Chapitre 5

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Je me réveillai une fois de plus dans les ténèbres, une main me secouant doucement l'épaule.

- Miru, prononça la voix de mon père, ta mère t'attend en bas. Habille-toi et déjeune rapidement.

- J'ai pas faim, protestai-je, bornée.

- Eh bien ne déjeune pas alors, rétorqua mon père. Mais dépêche-toi quand même.

Je m'extirpai de mes draps en grommelant. Je m'habillai puis descendis les marches en traînant les pieds. J'avais l'impression que tout mon corps était en béton tant il était raide et lourd.

M'entendant approcher, ma mère me lança :

- Monte dans la voiture. J'arrive dans 5 minutes.

Attendez... Dans la voiture ?!

- Je ne veux pas retourner au refuge de l'Oeil Bleu ! hurlai-je, furieuse. Bulldozer a quitté ce monde seulement hier et tu veux déjà prendre un autre chien ?! Tu crois vraiment que ça va arranger les choses de le remplacer par n'importe quel cabot qui passe ?!

À ces mots, je tombai à genoux, sans force. D'innombrables larmes dévalèrent mes joues et vinrent s'écraser sur le sol. À chaque sanglot, j'avais l'impression qu'on m'ouvrait le coeur sans anesthésie.

- Ma chérie, sache que je ne t'emmène pas au refuge, annonça calmement ma mère. N'accuse pas les gens à tort, s'il te plaît. Cela a été dur pour nous aussi. Il est simplement hors de question que tu te cloîtres à nouveau dans ta chambre sans autre projet que celui de te lamenter sur ton sort, comme avant son arrivée. Tu viens.

J'avais senti le tremblement dans sa voix, alors je n'insistai pas pour connaître notre véritable destination.

Nous montâmes donc à bord du véhicule. Pendant le trajet, je me plus à imaginer les paysages que nous traversions. J'inventai des montagnes, des arbres et des lacs. Bien sûr, je ne savais pas à quoi cela ressemblait réellement, mais on m'avait décrit le paysage de nombreuses fois, aussi, je parvins à créer un univers dans ma tête.

Je ne peux pas vous décrire ce monde. Il était différent du monde des hommes. Il était constitué de choses floues, car je n'avais jamais vu ni formes ni couleurs. Cet univers était ma perception du monde, celle que toi, derrière ton écran, tu ne pourrais pas comprendre.

Pourtant, il y avait un vide au milieu de ce paysage. Ce vide laissé par mon chien, celui qui m'avait donné envie de vivre. Sans lui, les lumières de mon monde s'éteignaient, un vent puissant faisant disparaître les flammes allumées par le gros terre neuve.

Mais d'autres bougies s'allumeraient bientôt, éclairant le sombre tunnel dans lequel je m'étais égarée.

Et, qui sait, peut-être trouverais-je enfin le chemin du bonheur.

Donne Moi Tes YeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant