Un départ précipité

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Nylathria n'arrivait pas à dormir. À vrai dire, cela faisait des jours qu'elle ne dormait que d'un seul œil, se réveillant régulièrement avec cette impression d'être observée. Elle craignait une nouvelle tentative de Berengar pour s'emparer de Durlan et lui faire subir bien pire encore que l'épreuve du fouet. Elle essayait de se rassurer en se disant qu'il n'essaierait jamais de l'approcher alors qu'ils sont ensemble, mais rien n'y faisait. Elle passa sa main sous le traversin et sentit le poignard qu'elle avait caché. Si jamais quelqu'un venait à les attaquer, elle aurait de quoi répliquer rapidement.

À côté d'elle, Durlan dormait profondément. Grâce aux soins qu'il avait reçu d'Avedelis et Azlore, il se sentait bien mieux et, les soins combinés avec la magie elfique, ses blessures guérissaient à une allure folle. Il avait eu de la fièvre le lendemain du drame, et Avedelis craignait que les plaies ne s'infectent. Le jeune homme n'avait cessé de faire des cauchemars, appelant tout un tas de personnes dans son sommeil agité. Le voir dans cet état avait fendu le cœur de Nylathria et l'avait rendue profondément en colère. Tout était de la faute de Berengar.

La princesse veillait sur lui jour et nuit, ne quittant jamais la chambre alors que bon nombre de personnes défilaient dans les appartements à longueur de journée. La druidesse et son apprenti venaient régulièrement, aussi souvent que le cas de lady Brenna le leur permettait, Murzol et Torestrin passaient le plus clair de leurs journées avec Nylathria, tentant de la faire rire mais ils finissaient par se disputer à chaque fois. Lady Selina venait deux fois par jour demander de ses nouvelles et apporter quelques en-cas à Nylathria. Elle savait qu'elle refusait de s'éloigner de Durlan et la comprenait. Durlan avait eu raison à propos d'elle, Selina était une personne extraordinaire.

Les conseillers royaux avaient essayé eux aussi de prendre des nouvelles du jeune homme mais la princesse partait dans une rage folle à chaque fois qu'ils s'annonçaient. Elle savait qu'ils n'étaient pas innocents dans cette histoire, et cela la mettait hors d'elle de savoir que s'ils entraient, ils feraient comme si de rien était.

Le prince Marden avait lui aussi tenu à venir et s'était excusé au nom de la couronne et avait exprimé sa déception quant au comportement de son royal frère. Nylathria ne savait pas si elle pouvait lui faire confiance, mais elle accepta ses excuses, se doutant qu'il n'avait pas eu son mot à dire dans tout ceci. La princesse Eleine était elle aussi venue avec son époux, l'infirme Ser Madden, et leur fille, la timide lady Grayce. Eleine avait exprimé une colère similaire à celle de Nylathria.

–Si ma pauvre sœur voyait son fils dans cette était, avait-elle enragé, elle aurait mis à feu et à sang cette Cour. Pauvre Gweirith, elle doit se retourner dans sa tombe.

Ser Madden n'avait pas beaucoup parlé. Nylathria le voyait pour la première fois et, au vu de la tête qu'avaient fait les femmes de chambre, il était évident qu'il ne sortait pas souvent. Grayce s'était montrée profondément touchée par l'état de son cousin et vraiment attentionnée. Elle avait même proposé son aide mais Nyla avait décliné. Durlan était éveillé lorsqu'ils étaient là et les voir lui avaient réchauffé le cœur.

Il n'y avait eu cependant pas le moindre signe de Berengar. C'était mieux ainsi, s'il avait osé s'approcher de la porte, Nylathria l'aurait fait rôtir sur place, et Olvaar était d'avis de le faire lui-même. Il était venu la voir, sentant sa tristesse et sa colère. Elle s'était rendue sur le balcon, tout en gardant un œil sur Durlan, et lui avait parlé durant plusieurs heures, jusqu'à ce que le jeune homme se réveille. Le dragon lui avait avoué surveiller le roi de l'Aube de loin, guettant ses déplacements en dehors de l'enceinte du palais. Mais il n'avait rien vu qui aurait pu incriminer le roi.

Nylathria se retourna dans le lit, cherchant désespérément une position assez confortable pour lui donner l'envie de s'assoupir, ne serait-ce qu'une heure. Ses yeux se posèrent Durlan dont la poitrine encore bandée se soulevaient et s'abaissait au rythme de sa respiration régulière. Il avait l'air en paix, et c'était bien le seul moment où il semblait l'être. Elle s'approcha de lui, cherchant la chaleur de son corps, et posa délicatement sa tête dans le creux de son épaule.

Le Bâtard de l'Aube [Wattys 2020]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant