denwall, un jeune homme parti à la recherche de sa fiancée disparue, Aëla. Il rencontrera durant sa quête des créatures légendaires, manquera de mourir mille fois, sera tenté d'abandonner. Parvi...