Chapitre 4 La cité des elfes

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Lorsque j'ouvris les yeux j'étais allongée dans les bras du vampire. Il dormait paisiblement, un sourire ravi sur les lèvres. Je me redressai. J'aurais pu deviner qu'il s'agissait d'un vampire. Un teint très pâle. Un visage carré et des cheveux foncés. Il avait tout de l'idée qu'on se faisait d'un vampire. Grand, corpulent, un corps juste parfait. Bien entendu maintenant je savais que tout son corps était parfait, jusqu'à la plus intime partie... peut-être comme tous vampires en règle générale. Il était beau, attirant, un certain charme, je me sentis rougir en pensant cela.

Pourquoi m'étais-je ainsi donnée à lui ? L'envie, la simple envie de cette sensation si pure que j'avais déjà entrevue au simple contacte de sa peau. Le fait ne plus avoir à me préoccuper de préserver ma pureté devait aussi avoir aidé, puisqu'elle avait déjà été prise de force.

Je me levai sans l'éveiller. Avec précaution je pris les deux sacs contenant les œufs. Je me surprise ensuite à l'observer. Je m'étais vraiment livrée à lui sans raison autre que mon envie, cela m'étonnait encore... J'allais peut-être regretter de me retrouver seule à présent. Mais c'était mieux ainsi. S'il avait réussi à m'avoir, il pourrait certainement me détourner de mon but, chose que je ne voulais absolument pas. Seul un elfe pouvait se rendre là où j'allais de toute façon. Enfin je l'espérais. Un endroit sacré. Protégé par une puissante magie, mais si cette magie avait été rompue ? Cela faisait des années que je n'avais pas entendu parler de ce lieu, exactement depuis mon départ, mon exile. Il y a de cela 13 lunes.

Je traversai plusieurs villages. Plusieurs forêts. Volant une jument ainsi qu'une épée et une dague à des chevaliers.

Enfin arrivée face à la grande forêt du Sud je stoppai ma monture. Les dernières lumières du jour allaient bientôt s'éteindre derrière l'horizon. Les quelques arbres qui la cacheraient la striaient déjà d'ombres piquantes. Je descendis du dos de la jument et m'avançai. Les êtres sylvestres étaient courbés, comme par le poids des années. Leurs feuilles sombres tombaient avec lassitudes. J'approchai lentement ma main jusqu'à l'écorce. Sèche. Cassante. Ils étaient vieux. Cette forêt avait vieillie. Le sort qui la protégeait aussi. Il était faible, très faible, trop faible. Il ne protégeait plus rien.

Je remontai en vitesse sur la jument et la fis partir. Il fallait que je comprenne. Que je sache si j'étais véritablement le dernier elfe de ces forêts.

La forêt était immense. Comme à sa belle époque. Mais plus l'on se rapprochait de son cœur, plus l'on s'enfonçait dans l'ombre. Les frondaisons s'épaississaient. Les feuilles basses devenaient rares. Les troncs étaient ternes, maigres. La forêt devenait obscure, animée par le mélange de la lueur rouge sang du soleil et le bleu nuit glaciale sous la lune.

Je fis ralentir ma monture à la vue d'un ravin. Descendis. Je me penchai pour en voir le fond. Autrefois il était empli d'une eau pure, douce, brillante. Désormais il était vide, ou du moins vide d'eau. Mais ce que je crus apercevoir me fit frissonner d'horreur. Des silhouettes noires encore torturées par d'affreuses souffrances. Je lâchai la jument et me mise à grimper dans un arbre. Non, ce n'était pas pour voir plus haut, mais pour cacher les œufs. Une fois redescendus, je descellai la jument, la laissant libre de partir si elle le désirait.

Je m'avançai sur le pont, prudemment et entrai dans la forteresse.

Une forteresse, autrefois belle, splendide, rayonnante de lumière. Une cité comme on en trouvait nulle part ailleurs. Un endroit unique. Merveilleux. Des murs blancs reflétant les rayons du soleil tels des diamants. Des décorations d'or et de lumière. Des détails exquis bien propres aux elfes.

Plus rien de tout cela ne subsistait.

Attentive au moindre bruit autour de moi. Je fini par me pencher sur une silhouette noire au sol. Le corps était calciné. La chair brûlée formait encore les contours du corps d'un homme. Le feu. Chez des elfes cela me paraissait impossible. Mon peuple maîtrisait parfaitement cet élément de la nature, ça ne pouvait pas être un accident. Je pris délicatement la flèche présente aux côtés du mort et l'observai. Une flèche d'onyx, un matériau très utilisé par les elfes. Mais les flèches étaient habituellement faites autrement, de bois et de fer, cela voulait donc dire... non, c'était impossible.

J'agrippai rapidement l'arc au sol. Enclenchai la flèche puis partis vers la première porte. Braquant mon arme devant moi j'avançai. A chaque nouvelle embrasure je m'assurais qu'il n'y avait personne.

Je finis par arriver à la plus grande des salles. La pièce du roi. Là où il recevait. J'abaissai mon arc en observant la salle. Cet endroit où j'avais passé une partie de mon enfance. Dévastée, presque entièrement vide. Un ouragan devait être passé pour ne laisser aucune trace ainsi. Un ouragan de colère, de rage, mais de qui ?

Je passai rapidement la pièce et me rendis dans la chambre. Là je restai un instant sur le seuil. Dans le lit du roi, une ombre, une silhouette. Je finis par m'approcher, lentement. Oui... c'était bien le roi allongé là, dans son lit. Les bras croisés sur l'épaisse cuirasse encore légèrement dorée, ça ne laissait aucun doute, c'était le roi... mon père. Même si je m'en étais douter. Même si ça avait été prévisible. Je m'effondrai aux pieds du lit. Des larmes sur mes joues. Je ne l'avais pas vu depuis mon exil ! Et voilà que je le retrouvais mort. Tué par on ne sait quoi.

Mon cœur était en miette. Déjà qu'il n'était plus très solide au bout de 13 ans d'isolement, mais savoir que je n'avais pas pu lui dire au revoir, que nos dernières paroles avaient été l'annonce de mon exile.

Des bruits de pas et je me retournai rapidement. Brandissant mon arc. Il n'y avait pourtant personne. Mais je n'étais pas seule.

Je quittai le corps de mon père pour rechercher qui, ou quoi, se trouvait dans ses murs. Je devais le trouver, ce seul but emplissait à présent mon esprit. Je marchai lentement. Faisant le moins de bruit possible. Pesant chacun de mes pas sur le sol glacial. Alors que je me rapprochai de la salle du trône. Une silhouette apparue devant moi. Je braquai mon arc immédiatement. Mais à la vue plus en détail du personnage, je souris et baissai mon arme. Vieille elfe, tassé par les années, mais il n'avait pas changé.

ꟷ Danayel ?

Je marchai rapidement vers lui et l'étreignis.

ꟷ Princesse ?

Je souris et l'aidai à marcher. On alla s'installer au centre de la cité. Sur l'immense place meublée uniquement d'un autel, seul édifice encore entièrement debout de ce palais.

ꟷ Que s'est-il passé Danayel ?

ꟷ Oh princesse... je suis désolé... je n'ai rien pu faire... je...

ꟷ Chut calmez-vous... racontez-moi.

ꟷ Ne parlez pas si fort... vous allez la réveiller.

ꟷ Réveiller qui ?

ꟷ La bête.

Princesse des peuples : La grande rébellionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant