Tout ce qui compte

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Ils restèrent quelques jours de plus à Ellran Edhil, le temps de se reposer et aider les demi-elfes à se préparer pour leur départ imminent vers Irindor. Nylathria restait toujours en retrait. Elle pensait sans cesse à sa discussion avec Edelra qui tournait en boucle dans son esprit. Parfois, en voyant le regard inquiet de Durlan, elle se sentait coupable de ne pas lui en parler. Mais que pouvait-elle bien lui dire ? Elle-même n'était même pas certaine de tout comprendre et ne savait pas si elle pouvait se fier à cette femme.

Ce qu'elle refusait de croire c'était que, depuis des siècles, son peuple se volait la face. Comment les gens avaient-ils pu autant déformer la réalité et croire en ces mensonges. Si Naevis avait été exécutée le public devait s'en souvenir et en avoir parlé. Pourtant, jamais cette version de l'histoire n'était ressortie, jamais elle n'avait entendu qui que ce soit dire que l'impératrice était une elfe noire.

Elle avait des tonnes de questions mais Bhaklur refusait toujours de se montrer. Elle avait eu beau essayer de l'appeler avec la pierre, il n'était jamais revenu. Elle devait le revoir et tenter de comprendre pour faire ressortir la vérité. Elle avait hésité à demander à Olvaar de se rendre sur les Terres des trolls mais elle s'est rapidement ravisée, c'était bien trop dangereux pour le dragon et elle ne supporterait pas de le perdre définitivement. Et puis sans lui, tous l'espoir des elfes bâti sur eux deux seraient à jamais perdus.

Elle s'empara de son épée et la rangea dans son fourreau, prit son arc et son carquois pour les fixer avec son paquetage et vérifia que la selle de sa monture avait bien été sanglée. Autour d'elle, bon nombre de soldats s'afféraient à transporter les armes des forges et de l'armurerie jusqu'aux charriots. On vérifiait les fers des cheveux, polissait les armures, nettoyait les étendards. Les demi-elfes partiraient dans quelques jours.

Nylathria leva les yeux juste au moment où Durlan sortait du palais et descendait les marches pour rejoindre le petit groupe.

–Alors Durlan, s'exclama Murzol, tu vas enfin te rendre à Lakar, après toutes les scènes que tu as pu nous faire.

–Emmenez-moi sur les Terres d'Ambre, l'imita Torestrin, la reine vous paiera cher pour me voir en sécurité.

–Prenez-moi avec vous, continua Murzol. Je sais me battre, j'ai eu une éducation noble, la stratégie et la géographie n'ont aucun secret pour moi. Je peux vous aider.

Les deux se mirent à rire.

–C'est ça, fit Durlan, moquez-vous mais il n'empêche que j'ai quand même su vous convaincre.

Murzol et Torestrin échangèrent un regard avant d'éclater de rire.

–C'est juste Elecia qui t'a gardé pour tes beaux yeux, lança Torestrin.

–N'importe quoi, elle me détestait.

Durlan coula un regard vers elle alors qu'elle levait un sourcil.

–Vous croyez que je peux demander une rançon à la reine Sirila ? Le défia-t-elle. Après tout, nous ne sommes pas obligés de parler de l'argent que nous a donné Jungdu.

–Là je te reconnais, lâcha Murzol.

–On pourrait exiger dix mille pièces d'or, proposa Torestrin en passant une main sur sa barbe.

–Seulement dix mille ? Fit-elle semblant de s'étonner. Voyons, je suis certaine qu'il vaut un peu plus que cela.

–Bah, les bâtards ça court les rues de nos jours, rétorqua Murzol.

–Pas ceux avec du sang royal.

–C'est bon, vous avez finit ? Lança Durlan. C'est très drôle, on s'amuse bien maintenant on peut parler d'autre chose.

Le Bâtard de l'Aube [Wattys 2020]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant