Prologue

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Les yeux clos, j'imaginai la danse ondoyante des flammes dont je ressentais la chaleur sur mes joues.

Sous les applaudissements de ma famille, je soufflai mes bougies avec énergie. Ma mère coupa le gâteau en sifflotant et mon chien, un terre neuve du nom de Bulldozer, vint quémander un morceau en se collant à mes jambes. Je le lui accordai volontiers. Il n'y était pas vraiment autorisé d'habitude, mais, après tout, les règles étaient faites pour être contournées.

Aujourd'hui était un jour spécial. On était le 12 juin, jour de mon anniversaire. J'avais 16 ans.

16 ans depuis le début de mon existence. Mais cela faisait seulement 2 ans que j'avais vraiment commencé à vivre.

Toute ma famille s'était réunie pour l'occasion, c'est-à-dire pas grand-monde, à part mes grand-parents, la soeur de ma mère, son mari et mes deux cousins. On ne voyait jamais ces derniers, car ils habitaient au Canada. Nous n'étions par conséquent pas très proche.

Néanmoins leur présence pour mon anniversaire me touchait, aussi je mis un point d'honneur à faire la conversation à chacun.

- Miru ? m'apostropha justement ma tante. Tu es toujours là ?

- Ah oui pardon ! m'excusai-je. J'étais perdue dans mes pensées. Tu disais ?

Je passai tout l'après midi avec eux, racontant les nouvelles habituelles aux adultes, jouant avec les petits... Ils repartirent les uns après les autres. À 18:00, comme tout le monde était parti, j'appelai mon chien :

- Bubulle ! Viens mon gros ! On va se promener.

J'entendis les lourdes pattes de mon terre neuve frapper le sol à toute allure tandis qu'il se précipitait vers moi. Je le serrai dans mes bras et lui mis sa laisse.

Une fois dehors, je laissai Bulldozer me guider, profitant du vent doux que nous apportait cette soirée d'été. Longeant la route, nous arrivâmes bientôt à notre lieu favori, un champs abandonné où nous nous allongions pour humer le délicat parfum des fleurs sauvages. Je m'assis et Bulldozer partit se défouler dans les hautes herbes. Je m'étendis alors avec délice parmi les coquelicots, enfilai mes écouteurs et me perdis dans la musique.

Une petite heure plus tard, j'appelai mon chien, mais il continua à s'amuser. Vu les aboiements très enthousiastes qu'il laissait échapper, il devait poursuivre un papillon... Je le menaçai :

- Attention Bulldozer, je vais partir sans toi !

Pourtant il continua à jouer. Je n'étais pas inquiète. Je savais qu'il me rattraperait à un moment, il connaissait le chemin par coeur.

Alors je m'avançai sur la route lorsqu'un grondement de moteur attira mon attention. Une voiture. Elle était à moins d'un mètre et je compris qu'elle ne pourrait pas freiner. J'allais mourir.

Incapable de bouger, je fus saisie de tremblements. Ainsi, c'était déjà la fin. A peine seize ans à vivre. Le goût amer du regret sur mes lèvres, je me reprochai de n'avoir jamais vraiment essayé, n'y pouvais plus rien cependant. Je levai un bras pour me protéger et fermai les yeux.

Donne Moi Tes YeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant