Le Bâtard de l'Aube [Wattys 2020]

L'héroïne devenue pleutre

Sa jambe continuait à la tirailler malgré les soins que lui apportaient Azlore et le mage Uzapan. Ils étaient partis peu après voir brûlé tous les cadavres, transportant comme ils le pouvaient les blessés qui, pour la plupart, agonisaient si bien que personne n'arrivait à dormir lors de leurs arrêts. Ils avaient perdu beaucoup d'hommes durant la bataille, presque mille selon les conseillers de la reine, et il y avait le double de blessés. Le médecin était débordé, Azlore et Uzapan aidaient avec leurs plantes et leurs remèdes mais le nombre de morts augmentait de jour en jour.

Ils avaient abandonné l'idée du bouclier. À présent l'ennemi savait où ils étaient, se cacher ne servirait plus à rien et ne ferait qu'épuiser davantage Uzapan, Azlore et Nylathria, surtout qu'ils n'étaient plus que trois à savoir pratiquer la magie. Alors tout le monde vivait dans la peur d'entendre de nouveau ce cor.

La reine Sirila avait décidé d'accélérer la cadence afin d'arriver au plus vite à Irindor et que les blessés encore en vie puisse bénéficier de meilleurs soins et de davantage de repos. Mes les soldats tombaient comme des mouches, impuissants face à la fatigue.

Nylathria se sentait de plus en plus mal et bientôt, la fièvre eut raison d'elle. En voyant son état et celui de tout le cortège, Durlan avait été voir la reine pour lui dire de s'arrêter sur le champ. Elle avait été réticente mais avait fini par céder. Alors le jeune homme l'avait allongé et Azlore lui avait fait boire un bouillon de plantes médicinales avant de s'occuper de sa blessure qui avait commencé à s'infecter. Le garçon avait été obligé de brûler la plaie à l'aide d'une lame chauffée à blanc. Elle était jusque là restée digne face à la douleur mais cette fois-ci, elle ne put retenir un cri de douleur. Durlan la tenait contre lui et Olvaar avait posé son museau près d'elle.

Le lendemain, après une nuit entière de repos, sa fièvre était tombée mais elle n'avait toujours pas retrouvé ses forces. Elle avait tout de même insisté pour remonter à cheval, alors que tout le monde l'intimait de ne pas le faire. Mais elle était bien trop têtue pour obéir. Elle refusait de se faire tracter dans une charrette

Ils mirent deux semaines de plus pour arriver jusqu'à Irindor. Le peuple était venu les acclamer une nouvelle fois mais les gens se mirent à déchanter en constatant l'ampleur des dégâts. Certains virent aider à transporter les blessés comme il le pouvait, d'autre appelaient des soldats de l'Aube pour qu'ils apportent leur aide. La dernière fois qu'ils étaient arrivés ici on les avait accueillis chaleureusement, cette fois-ci Nylathria ne croisa que des regards désolés.

Elle suivait la reine Sirila et ses conseillers, aux côtés de ses compagnons. Dans son dos, seul l'un des deux soldats envoyés par Berengar les suivait, l'autre ayant perdu la vie durant le combat. Sa jambe l'élançait mais la blessure ne saignait plus, au moins pouvait-elle se rassurer avec cela.

Ce qui, en revanche, l'inquiétait c'était la confrontation avec Castien. Elle savait qu'il était déjà arrivé à Irindor et qu'il essaierait de la faire combattre. Et elle savait qu'il ne comprendrait pas son choix, certainement comme les autres souverains. Elle était déjà épuisée de cette dispute qui n'avait toujours commencé.

En arrivant dans la cour du château, les nobles de la Cour attendaient ainsi que le prince Marden. La reine Sirila fut la première à poser le pied à terre et ne cacha pas sa colère. Elle s'approcha de l'héritier du trône de l'Aube et ils échangèrent quelques politesses. Nylathria, elle, eut du mal à descendre de cheval et Durlan vint l'aider en la soutenant. Les nobles la regardaient étrangement et elle eut la soudaine envie de leur faire à tous manger leurs bijoux. Elle savait que son visage était pâle et cerné, que ses vêtements étaient remplis de sang séché et qu'un immonde bandage entourait sa cuisse, elle n'avait pas besoin de tous ces regards pour le lui rappeler.