Chapitre 10

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Le ciel était d'un bleu pur, illuminé par un soleil aveuglant. Autour de moi se dressaient des arbres vert émeraude, leurs branches tendues vers le ciel comme pour essayer d'en atteindre le bout.

Les oreilles de mon cheval étaient dressées devant moi, et entre mes doigts était entremêlée sa splendide crinière noire. En baissant les yeux, je vis ses muscles rouler sous sa robe baie et brillante. Le monde paraissait si beau et scintillant lorsqu'on le voyait pour la première fois, après en avoir tant entendu parler. Mes yeux s'emplirent de larmes à l'idée soudaine que tout ceci ne pouvait pas être réel.

Je ne me rendis compte que je tombais qu'au moment de l'atterrissage. Je m'aplatis sur le sol avec violence, la chute me coupant le souffle.

Mes pensées parcouraient ma tête à toute vitesse, telle des couteaux. Leur lame me faisait si mal que je ne les entendait pas. Mes larmes dévalaient mes joues et venaient s'écraser sur le sable de la carrière tandis que, toujours face contre terre, je ne réalisai pas ce qui venait de se passer.

Autour de moi, le monde était redevenu noir.
J'entendis des pas s'approcher, et quelqu'un me demanda ce qui c'était passé. Incapable de répondre, je sanglotai :

- Je... Je n'en sais rien...

- Bon, je pense que l'équitation, c'est fini pour aujourd'hui, annonça ma mère, avant de m'aider à me relever.

Trop secouée pour réagir, je ne protestai pas lorsqu'elle me pris le bras afin de me guider jusqu'à la voiture.

*

Assise sur mon lit, la tête dans les mains, je me repassai en boucle ce moment dans ma tête. C'était impossible. Tout simplement impossible. J'avais passé seize ans dans le noir, et tout d'un coup, en montant sur un cheval, je voyais ?!

Au début, je pensais avoir rêvé, mais comment rêver de quelque chose que l'on n'a jamais vu ?

Et pourquoi spécialement à ce moment là, sur le dos de ce cheval ?

Tant d'interrogations qui restaient sans réponses, et que je ne pouvais pas partager sous peine que l'on me prenne pour une folle. Une aveugle qui voit. Mais bien sûr !

Lassée par ces réflexions sans issue, je me levai et m'emparai de mon MP3 ainsi que de mes écouteurs. J'appuyai sur la touche play et m'assis sur mon lit, calée dans des oreillers moelleux.

Peu à peu, la musique m'emporta dans un monde où les couleurs et les sons se fondaient pour ne former qu'un tourbillon étincelant de bonheur et de bien-être. Un monde où je pouvais me retrancher à ma guise, où personne ne viendrait me sortir de la béatitude dans laquelle j'étais plongée.

C'était uniquement là, au milieu du néant, seule avec ma musique, que je parvenait à oublier tous mes problèmes. J'arrivais à être heureuse, l'espace des quelques minutes que dure une chanson.

Auparavant, je ne serais sortie de ce havre de paix pour rien au monde. Désormais cependant, une chose me rattachait à la réalité, une chose qui m'empêchait de me terrer dans ma chambre à jamais.

Dreamer. Je n'aurai su dire pour quelle raison nous semblions si liés, ni pourquoi c'était à ce moment précis que j'avais vu pour la toute première fois.

Mais j'étais sûre d'une chose ; si j'étais vraiment capable d'ouvrir les yeux, il était le seul être au monde à même de m'y aider.

Donne Moi Tes YeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant