Chapitre 10: Antoine

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-Nom de dieu, Jean, il avait des yeux humains, ce monstre!! Humains!! Que comptes-tu faire? Te rends-tu compte? Ce n'était pas un loup. Et il a blessé Arthur!

J'entends les paroles d'un homme en colère. Des voix qui me semblent très lointaines.

-Calme-toi, Almaric! Nous allons trouver une solution...Il faut plus d'hommes. La prochaine fois, nous y retournerons, mais avec plus d'armes. Avec un plan.

-Un plan?? Mais enfin, Jean...Et puis Marie! Mais tu l'as vue réagir? Elle s'est mise à hurler, Jean!

-Elle a eu peur! Comment réagirait ta femme, si une créature pareille se tenait devant elle?

-Non, ce n'est pas seulement ça. Il s'est passé quelque chose...Il lui faut lui demander!

J'entends des pas se rapprocher...Je crois...Et mon père qui hurle:

-Tu n'approches pas cette porte! Elle est choquée et épuisée.

-Mais Jean, je veux juste lui parler...

La voix d'Almaric est plus faible. Il est peiné...Enfin, je crois...je crois...Je...

-Papa...Papa...Laisse-le entrer...

La porte s'ouvre, juste à côté du lit sur lequel je suis allongée. Je soupire de soulagement en reconnaissant la chambre de ma tante, une fois mes yeux ouverts. Cette dernière est assise en bout de lit, le visage ravagé par l'angoisse. Les premiers rayons du soleil traverse la fenêtre. Où est donc passée la nuit? Est-ce qu'Aelween est née, hier soir?

-Marie, commence Almaric en me souriant avec douceur. Comment te sens-tu?

Je le regarde sans pouvoir répondre, tant les pensées sombres m'assaillent. Le regard du monstre me revient en mémoire et mes larmes commencent à couler en silence le long de mes joues.

Je ne sais pas où sont passées les dernières heures...Son regard...Son regard...Il m'a blessée comme un poignard.

Je gémis et mon père s'approche, faisant reculer son ami qui obéit sans broncher.

-Ma chérie...Almaric voudrait te parler...Mais si tu ne veux pas...

-Papa...il avait ses yeux...Il avait les yeux d'Antoine.

-Je sais, me répond-il, les traits tirés. Je les ai vus aussi.

-Papa...Antoine a tué...Il a tué...

-Je sais...Je sais...

Almaric nous regarde avec curiosité. Il ne sait clairement pas de quoi nous parlons. Mon père se retourne et, tout en prenant ma main dans la sienne, il murmure:

-Antoine était l'un des hommes qui ont assassiné Thomas. Tu ne le connais pas, car tu es arrivé avec ta femme juste après le drame dans le village. Après que nous les ayons capturés, nous les avons tous tués. Mais hier, je t'assure...Ce regard...

-Mais enfin, ce ne sont que des yeux, Jean. Ce n'est qu'une bête!

Mon père rit alors tristement.

-Non. Je suis formel. C'était bien le sien.

Almaric nous regarde un instant et ouvre la bouche, pour la refermer aussitôt.

-Te rends-tu compte de ce que tu racontes, Jean? Enfin, un loup avec un regard d'homme, mais qu'...

-Parce que c'était un loup, ça, pour toi??

La réponse de mon père, prononcée dans un hurlement, déchire le calme apparent.

Almaric soupire et se tait en baissant la tête, soudain pensif.

La Louve et la SorcièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant