Chasse à l'homme [HoodiexYou]

Chapitre 7

- AH, PUTAIN !

Ton cri de surprise mêlé à la douleur surplombe un instant le silence pesant de la forêt alors que tu compresses la paume de ta main gauche en pestant.

Voyant le précieux liquide rouge commencer à tracer son chemin à travers tes doigts, tu ouvres ton sac pour pouvoir te soigner. Un pansement sommaire autour de la plaie te permet de reprendre la corvée abandonnée et ton couteau reprend lui aussi bien vite le travail de découpe qu'il faisait auparavant.

Tu ne t'attendais pas à ce que la saison des pluies arrive aussi vite et c'est en catastrophe que tu t'es mises à la recherche d'un abri, préférant éviter les vieilles cabanes de chasseur délabrées où quelqu'un pourrait venir à tout moment. C'était peu probable, mais tout de même possible et c'est ce qui t'as poussé à trouver une petite grotte à laquelle il manquait tout de même une porte coupe-vent. C'est ce projet qui t'as permis de t'entailler la main par ailleurs.

Trois long jours se sont déjà écoulés depuis ta fugue, lentement et dans le silence. Dieu seul sait ce qu'il se passe au Village en ce moment. Tu dois encore être recherchée et ton Oncle doit être plus énervé qu'angoissé mais tu ne sais pas s'il y a eu de nouveaux morts ou quoi que ce soit. Comment le pourrais-tu. Tu as assez de problèmes de ton côté avec le monstre-sans-face qui hante les bois.

Quoique tu ais du mal à savoir si tout ceci est vraiment réel ou le fruit de ton cerveau que la solitude traumatise, tu sais pertinemment que tant que tu le fuis tout ira bien et tu n'auras pas à éprouver ces sensations si réelles d'angoisse et de danger dans tes rêves. A y repenser, si tu devais mettre un visage au "Slenderman" du vieil André, tu choisirais sans hésiter le monstre de ton cauchemar. Mais il y a peu de chances pour que ce soit le même, n'est-ce-pas ?

Il n'empêche que selon l'Ancien, c'est ce fameux Slenderman qui a tué l'ancien Village. Ce qui te parait très peu probable puisque tous les anciens sont morts de vieillesse et que leurs familles ont rejoints les villes. Enfin, c'est ce qu'on t'a raconté évidemment. Tu sais juste que le petit cimetière du Village n'a pas les tombes de ces fameuses familles.

Accompagnant tes pensées, une pluie lourde commença à s'abattre, frappant les arbres, les parois de la grotte et de ta porte fraîchement achevée. Dans un geste de réflexe, tu places un récipient sous la pluie, recouvert d'un fin tissu pour filtrer un minimum l'eau.

Tu ne t'attendais pas à t'ennuyer autant à vrai dire. La pluie a décidée de rester la plupart du temps, t'empêchant de chasser. Enfin chasser des oiseaux en tout cas, car ce n'est pas avec une fronde que tu vas tuer un des rares chevreuils ou sangliers qui passent par là. Bien évidemment, tu avais relié l'apparition de ce monstre à la disparition des bêtes, quoi de plus logique, tout le monde fuirait devant ce..cette chose.

Déprimée, tu retournes sur ta pauvre couchette et ferme les yeux, bercée par la pluie. Des légers bruits de statiques emplissent l'air, remplaçant le son calme de la pluie. Ils grandissent et se renforcent de temps en temps avant de disparaître pour ton plus grand soulagement.

Tu ouvres les yeux. Ce n'est pas la perspective de te dire que tu as réellement entendu ces grésillements qui t'oblige à ouvrir grand tes oreilles, mais le léger bruit de pas boueux. La pluie a cessée et tu n'entends plus que ça.

Ce n'était pas un animal. Plus que sûre, tu ne peux qu'affirmer ce que tu crains. Quelqu'un s'approchait. L'inconnu était plutôt loin. Enfin assez éloigné pour que tu puisses quitter la grotte, de plus enveloppée et cachée par la nuit.

Couteau dans la main, veste camouflée sur les épaules tu t'éclipses et te terre derrière un arbre , dont les racines et la base du tronc ont créé un creux assez large pour un être humain. Bien en face de ta grotte, tes yeux confirment ce que tes oreilles ont entendus. Un faisceau lumineux au loin s'approche, et les pas aussi.

Il n'y a pas qu'un inconnu. Il y en a deux. Deux corpulences masculines, assez grandes. Et peut-être n'aurais tu pas aussi peur d'être découverte s'ils ne s'étaient pas arrêtés nets devant ton abri, comme s'ils savaient qu'ils devaient arriver là. Peut-être que ton coeur ne s'emballerait pas autant si les deux hommes n'étaient pas armés. Un tuyau de fer et un pistolet te semble de trop s'ils sont deux personnes en charge de te ramener...du moins, saine et sauve.

Les deux individus entrent dans la cabane après un long moment silencieux pendant lequel, à ton avis, ils ont écoutés les moindres bruits qui proviendrait de l'intérieur ou de l'extérieur de l'abri. Tu les entends fouiller et vois leur lampe s'agiter et danser à l'intérieur. Tu ne sais pas pourquoi, mais ce qui est sûr c'est que ces abrutis te cherchent bel et bien. Enfin en tout cas, la personne qui vit ici.

Quelques longues minutes s'écoulent avant qu'ils n'en ressortent et mon Dieu que tu aurais préféré ne jamais pouvoir voir ce à quoi ils ressemblent.

Une veste brune-orangée et un sweat à capuche jaune. Tu aurais pu tenter d'en faire abstraction si celui au pull jaune ne portait pas cette cagoule noire agrémentée d'un smiley triste rouge.

D'ordinaire, tu te jetterais sur celui que tu devines être Brian, imaginant qu'ils te cherchent, comme le fait le Village. Mais maintenant ? L'aura glaciale qui émanent du duo te fait te sentir en danger et pour rien au monde, tu ne veux signaler ta présence.

- Elle n'a pas l'air d'être là.

- Doit pas être loin...

Le souffle coupé, tu reconnais sa voix. Quoique celle ci soit plus sombre, elle reste celle du jeune homme en sweat jaune. Trop occupée à te demander pourquoi il ferait ça, tu ne prête pas attention à la fin de sa phrase. Tu aurais dû. Tu aurais entendu qu'ils ont remarqués tes traces de pas et tu aurais pu éviter le violent contact du tuyau contre ton arrière crâne. Peut-être que tu n'aurais pas eu besoin de te relever aussi difficilement et  que tu aurais fuit plus tôt, sans sentir le sang couler sur ton visage et la douleur remplir ton corps.

Peut-être. Mais le fait est là. Tu cours douloureusement, priant pour que les inconnus ne te rattrape pas, tout en sachant qu'après avoir marché une journée, tu ne risquais pas d'atteindre le village de sitôt. Surtout en entendant leur cadence bien plus rapide que la tienne. D'ordinaire tu aurais compter sur ton endurance et ton adrénaline mais l'humidité ambiante et la douleur t'en empêchait.

Tu sentais le sang couler sur ton visage après avoir pris de plein fouet de nombreuses branches, rendant ta vision floue, tu le sentais aussi couler le long de ton dos, à cause du coup de celui que tu prenais pour un ami.

Sans rien voir, tu t'es vite retrouvée au bord d'une falaise rocheuse au fond de laquelle coulait une rivière de par ta connaissance, longue, profonde et tourmentée.

Les deux individus ont rapidement finis par te rejoindre et avant que celui à la veste orangée de parvienne à t'attraper, tu te laisses tomber dans l'eau glacée.

A vrai dire, tu pensais pouvoir suivre le cours d'eau et t'éloigner des deux tarés ainsi mais un énième coup à l'arrière de ton crâne par un quelconque rocher t'en rendis incapable.

Tu te retrouves à sombrer dans le froid, l'obscurité et l'inconscience. Seule. Trahie. Loin de ceux qui comptes pour toi.