Irindor

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Lorsque la frontière fut passée, le petit groupe redoubla de vigilance. Les Terres de l'Aube étaient le terrain favori des hommes de Devon, et les gardes de Berengar connaissaient leur territoire mieux que personne. Durlan se montrait de plus en plus inquiet, il appréhendait le retour à Irindor. Il porta sa main à l'Étoile du jour, il avait l'impression que le collier lui apportait du réconfort. Il tâchait de ne rien montrer à ses compagnons mais Nylathria connaissait sa peur, il ne pouvait pas la lui cacher. Lorsqu'ils se retrouvaient seuls, elle essayait tant bien que mal de le faire sourire et de le réconforter mais la boule qui s'était logée dans son ventre n'avait visiblement aucune envie de s'en aller.

En passant la frontière, ils tombèrent rapidement sur un village où ils purent, pour la première fois depuis des jours, dormir sur un lit et manger autre chose que des lapins chassés par Murzol. Avant de repartir, Avedelis avait pu acheter assez de chevaux pour tout le monde et il l'en avait grandement remercié, ses jambes lui faisaient un mal de chien à force de marcher autant. Alors c'est avec grand plaisir qu'il est monté en selle.

Mais depuis qu'ils étaient arrivés sur les Terres de l'Aube, Durlan avait cette boule au ventre dont il n'arrivait pas à se débarrasser. Il se préparait à une nouvelle humiliation, mais il avait eu beau en connaitre des centaines depuis sa naissance, il ne s'y était jamais réellement habitué. Et il ne savait pas s'il était assez fort pour supporter cela, en plus d'avoir à faire face à Irindor sans Pesara. Il allait ressentir l'absence du professeur et cela l'achèverait.

Voyant son trouble, et le comprenant certainement, ses compagnons tentaient de le faire sourire. Murzol s'est même mis à chanter de son affreuse voix rauque quelque chanson à propos de femmes et de batailles.

–Pitié Murzol, cesse dont de chanter ! S'exclama Torestrin. Tu brailles comme un cochon qu'on égorge !

–Vous m'avez toujours refusé de chanter, Elecia et toi, Se défendit l'orque, je n'ai jamais pu m'exercer alors vous en payez les conséquences.

L'orque fit semblant de se sentir vexé.

–Vous êtes tous déprimés et déprimants, continua-t-il, je voulais simplement apporter un peu de gaieté.

Puis il se redressa vivement, un grand sourire aux lèvres.

–Puisque vous ne voulez pas que je chante, Elecia n'a qu'à le faire ! Les elfes ont un don pour le chant à ce qu'on dit.

La jeune femme resta de marbre face à tous les regards qui convergeaient vers elle, gardant ses yeux rivés au loin.

–Il en est hors de question, répondit-elle calmement, je ne suis pas un troubadour ou un barde.

–Allez, je suis sûr que tu as une voix splendide ! Insista Murzol. Tu peux faire ça pour remonter le moral de ton cher Durlan, non ?

–Ne t'inquiète pas qu'elle a autre chose en réserve pour lui remonter le moral, ajouta Torestrin en tirant sur sa pipe.

Nylathria ne réagit pas, semblant préoccupée par quelque chose d'autre. Durlan sentit une légère chaleur émaner de son collier, mais il ne savait pas comment l'interpréter.

–Ah oui c'est vrai, fit l'orque, ne vous gênez pas hein ! J'ai toujours aimé les spectacles.

–Fermez-la tous les deux, lança Nyla les yeux rivés vers le ciel.

–Comme toujours, elle essaie de s'échapper d'une situation qui ne lui plait pas. C'est à chaque fois la même chose !

–Au pire, on peut toujours demander à Nieven de chanter, proposa le nain, c'est un elfe lui aussi.

Le Bâtard de l'Aube [Wattys 2020]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant